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P I ERRE MA C-ORLAN
LE CHAN T DE
L’ÉQU I P A GE
BI BEBO O KP I ERRE MA C-ORLAN
LE CHAN T DE
L’ÉQU I P A GE
1918
Un te xte du domaine public.
Une é dition libr e .
ISBN—978-2-8247-1114-0
BI BEBO OK
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Le te xte suivant est une œuv r e du domaine public é dité
sous la licence Cr e ativ es Commons BY -SA
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Cee œuv r e est publié e sous la licence CC-BY -SA, ce qui
signifie que v ous p ouv ez lég alement la copier , la r e
distribuer , l’ env o y er à v os amis. V ous êtes d’ailleur s
encourag é à le fair e .
V ous de v ez aribuer l’ o euv r e aux différ ents auteur s, y
compris à Bib eb o ok.A CHARLES MALEXIS,
En témoignage de grande amitié.
n
1Pr emièr e p artie
2CHAP I T RE I
LA CÔ T E
le long des vitr es de la lanter ne p osé e sur la
soue où le co chon fouillait du gr oin une mar mite sonor e et malL é quilibré e .
La maison, plong é e dans l’ ombr e imp énétrable , ne se ré vélait p as tout de
suite .
On ap er ce vait incontestablement une sale p etite lueur , celle de la
lanter ne : des flaques d’ e au qu’un r eflet doré dé celait traîtr eusement.
Une p orte ouv erte quelque p art dans le noir , v omit comme un four à
puddler la lumièr e d’une lamp e à p étr ole . Une silhouee féminine s’
encadra entr e les chambranles ; des sab ots claquèr ent et traînèr ent sur la
pier r e du seuil.
― Oh ! g ast ! aends, va !
L’interje ction et le conseil s’adr essaient au p or c e x alté , qui se tint coi.
Alor s une v oix nasillarde pleura der rièr e le p etit comptoir que l’ on
ap er ce vait vaguement der rièr e une grande table encombré e de b outeilles
3Le chant de l’é quip ag e Chapitr e I
vides.
― A drienne , av ez-v ous donné à mang er au chat ? el temps, ma
doué ! et M. Krühl qui n’ est p as r entré .
― Oui, M’dame ! Certainement, M’dame , fit A drienne .
― Et quand il va r entr er av e c ses vêtements mouillés, g émit l’autr e
femme , il p our rira encor e le plancher de la chambr e . L’ entendez-v ous,
A drienne ?
― Oui, M’dame . J’ entends son p as.
En effet, de gr os soulier s entraient en lue av e c les cailloux de la côte .
elques injur es adr essé es aux auteur s r esp onsables de cee mise en
scène indiquèr ent neement que celui qu’ on aendait ne tarderait p as
à sortir du my stèr e .
Subitement, après av oir p osé sans hésitation un pie d dans une flaque
d’ e au pr ofonde , M. Krühl soufflant et de fort mauvaise humeur , p énétra
dans la grande salle de l’hôtel P lœdac dont A drienne , la ser vante , se hâta
de fer mer la p orte .
― V ous app elez ça un temps, dit-il en s’adr essant à la vieille femme
qui p ortait la coiffe de Moëlan, et la coller ee blanche des dames de
imp erlé .
― Mon p auv r e monsieur Krühl, ma doué ! A drienne va v ous fair e
chauffer un gr og.
― Parfaitement, dé clara M. Krühl. Elle va me fair e chauffer un gr og
av e c du tafia. Ça lui ira mieux au teint que de r ester là à me contempler
av e c des y eux comme des melons d’ e au.
― Ma doué !
La jeune Br etonne s’ eng ouffra dans la cuisine et M. Krühl, ayant
accr o ché son imp er mé able à un clou, allong e a ses jamb es, r e vêtues de gr os
bas de laine , dans la dir e ction des quelques bûches qui ache vaient de se
consumer .
C’était un fort g aillard d’une cinquantaine d’anné es. Ses che v eux
grisonnaient aux temp es. Il rasait sa barb e et sa moustache . Son cou énor me
se mouvait à l’aise dans le col d’un chandail de laine d’un v ert délicat.
Il était vêtu en homme de sp ort, en joueur de g olf ou en p eintr e
futuriste ; il p ortait sur sa tête imp osante une casquee de lainag e v erdâtr e .
