Monsieur d’Outremort et autres histoiressingulièresMaurice Renard1913Sommaire1 M. d’Outremort, un gentilhomme physicien2 La cantatrice3 L’homme au corps subtil4 Le brouillard du 26 octobre5 La gloire du ComacchioM. d’Outremort, un gentilhomme physicienExtrait des « Souvenirs » de M. de la Commandière à la date du 15 juillet 1911.Les journaux du matin ne se privent pas d’épiloguer sur un drame étonnant qui s’estpassé hier et dont j’ai fort bien connu le héros, un certain marquis Saviniend’Outremort.Il fut mon condisciple à l’Ecole Polytechnique, où je l’aperçus pour la première foisde ma vie. Nous nous liâmes d’amitié avec assez de promptitude, poussés en cecipar notre commune gentilhommerie, qui n’était pas dans les titres et les noms,comme il arrivait déjà trop souvent, mais dans les croyances, l’air et le sang.Aussi bien, je crois avoir été le seul ami de M. d’Outremort. Le nom sépulcral qu’ilporte l’avait d’abord désigné à l’éloignement de nos camarades ; sa personne, ausurplus, ne provoquait pas les avances. Il était beau, certes, mais singulièrement,d’une beauté à la fois cruelle et archangélique. Sa mine était toujours d’un séraphincourroucé, d’Azraël en un mot, l’Ange Exécuteur. Il devait garder jusqu’au déclin del’âge mûr ce visage d’éphèbe et cette expression justicière qu’il offrait à nos yeuxde vingt ans ; devenu sexagénaire, il semblait être encore ce qu’il était dans cetemps-là : un jeune homme noir et silencieux.Sans doute faut-il ...
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