« Ancien libéral, écœuré par le monde du travail, je voterai Mélenchon »

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Témoignage d'un militant du front de gauche
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10 avril 2012

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173

Langue

Français

« Ancien libéral, écœuré par le monde du
travail, je voterai Mélenchon »
Posté le 9 avril 2012 par Place au Peuple dans
LE MEILLEUR DU WEB
,
S'INFORMER
A priori, François Kahn n’est pas tout à fait l’image qu’on se fait d’un militant du Front de
Gauche. Pourtant, la profonde inhumanité à laquelle il a assisté dans le cadre du travail l’a
poussé à abandonner ses idées libérales. Il raconte son parcours pour
Le Plus
.
J’ai 30 ans, je travaille dans le privé depuis 6 ans, et je fais partie des 5% des contribuables
français qui paient le plus d’impôts. Mes intérêts devraient me conduire à voter pour le
candidat PS ou UMP à l’élection présidentielle. Mais le 22 avril, je ne voterai ni pour François
Hollande, ni pour Nicolas Sarkozy, mais pour le candidat du Front de Gauche, Jean-Luc
Mélenchon.
Je n’ai pas toujours voté à gauche. Je suis issu d’un milieu de droite, et à mon arrivée à HEC
en 2001, je m’identifiais clairement au libéralisme économique porté par la droite. Mon
libéralisme s’étendait aux questions de mœurs, ce qui me rapprochait du PS et m’éloignait de
ma classe politique d’origine.
Une conversion radicale à l’antilibéralisme
Aujourd’hui, je rejette radicalement le libéralisme économique, tant celui de l’UMP, que celui
du PS avec son vague souci de protection sociale. Cette radicale conversion à l’antilibéralisme
économique n’est pas le fruit d’un endoctrinement idéologique ou d’une recherche
d’iconoclasme bobo-isant. C’est la fréquentation du monde du travail à son plus haut niveau,
celui des cadres de direction générale, c’est l’expérience intime de ce qui se passe à la tête des
entreprises modernes qui explique ma conversion à cet antilibéralisme. Mon témoignage n’est
pas celui d’actes délictueux devisés au sein des directions générales.
Ce dont j’ai été témoin est à la fois plus simple, plus grave et plus fréquent. Au cœur du soi-
disant capitalisme de l’intelligence, j’ai vu une dévalorisation systématique des capacités
intellectuelles dans le travail, la destruction et une valorisation systématique des tâches les
plus formelles et superficielles, les moins approfondies, les moins créatives. Mon témoignage
est une critique du libéralisme économique au nom du travail bien fait, au nom du travail qui
assure le progrès économique d’une entreprise dans son ensemble et d’une société dans sa
globalité.
Pression managériale
J’ai vu les méfaits de la technocratie managériale dans le privé. J’ai vu des assistantes
travailler de 9h à 20h, sans heures supplémentaires, sans jours de récupération. J’ai vu des
collègues, cadres supérieurs aguerris, formés dans les meilleures écoles et passés avec succès
par des banques d’affaires ou des cabinets de conseil, craquer et fondre en larmes au milieu
d’un bureau partagé sous la pression exercée par le management.
J’en ai vu partir régulièrement en arrêts maladie pour surmenage (le “burn out”), se gaver
d’antidépresseurs, puis revenir, à peine plus reposés, quelques semaines plus tard, prêts à se
ré-user, cumulant tics nerveux, prise de poids, cheveux qui tombent, ongles rongés, et parfois
d’étranges et subites paralysies faciales ou corporelles n’ayant d’autres explications autre que
celle de la pression et du surmenage.
J’ai vu une fuite en avant pour faire toujours plus toujours plus vite, sans se soucier vraiment
de faire mieux. Sans se soucier des conséquences à long terme. Plus on monte dans la
hiérarchie, plus les postes et fonctions sont plastiques, les responsabilités floues et les
évaluations de court terme. Quelques années après, tel manager n’est plus dans la même
division, ni dans la même région du monde, peut-être même plus dans la même entreprise…
Après eux, le déluge. Plus de mémoire, plus de long terme, plus de vision. Faire plus que l’an
dernier, plus qu’au trimestre dernier, plus qu’hier, faire plus, mais vite : pas de temps pour des
modifications structurelles, pour des remises en question ou simplement un peu de réflexion.
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