Les RustiquesLouis PergaudLa Traque aux nidsY avait Michaud, y avait Langlois,Y avait Landouillard…Comme dans la chanson, nous étions sept ; c’est-à-dire, non, ne dramatisons rienet restons sincère, nous n’étions que six : Lebrac, Camus, Gambette, Tintin,Grangibus et La Crique.Vétérans chevronnés de la guerre des boutons, grands maraudeurs de pommes etabatteurs de noix, tous, garnements de dix à douze ans, nous avions ce printemps-là reformé notre association de bandits grimpeurs, pillards aériens et détrousseursde nids. Pour le partage, ainsi qu’on le verra, nous étions toujours un de trop, sinondeux ; pour la besogne, la criminelle besogne, nous étions de trop tous les six.Ce n’était point pourtant aux petits oiseaux que nous en voulions, sauf Camus quiavait conservé un goût très vif pour les bouvreuils, prédilection qui lui avait d’ailleursvalu son nom : un bouvreuil, là-bas, s’appelant un camus. Donc, les pinsons,chardonnerets, linots, serins, fauvettes et mésanges pouvaient bâtir en paix,pondre, couver et faire éclore sans hâte avec nous ; c’était dans le grand que nousdonnions et par les bois que se perpétraient nos rapts et nos meurtres.Nous traquions les jeunes merles pour leur apprendre à siffler, les geais pour leurapprendre à parler, les corbeaux pour leur apprendre à se saouler, les pies pourleur apprendre à chaparder et les grives pour rien, pour l’égalité devant le malheursans doute.Or la tactique et les règles de notre association ...
Voir