17
pages
Français
Documents
2014
Le téléchargement nécessite un accès à la bibliothèque YouScribe Tout savoir sur nos offres
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Publié par
Publié le
19 juillet 2014
Nombre de lectures
55
Langue
Français
Poids de l'ouvrage
1 Mo
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VoicilaprépublicationdeMémoired'unsuicidédeMaximeDuCamp,celivrevainaugurer
notresection"grandsromansoubliés".Lebut?Vousproposerdesversionspropresde
textesinjustementignorésavecàchaquefoisuntravailgraphiquepourmettreenvaleur
cesécrits.L'illustrateurdeMémoired'unsuicidésenommeTomCochien.Nouspensons
publierenvironlamoitiéduroman,gratuitement.Leresteseraaccessibledansson
intégralité via la boutique Amazon ou Youscribe pour un total de 2 euros. Pour le
moment,profitezdecetteintroductionenattendantlasuitepourbientôt.
SiteduBréviairedesvaincus:http://breviairedesvaincus.blogspot.fr/
Introduction
Ilyadeuxans,j'étaisenEgypte;jerevenaisdelaNubie,etniacange,aprèsavoir
descendulescataractes,aprèsavoircôtoyélesmerveilleuxpaysagesduNil,aprèsavoir
stationnédevantlesruinesdeThèbes,s'arrêtaunmatinaumouillagedeKénéh.C'étaità
lafindemai:l'inondationavaitabandonnélesterrescrevasséesparlesoleil;ilfaisait
chaudetleventdekhamsinpoussaitsesrafalesbrûlantessouslecieldécoloré.Mon
équipage,quidepuissixsemainesmaniaitseslonguesramesenchantant,étaitépuiséde
fatigue,ildemandaitunreposquejeluiaccordaisanspeine;etafind'utilisermon
temps,jerésolusd'allervisiterlesbordsdelamerBouge,dontlavilledeKénéhest
séparée par un petit désert que les caravanes mettent lentement quatre jours à
traverser. Un certain chrétien de Bethléem nommé Iça, faisant fonction d'agent
consulaire de France à Kénéh, se chargea de trouver des dromadaires pour mon
drogmanetpourmoi,deschameauxpourlesoutresetpourlesbagages,etfitprixavec
deschameliersquidevaientmeconduireauportdeQôseiretmeramenerensuiteà
Kénéh,oùlerestedemeshommesdemeuraitàm'attendre.
Onpartitavantleleverdujour,etlesoir,àlanuitclose,onpiqualatenteaupuits
delaDjita,aprèsavoirmarchequatorzeHeuressouslesoleiletàtraverslestourbillons
depoussièresoulevésparleventdusud.Lelendemain,onfitlasiestedansunegrotte
couverted'inscriptionshiéroglyphiquesdeladynastieéthiopienne,àunendroitnommé
Gamré-Schems,etlesoirons'arrêtaàquelquedistancedeBir-el-Hamammat(lePuits
desPigeons).Noschameliersauraientvoulupousserplusloin,carlediablevenait
souventvisiterlesvoyageursàcetteplacequej'avaisimprudemmentchoisie,etilsnese
sentaient que médiocrement rassurés malgré les plaisanteries et les raisonnements
philosophiquesdemondrogman.
Lorsquej'eusterminécerapiderepasdesvoyagesaudésert,quisecompose
presqueinvariablementdepainetd'œufsdurs,lorsquej'eusprismesnotesàlaclarté
demalampeportative,jem'étendissurmontapis,latêtesoutenueparunbonoreiller
desablefin,mesarmesprèsdemoi,souslecielétoilé,sentantmoncœursedilaterà
l'aisedanslesimmensitéssilencieusesquim'entouraient.
Lesommeilapprochaitdemoi,lesimagesdessongespassaientdéjàdevantmes
yeux, je n'avais plus qu'une perception confuse des paroles que les chameliers
échangeaientàvoixbasse,lorsquemondrogmansepritàdireenricanant:
—Ah!silediablevientnouscherchercettenuit,il-trouveraàquiparler,car
voilàunecaravanequis'arrêteàcentpasd'ici.
Eneffet,ungrandbruitvintjusqu'àmoi.Deschameauxfaisaiententendrece
gargouillementplaintifquiestleurcri,deshommesparlaientàvoixhaute,onchassaità
coupsdemarteaulespiquetsd'unetente;ons'agitaainsipendantquelquetemps,puis
peuàpeularumeurs'apaisa,setuttoutàfait,etjem'endormis.
Jenesaisdepuiscombiend'heuresjereposaisdecesommeilvigilantparticulier
auxvoyageursquigardenttoujoursuneoreilleouverteaudanger,lorsquetoutàcoupje
fusréveilléparungrandtumulte.DesArabescriaient,uncoupdefusilébranlaleséchos
dudésert,onentendaitdesmiaulementsdouloureuxsemblablesàdesvagissements
d'enfant.Jesautaisurmacarabine,mondrogmanpassasespistoletsàsaceinture.
—C'estSchitanleLapidéquitordlecouàdemauvaispèlerins,disaientles
chameliers.
—C'estquelquebêteférocequiattaquelacaravane,disaitledrogman.
—Allonsvoir,disais-jeàmontour.Etledrogmanetmoinouspartîmesen
courant, pendant que les chameliers s'accroupissaient prudemment derrière leurs
dromadaires.Commenousapprochionsdulieud'oùétaitsortitoutcevacarme,mon
oreillefutfrappéeparunjuronfiançaissinettementarticulé,sifranchementaccentué,
quejenepusm'empêcherdem'arrêteravecétonnement.
