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HONORÉ DE BALZA C
LA DUCH ESSE DE
LANGEAIS
BI BEBO O KHONORÉ DE BALZA C
LA DUCH ESSE DE
LANGEAIS
Un te xte du domaine public.
Une é dition libr e .
ISBN—978-2-8247-0982-6
BI BEBO OK
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compris à Bib eb o ok.LA DUCH ESSE DE LANGEAIS
A F RAN TZ LISTZ.
une ville esp agnole situé e sur une île de la Mé
diter rané e , un couv ent de Car mélites D é chaussé es où la règle deI l’Ordr e institué p ar sainte érèse s’ est conser vé e dans la rigueur
primitiv e de la réfor mation due à cee illustr e femme . Ce fait est v rai,
quelque e xtraordinair e qu’il puisse p araîtr e . oique les maisons r
eligieuses de la Péninsule et celles du Continent aient été pr esque toutes
détr uites ou b oule v er sé es p ar les é clats de la ré v olution française et des
guer r es nap olé oniennes, cee île ayant été constamment pr otég é e p ar la
marine anglaise , son riche couv ent et ses p aisibles habitants se tr ouvèr ent
à l’abri des tr oubles et des sp oliations g énérales. Les tempêtes de tout
g enr e qui agitèr ent les quinze pr emièr es anné es du dix-neuvième siè cle se
brisèr ent donc de vant ce r o cher , p eu distant des côtes de l’ Andalousie . Si
le nom de l’Emp er eur vint br uir e jusque sur cee plag e , il est douteux que
son fantastique cortég e de gloir e et les flamb o yantes majestés de sa vie
mété orique aient été comprises p ar les saintes filles ag enouillé es dans ce
cloîtr e . Une rigidité conv entuelle que rien n’avait altéré e r e commandait
1La duchesse de Lang e ais Chapitr e
cet asile dans toutes les mémoir es du monde catholique . A ussi, la pur eté
de sa règle y aira-t-elle , des p oints les plus éloignés de l’Eur op e , de tristes
femmes dont l’âme , dép ouillé e de tous liens humains, soupirait après ce
long suicide a ccompli dans le sein de Dieu. Nul couv ent n’était d’ailleur s
plus fav orable au détachement complet des choses d’ici-bas, e xig é p ar la
vie r eligieuse . Cep endant, il se v oit sur le Continent un grand nombr e de
ces maisons magnifiquement bâties au gré de leur destination.
elquesunes sont ense v elies au fond des vallé es les plus solitair es ; d’autr es
susp endues au-dessus des montagnes les plus escar p é es, ou jeté es au b ord
des pré cipices ; p artout l’homme a cher ché les p o ésies de l’infini, la
solennelle hor r eur du silence ; p artout il a v oulu se mer e au plus près de
Dieu : il l’a quêté sur les cimes, au fond des abîmes, au b ord des falaises,
et l’a tr ouvé p artout. Mais nulle autr e p art que sur ce r o cher à demi
eur op é en, africain à demi, ne p ouvaient se r encontr er autant d’har monies
différ entes qui toutes concour ussent à si bien éle v er l’âme , à en ég aliser
les impr essions les plus doulour euses, à en aié dir les plus viv es, à fair e
aux p eines de la vie un lit pr ofond. Ce monastèr e a été constr uit à l’ e
xtrémité de l’île , au p oint culminant du r o cher , qui, p ar un effet de la grande
ré v olution du glob e , est cassé net du côté de la mer , où, sur tous les p oints,
il présente les viv es arêtes de ses tables légèr ement r ong é es à la hauteur
de l’ e au, mais infranchissables. Ce r o c est pr otég é de toute aeinte p ar des
é cueils dang er eux qui se pr olong ent au loin, et dans lesquels se joue le flot
brillant de la Mé diter rané e . Il faut donc êtr e en mer p our ap er ce v oir les
quatr e cor ps du bâtiment car ré dont la for me , la hauteur , les ouv ertur es
ont été minutieusement pr escrites p ar les lois monastiques. Du côté de
la ville , l’église masque entièr ement les solides constr uctions du cloîtr e ,
dont les toits sont couv erts de lar g es dalles qui les r endent inv ulnérables
aux coups de v ent, aux orag es et à l’action du soleil. L’église , due aux
libéralités d’une famille esp agnole , cour onne la ville . La façade hardie ,
élég ante , donne une grande et b elle phy sionomie à cee p etite cité maritime .
