La lecture à portée de main
Description
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Publié par | bibebook |
Nombre de lectures | 23 |
EAN13 | 9782824712628 |
Licence : | Libre de droits |
Langue | Français |
Extrait
H ECT OR BERN I ER
A U LARGE DE
L’ÉCU EI L
BI BEBO O KH ECT OR BERN I ER
A U LARGE DE
L’ÉCU EI L
Un te xte du domaine public.
Une é dition libr e .
ISBN—978-2-8247-1262-8
BI BEBO OK
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– P hilipp H. Poll
– Christian Spr emb er g
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Humblement,
L’auteur .
n
1CHAP I T RE I
L , d’allur e altièr e , r emontait gracieusement
le Saint-Laur ent. Il cr eusait, dans le calme de l’ e au, une entailleL qui s’ ouv rait de toute la lar g eur de son flanc. L’é cume r uisselait
et une vague énor me , courant sur la surface tr oublé e dans un lourd
sommeil, allait p orter aux deux riv es la plainte du fleuv e blessé . La clo che du
quart sonne allègr ement l’heur e de midi : une escouade nouv elle de
marins accourt à la manœuv r e . Le soleil de juillet alanguit les p assag er s ; les
uns, accoudés au r eb ord, les autr es, p ar esseux dans les chaises longues,
subissent l’ enchantement du p ay sag e canadien. L’île d’Orlé ans étale à
leur s r eg ards la mer v eille de ses feuillag es et de ses grè v es. Le phar e de
Saint-Je an-de-l’Île dr esse une silhouee blanche sur un quai ancien, et
on admir e les érables, la co queerie des maisons gr oup é es autour de
l’humble église . Le clo cher de Saint-Michel, élancé , flamb o yant, p araissait
rép andr e des flots de lumièr e sur le plus char mant des villag es, et, un p eu
plus loin, sur la hauteur , la flè che de Notr e-D ame de Lourdes p ointait v ers
2A u lar g e de l’é cueil Chapitr e I
le ciel. On ap er ce vait, à l’ar rièr e , la for me bleue , légèr ement indé cise de
la Gr osse-Île et celle de l’île aux Gr ues, les r o cher s menaçants des îlets de
Belle chasse , la pr esqu’île élég ante de Saint- V allier , la demeur e solitair e
tapie dans un nid de v erdur e de l’île Madame . Le transatlantique se hâte
v er s éb e c ; les rivag es, toujour s plus près l’un de l’autr e , semblent se
dirig er v er s un r endez-v ous. A u loin, quelques v oiles aendent la brise .
Le pilote song e , av e c une étrang e v olupté , que la machine frémissante est
do cile à ses ordr es. On dirait que le quartier-maîtr e , dont les y eux r eflètent
l’infini des mer s, p our suit un rê v e .
Seuls témoins du my stèr e que laissait entr e v oir le visag e hâlé de
l’homme à la r oue , deux p assag er s s’ar rêtèr ent, un moment, émus,
silencieux, fascinés. Ce colosse r e vivait-il ses naufrag es d’autr efois ? Son
imagination le transp ortait p eut-êtr e aux ter r es lointaines. La vision du
villag e natal lui souriait-elle à trav ers l’ esp ace ? Se souv enait-il de la der nièr e
car esse de son enfant ou de la der nièr e étr einte de sa femme ? Était-ce un
de ces p oètes au cœur simple dont la magie de l’heur e ensor celait l’âme ?
— Les traits de ce matelot sont étonnants, n’ est-ce p as, mademoiselle ?
dit Jules Héb ert à celle qui l’accomp agnait. Ce serait un p assionnant
modèle p our un sculpteur . . .
— En effet, nous av ons la même impr ession. . . Il y a, dans son aitude ,
quelque chose de fier , d’un p eu doulour eux qui m’intrigue . . . V ous aviez
raison, c’ est un sujet digne de Ro din.
— Les sour cils tr op four nis, les ép aules tr op massiv es, les mains tr op
r udes s’ effacent : il p ense , il sent, cela ray onne , c’ est de la Be auté . . .
— T oujour s de la Be auté . . . r eprit-elle . D epuis le matin, c’ est une
iv r esse de b e auté . Ce v o yag e du Saint-Laur ent m’ enthousiasme . V ous r
edoutiez de m’av oir tr op fait esp ér er , v ous ne m’aviez p as assez pr omis.
V otr e fleuv e canadien est un noble et grand seigneur et je l’aime . . .
Et, de nouv e au r epris p ar la griserie de la natur e , ils se pr omenèr ent.
Bien souv ent, depuis une semaine , ils avaient ainsi mêlé la cadence de
leur s p as. Ignorant tout l’un de l’autr e , la v eille , Jules Héb ert et Mar guerite
D elor me avaient été réunis p ar cee intimité sp é ciale , rapide , impulsiv e
du b ord. On dirait que l’O cé an grandit les sy mp athies et les répulsions
qui naissent du cho c fortuit des êtr es humains. Ils s’étaient racontés l’un
à l’autr e , et déjà , savaient pr esque tout de leur p assé , de leur jeunesse , de
3A u lar g e de l’é cueil Chapitr e I
leur mentalité , de leur s v o yag es, de leur s esp érances. Elle avait, gravé à
jamais dans sa mémoir e , le ray on de joie intense qu’avait lancé l’ œil du
jeune homme , lor sque les feux de Belle-Isle eur ent soudain p er cé la nuit.
Elle l’ entendait encor e mur mur er av e c p assion : « e je suis heur eux
de te sentir , là , près de moi, mon Canada bien-aimé . Je vais donc te r
ev oir , te contempler , te ser vir encor e . Bientôt, nous viv r ons ensemble : ma
p oitrine aspir e déjà le souffle qui vient de ton g olfe . . . Je v ous demande
p ardon, mademoiselle , je me suis oublié . J’épr ouv e une e x altation plus
forte que ma v olonté . T out l’amour de mon p ay s me g onfle le cœur : c’ est
la pr emièr e fois que j’y r e viens de si loin. J’ai vé cu, là-bas, des heur es
pr ofondes où le meilleur de moi-même a vibré , où j’ai connu la plénitude
de l’ e xistence . J’ai glissé sur l’ onde immortelle , le soir , à trav er s V enise
endor mie ; j’ai v u, des hauteur s du Pincio , le couchant inonder Rome de
fé erie et de splendeur , et, du sommet du V ésuv e , la baie de Naples et la
camp agne italienne dér ouler leur p o ésie emp oignante , et j’ai v u, de la
T our Eiffel, le Paris gig antesque de mes rê v es, et, à la Comé die-Française ,
où l’ on jouait Oedipe-Roi , la résur r e ction de la Grè ce antique . Mais tout
cela ne fut p as le sanglot qui m’a pris à la g or g e il y a un instant. Il a fallu
que je p arle à la ter r e de mes aïeux comme un fils à sa mèr e qu’il r etr ouv e .
Elle est p eut-êtr e moins b e