—QuiviveIcriai-jeenriant. —France!répondit-on.Jefisencorequelquespasetjemetrouvaifaceàfaceavec
ungrandjeunehommevêtuenWahabi.Ilmetenditlamain:
—Parbleu!medit-il,monsieur,jenem'attendaispasàêtresecouruparun
Français;carceciestunpayspeufréquentéparnoscompatriotes.Jevousremerciede
votreempressement,lepériln'étaitpasbiengrandtoutàl'heure,etmaintenantilest
entièrementpassé.
—Qu'était-cedonc?luidemandai-je.
—Rien.Unebandedechacalsquirôdaitpariciavoulutâterdenosprovisions;
unchamelieracriécontreeux,monArnauteleuraenvoyéuncoupdefusil,monchien
s'estmisàleurpoursuite,etàcetteheuretoutestaumieuxdanslemeilleurdesdéserts
possibles.Est-cequevousvenezdeKénéh?
—Oui,j'ensuispartihiermatin.
—Dieusoitloué!s'écria-t-il,carvousdevezavoirdel'eauduNil.Depuisunan
quejecoursl'Arabie,jeneboisquedesbreuvagesimpossiblesetj'aihâted'avaler
quelquesgorgéesd'eaudouce.LespuitsdeQùseirsontpleinsdejenesaisquelliquide
infâmeplusnauséabondquedesproduitschimiques;vousm'endirezdesnouvelles
lorsquevousyserez.
J'envoyaimondrogmanchercheruneoutreàlaquelleondonnadelongsbaisers,
commeditSancho.J'étaisurprisdelajoiequ'éprouvaitcejeunehommeàboirecette
eau,quidepuisdeuxjoursballottaitausoleildansdevieillespeauxdechèvres,etque
déjàjetrouvaissimauvaise.
Lorsqu'ileutlargementbu,ilfitclaquersalanguecommeungourmetquivient
de savourer un verre de ce fameux vin de Porto retrouvé sous les décombres du
tremblementdeterredeLisbonne.
— Merci,medit-ilenrendantl'outreaudrogman.Est-cequevousavezbienenvie
dedormir?PuisquenoussommesenOrient,vousmepermettrezdevoustraiter
àl'orientale:nousnepouvonsnousséparersansavoirprislecaféetfuméun
tchibouk.
— Soit,luidis-je;maisavanttout,présentons-nousnous-mêmesl'unàl'autre.Je
m'appelleMaximeDuCamp;jeviensdeWadi-Halfaetjecomptemerendreà
Constantinopleàtraverslecontinent,pourdelàrejoindrelaFranceparlaGrèce
etl'Italie.Etvous,monhôte?
— Moi,répondit-il,jem'appelleJean-Marc;j'arriveduCaucase,àtraverslaPerse,le
Khurdislan, la Mésopotamie et l'Arabie; je me rends à Alexandrie, où je
m'embarqueraipourlaFranceoutoutautrepays,selonlafantaisiequime
poussera.
— Ehbien,moncherJean-Marc,entronssousvotretente!
— Ma foi, mon cher Maxime, vous y serez le bienvenu. Les voyageurs se lient
facilement:onserencontreaujourd'hui,demainonseseraabandonnépeut-être
pourtoujours;aussionmetviteletempsàprofit;ondonneenquelquesinstants
cequi,dansdescirconstancesordinaires,demanderaitdessemainesetdesmois;
au bout d'une heure on se quitte en s'aimant, sans savoir si jamais on se
retrouvera.lln'yapasdetransition,onenestdéjààl'intimitéqu'onsaitàpeine
dequelnoms'appeler.Onsejuredeserechercher,deserevoirplustard;maisle
tempsvoussépare,lesexigencesdelavievousdispersent,l'oublivouséloigne,et
vousrestezsansnouvellesdeceuxàquivousavezdonnéuneportiondevotre
cœurdansunepoignéedemain.
— Surlesgrandscheminsdumonde,qued'amisj'aidéjàlaisséspourquimon
visageseraitmaintenantinconnu!
Enquelquesminutes,Jean-Marcetmoi,accroupissurunenatte,fumantnoslongues
pipes, roulant nos chapelets entre nos doigts, nous nous traitions déjà en vieilles
connaissances.
Pendantquenouscausions,lerideaudelatentesesoulevadoucement,etun
grandlévrierépagneulentra.llétirasesmembres,léchasesbabines,meflairaavec
circonspection,etallaensuitesecoucherauprèsdesonmaître,quilecaressaenlui
disant:
—Ehbien!Boabdil,nousavonsdoncmangéunpeuleschacals,quenousavonsla
gueuletoutesaignante.LecoupdeBekir-Agaaurasansdouteporté.Cevieuxdiableest
commeleschats,ilyvoitaussibienlanuitquelejour.
Lepersonnagedontonparlaitnetardapasàparaîtrelui-même,apportantlecafé.
C'étaitunhommegrandetsec,
PlusdélabréqueJobetplusfierqueBragance,
etdeminehautaine,malgréledépenaillementdesoncostumealbanais.Safustanelle
retombaittrouéecommeuneguipuresursesjambeslaisséesàdeminuespardes
guêtresdéchirées;desaceinturesortaientdespistoletsàcrossedecoiailetunyatagan
àfourreaudevermeil;taveste,autrefoisrougebrodéed'or,s'enallaitenlam