Il y a parfois dans la vie d’étranges passages, de courts instants où l’espace et le temps se conjuguent pour nous offrir une fragance d’inconnu. Cette étrange éveil soumet à de rudes épreuves, l’authenticité de notre existence et remue la glaise des bienveillantes contradictions. Comment se convaincre désormais du bien fondé de notre réalité ? L’expérience que j’ai vécu s’apparente à l’ultime clameur d’un autre monde, un monde invisible étouffé par le confortable et dévorant malentendu de nos sens étriqués. Mais, je vous laisse appréhender, par vous même, l’étrange circonstance qui m’est apparu un beau jour de Juillet sous le ciel parisien. L’idée me traverse l’esprit de m’agglutiner parmi les nombreux badauds et autres gobe mouches fourrant dans leur gosier tout ce que peut offrir de plus colorés, la petite terrasse d’un savoureux bistrot parisien. Je sens déjà monter en moi, l’écume des papilles. Je me précipite sur une table en lorgnant les assiettes bucoliques de mes concitoyens. Alors que je plonge dans le menu fourmillant de promesses reluisantes, une ombre familière se faufile imperceptiblement dans mon champ de vision. Une ombre qui fait resurgir celles du fleuve Achéron et que je croyais engloutie à jamais. Mon sang ne fait qu’un tour avant de se glacer. Je bondis de mon assise. Puis, sans sourciller, je tourne lentement mon regard vers celle qui ne semble pas me voir. C’est elle. Il n’y a pas de doute, c’est bien elle.