Ses soulier s de chasse valaient, étant donné e l’ép o que , une centaine de
4Le chant de l’é quip ag e Chapitr e I
francs et ce détail enthousiasmait M ᵐᵉ P lœdac qui en avait conçu de la
vanité .
― Bouh ! b ouh ! p euh ! souffla M. Krühl en cher chant sa pip e . Et ce
gr og, oh g ast !
A drienne , p ortant le liquide , s’ empr essa.
― Mer ci, Rob ert, dit M. Krühl.
C’était une de ses manies d’ or ner la ser vante d’un nom masculin qu’il
variait, selon son humeur et la couleur de ses cravates.
and il eut absorbé son gr og, il b our ra sa pip e , l’alluma et frissonna
d’aise .
― J’ai été pris p ar la pluie , entr e Belon et K er-Go ez. V ous p ensez si j’ai
fait vite p our r e v enir . Sale nuit. On n’y v oit p as à un mètr e . J’ai e xploré
toutes les fondrièr es de la r oute et j’ai constaté la pr ofondeur de tous les
fossés. . . T u p eux aller te coucher , ma b elle , dit-il en r eg ardant A drienne ,
ça t’ira aussi bien que de r ester là à te balancer comme un fanal au b out
d’une corde .
― Ah ! glapit la vieille dame , et la lanter ne qui est r esté e dehor s,
A drienne !
La ser vante , ayant rép aré cet oubli, r e vint dans la grande salle . M ᵐᵉ
P lœdac tricotait. Krühl baillait, les joues enfoncé es dans le col de son
chandail.
― Pointe est-il v enu ? demanda-t-il entr e deux bâillements.
― Nous ne l’av ons p as v u aujourd’hui.
― Évidemment, cee vache-là a dû r ester à Pont- A v en. Je le v ois très
bien av e c une cuite dans le cr eux de l’ estomac. Le douanier n’ est p as v enu
non plus ? Non. . . Et toi, Bilitis, tu ne sais p as jouer aux cartes, natur
ellement.
La ser vante se mit à rir e .
― Comment, qu’v ous av ez dit, monsieur Krühl, Bili. . . ?
― Tiens, chante-nous quelque chose , A drienne . . . quelque chose en
br eton. . . Non ? Mon Dieu, que tu es bête ! Alor s ne chante p as.
― La p etite Marie- Y v onne est v enue , av e c son chien qu’ elle app elle
son compèr e , dé clara M ᵐᵉ P lœdac sans le v er le nez ; c’ est une v raie fille
de la côte ; elle mang e la cotriade et b oit du cidr e av e c les pê cheur s. Car
nous av ons eu aujourd’hui une bar que de Gâv r es : des vieux. Il n’y a
5Le chant de l’é quip ag e Chapitr e I
plus que des vieux, maintenant. Le fils à Mor e au a été tué aussi. Son pèr e ,
v ous sav ez bien, celui que v ous av ez v u ici en p er mission, il est à b ord
d’un p atr ouilleur .
M. Krühl ne rép ondit p as. Il se le va aussitôt et s’appr o cha d’ A drienne ,
qui tout aussitôt se colla le dos contr e la cloison en planches qui sép arait
la salle à mang er des p ensionnair es de la grande piè ce où l’ on ser vait à
b oir e aux matelots.
― elle tourte ! elle tourte ! se désola Krühl. Ne dirait-on p as que
je suis cet êtr e r ep oussant dont p arle l’ Ap o caly pse . Tiens, jeune fleur
d’anchois, donne-moi un autr e gr og, av e c du r uy s et du citr on. T u n’avais p as
mis de citr on dans l’autr e .
Il r eg arda le plafond et lança la fumé e de sa pip e sur une araigné e qui
glissait comme une g oue d’ e au au b out de son fil.
― Ah ! M ᵐᵉ P lœdac, c’ est la guer r e , et je n’ en v ois p as la fin, qui r
estet-il : comptez un p eu. . . Il y a Pointe . Pointe est plus saturé d’alco ol qu’un
alambic ; ma p ar ole , je n’ ose plus allumer ma cig ar ee à côté de lui.
Mor e au répète tout le temps la même chose et Bébé-Salé prép ar e av e c
ardeur sa tr oisième a&