N’ est-ce p as un sp e ctacle empr eint de toutes nos sublimités ter r estr es que
l’asp e ct d’une ville dont les toits pr essés, pr esque tous disp osés en
amphithéâtr e de vant un joli p ort, sont sur montés d’un magnifique p ortail à
trigly phe g othique , à camp aniles, à tour s menues, à flè ches dé coup é es ?
La r eligion dominant la vie , en en offrant sans cesse aux hommes la fin et
2La duchesse de Lang e ais Chapitr e
les mo y ens, imag e tout esp agnole d’ailleur s ! Jetez ce p ay sag e au milieu
de la Mé diter rané e , sous un ciel brûlant ; accomp agnez-le de quelques
p almier s, de plusieur s arbr es rab ougris, mais vivaces qui mêlaient leur s
v ertes fr ondaisons agité es aux feuillag es sculptés de l’ar chite ctur e
immobile ! V o y ez les frang es de la mer blanchissant les r escifs, et s’ opp osant au
bleu saphir des e aux ; admir ez les g aleries, les ter rasses bâties en haut de
chaque maison et où les habitants viennent r espir er l’air du soir p ar mi les
fleur s, entr e la cime des arbr es de leur s p etits jardins. Puis, dans le p ort,
quelques v oiles. Enfin, p ar la sérénité d’une nuit qui commence , é
coutez la musique des or gues, le chant des offices, et les sons admirables des
clo ches en pleine mer . Partout du br uit et du calme ; mais plus souv ent le
calme p artout. Intérieur ement, l’église se p artag e ait en tr ois nefs sombr es
et my stérieuses. La furie des v ents ayant sans doute interdit à l’ar chite cte
de constr uir e latéralement ces ar cs-b outants qui or nent pr esque p artout
les cathé drales, et entr e lesquels sont pratiqué es des chap elles, les mur s
qui flanquaient les deux p etites nefs et soutenaient ce vaisse au, n’y
rép andaient aucune lumièr e . Ces fortes murailles présentaient à l’ e xtérieur
l’asp e ct de leur s masses grisâtr es, appuyé es, de distance en distance , sur
d’énor mes contr eforts. La grande nef et ses deux p etites g aleries latérales
étaient donc uniquement é clairé es p ar la r ose à vitraux coloriés, aaché e
av e c un art miraculeux au-dessus du p ortail, dont l’ e xp osition fav orable
avait p er mis le lux e des dentelles de pier r e et des b e autés p articulièr es
à l’ ordr e impr opr ement nommé g othique . La plus grande p ortion de ces
tr ois nefs était liv ré e aux habitants de la ville , qui v enaient y entendr e
la messe et les offices. D e vant le chœur , se tr ouvait une grille der rièr e
laquelle p endait un ride au br un à plis nombr eux, légèr ement entr’ ouv ert
au milieu, de manièr e à ne laisser v oir que l’ officiant et l’autel. La grille
était sép aré e , à inter valles ég aux, p ar des pilier s qui soutenaient une
tribune intérieur e et les or gues. Cee constr uction, en har monie av e c les
or nements de l’église , figurait e xtérieur ement, en b ois sculpté , les
colonnees des g aleries supp orté es p ar les pilier s de la grande nef. Il eût donc
été imp ossible à un curieux assez hardi p our monter sur l’étr oite
balustrade de ces g aleries de v oir dans le chœur autr e chose que les longues
fenêtr es o ctog ones et colorié es qui s’éle vaient p ar p ans ég aux, autour du<