L'epreuve Million ou les tourments

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L'epreuve Million ou les tourments d'un mathematicien amoureux par Gerald Tenenbaum Valerie etait en larmes. D'un geste lent mais definitif, elle repoussa son assiette de quelques centimetres. Relevant ensuite la tete en tremblant legerement, elle tamponna ses yeux avec sa serviette et, apres une vague hesitation, se leva en hoquetant. — Ma cherie... France Million, la cinquantaine blond cuivre qu'elle aurait voulu venitien, etait restee une femme simple en depit de l'eclatante reussite professionnelle de son mari. Simple, et maigre. Alors que la plupart de ses amies avaient pris leur lot de kilos superflus au fil des annees, elle s'amusait encore, certains dimanches, a enfiler sa robe de mariee et a esquisser des pas de valse devant le grand miroir en pied du grenier. Maigre, et simple. Mais, a cette heure, elle avait d'autres chats a fouetter, si tant est qu'elle fut femme a fouetter qui que ce soit. Elle detestait ces prises de bec entre sa fille Valerie, dont elle etait si fiere, et son mari Stanislas, objet de toutes ses attentions, dont elle redoutait en permanence les sautes d'humeur devastatrices. — Ma cherie... Ton pere pense d'abord a ton bien... Stan paraissait plus grand assis que debout. A cause, probablement, de ses membres trop courts, soi-disant qu'il aurait ?? fait un peu de rachitisme ?? dans les annees de l'immediat apres-guerre, avant le lait Mendes France.

  • annees

  • regard acere

  • ?? foyers septiques

  • bouquet etait

  • lot de kilos superflus au fil des annees

  • rachitisme ?? dans les annees de l'immediat apres-guerre

  • sorte de determination de la bouche et de la machoire

  • levres paternelles


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L´epreuveMillionoulestourments d’un math´ematicien amoureux r G´rald Tenenbaum pa e
Vale´rie´etaitenlarmes.Dungestelentmaisd´enitif,ellerepoussasonassiette dequelquescentim`etres.Relevantensuitelatˆeteentremblantl´eg`erement,elle tamponnasesyeuxavecsaservietteet,apr`esunevaguehe´sitation,selevaen hoquetant. — Ma ch´erie... France Million, la cinquantaine blond cuivr´e qu’elle aurait voulu v´enitien, ´etaitreste´eunefemmesimpleend´epitdele´clatantere´ussiteprofessionnellede son mari. Simple, et maigre. Alors que la plupart de ses amies avaient pris leur lot de kilos superflus au fil des ann ees, elle s’amusait encore, certains dimanches, ´ `aenlersarobedemari´eeet`aesquisserdespasdevalsedevantlegrandmiroir en pied du grenier. Maigre, et simple. Mais,`acetteheure,elleavaitdautreschats`afouetter,sitantestquelle fuˆtfemmea`fouetterquiquecesoit.Elled´etestaitcesprisesdebecentresa lleVal´erie,dontellee´taitsie`re,etsonmariStanislas,objetdetoutesses attentions, dont elle redoutait en permanence les sautes d’humeur d´evastatrices. Mache´rie...Tonp`erepensedabord`atonbien... ` Stan paraissait plus grand assis que debout. A cause, probablement, de ses membres trop courts, soi-disant qu’il aurait  fait un peu de rachitisme  dans lesanne´esdelimm´ediatapr`es-guerre,avantlelaitMend`esFrance.Ilfulminait, mais conservait au coin des l`evres une sorte de mauvais sourire dominateur. Sa calvitieencouronnefaisaitapparaˆıtreun´etonnantcontrasteentrelerosedes joues et les reflets opalescents du cuir chevelu. Unmariage,apre`stout,cestpourtoutelavie...Enn,aumoinspour longtemps... MaisVale´rie,maˆchoiresserre´es,descendaitd´eja`lesmarchesduperron. Cestpr´ecis´ementcetinstantqueStanchoisitpourpasser`alaction.Avec une fulgurance dont plus personne ne le croyait encore capable, et certainement pas sa femme, il bondit de sa chaise, traversa la salle `a manger, le living, et, avant qu’elle n’ait pu y p´enetrer, se retrouva devant la Clio de sa fille (celle-l`a ´ meˆmequilluiavaitoertepourson capes d’histoire), lui bloquant r´esolument le passage. — Tu as vingt-cinq ans... ´ 19032003Unsie`cledemathe´matiques`aNancy, Institut Elie Cartan, Nancy, 2003.
82 Ge´raldTenenbaum Ilnavaitvraimentpaslairdhumeur`ane´gocier.Unpeucommelejouro`u M. Villeret, sous pr´etexte qu’il est pharmacien, avait voulu lui faire refaire tout le circuit d’arriv´ee d’eau de sa maison de campagne, arguant que les canalisations n’´etaient pas aux normes et que le d´efaut de pente engendrerait des  foyers septiques  .Sceptique,Stanl´etaitreste´jusquaubout,aussi´emu du risque de nids `a microbes que de son premier raccord en pvc . Il y avait eu une scene memorable sur le carrefour, juste devant la pharmacie. L’affaire ` ´ s´etaite´videmmenttermin´eedevantletribunaldecommerce,maisStans´etait d´efendumordicuset,apr`esplusieursann´ees,ilavaiteugaindecause. — Tu as vingt-cinq ans, ma fille... — Je sais bien, papa ! — ... et il est hors de question que tu ´epouses un gar¸con qui n’a pas de me´tier! — Mais, papa, il est chercheur, math´ematicien, c’est un scientifique ! C’est unm´etier,c¸a!Dailleursilcotise`alase´cu... C¸aneveutriendire.Math´ematicien,cenestpasunm´etier,pasunvrai... Arc-boute´,enracin´edanssescertitudes,StanislasMillionauraitpurepousser les assauts de tous les rh´eteurs des mondes antique et moderne r´eunis. La col`ere sourdait des prunelles amandines de Val´erie. — C’est quoi alors, M. Je-sais-tout ? — C’est... c’est... un adjectif, voil`a ! Voir traiter son Lucien d’adjectif, c’´etait plus que la jeune fille ne pouvait supporter. Et dire qu’il avait brillamment soutenu sa th`ese de theorie des ´ nombres quelques mois auparavant... Il fallait frapper vite et fort, ´etourdir l’adversaire avant de porter l’estocade. Tant pis pour les ˆames sensibles. — Papa, j’attends un enfant. Ellevitimme´diatementquelleavaitprislavantage:teluntaureauestourbi parlepicador,iltdeuxpasdecˆot´e,luilaissantennlapossibilit´edesasseoir au volant. — Hein ? Un enfant ? Mais, tu n’es... Stan´etaitbleˆme.Lesjoues,rosesquelquesinstantsauparavant,avaientvir´e aunacr´efa¸consaturnismechronique.Quelquesgouttesdesueurglac´eeperlaient sur le front et la moustache. Papa, tu l’as dit toi-mˆeme, j’ai vingt-cinq ans... Mais...mais...ilnapasdem´etier...C¸aneserta`rien,lesmath´ematiques... Si encore il ´etait prof, comme toi, mais chercheur, chercheur en maths, ¸ca n’a aucun sens... Et puis, d’ailleurs, il cherche quoi ? Qu’y a-t-il donc encore `a chercher ? Biensˆurquilyamatie`rea`chercher!Cest...tr`esimportantmeˆme. Devinantunsourireincr´edule,entreme´prisetd´e,surlesle`vrespaternelles, la jeune femme ajouta : — Il y a des masses de conjectures, sur lesquelles ils travaillent tous...
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