450
pages
Français
Documents
Le téléchargement nécessite un accès à la bibliothèque YouScribe Tout savoir sur nos offres
450
pages
Français
Documents
Le téléchargement nécessite un accès à la bibliothèque YouScribe Tout savoir sur nos offres
V ICT OR H UGO
LES MISÉRABLES
T ome 4
L’idyle r ue P lumet et l’ép op é e r ue Saint-D enis
BI BEBO O KV ICT OR H UGO
LES MISÉRABLES
T ome 4
L’idyle r ue P lumet et l’ép op é e r ue Saint-D enis
Un te xte du domaine public.
Une é dition libr e .
ISBN—978-2-8247-1076-1
BI BEBO OK
w w w .bib eb o ok.comLicence
Le te xte suivant est une œuv r e du domaine public é dité
sous la licence Cr e ativ es Commons BY -SA
Except where otherwise noted, this work is licensed under
h tt p : / / c r e a ti v e c o m m on s . or g / l i c e n s e s / b y - s a / 3 . 0 /
Lir e la licence
Cee œuv r e est publié e sous la licence CC-BY -SA, ce qui
signifie que v ous p ouv ez lég alement la copier , la r e
distribuer , l’ env o y er à v os amis. V ous êtes d’ailleur s
encourag é à le fair e .
V ous de v ez aribuer l’ o euv r e aux différ ents auteur s, y
compris à Bib eb o ok.T OME 4
L’I D Y LLE RU E P LUMET
ET L’ÉPOP ÉE RU E
SAI N T -DEN IS
1liv r e I
QU ELQU ES P A GES
D’H IST OI RE
2CHAP I T RE I
BI EN COU P É
1831 et 1832, les deux anné es qui se raachent immé diatement à la
ré v olution de juillet, sont un des moments les plus p articulier s et les plus
frapp ants de l’histoir e . Ces deux anné es au milieu de celles qui les
précèdent et qui les suiv ent sont comme deux montagnes. Elles ont la
grandeur ré v olutionnair e . On y distingue des pré cipices. Les masses so ciales,
les assises mêmes de la civilisation, le gr oup e solide des intérêts sup
erp osés et adhér ents, les pr ofils sé culair es de l’antique for mation française ,
y app araissent et y disp araissent à chaque instant à trav er s les nuag es
orag eux des sy stèmes, des p assions et des thé ories. Ces app aritions et ces
disp aritions ont été nommé es la résistance et le mouv ement. Par
intervalles on y v oit luir e la vérité , ce jour de l’âme humaine .
Cee r emar quable ép o que est assez cir conscrite et commence à
s’éloigner assez de nous p our qu’ on puisse en saisir dès à présent les lignes
princip ales.
Nous allons l’ essay er .
3Les Misérables Chapitr e I
La r estauration avait été une de ces phases inter mé diair es difficiles à
définir , où il y a de la fatigue , du b ourdonnement, des mur mur es, du
sommeil, du tumulte , et qui ne sont autr e chose que l’ar rivé e d’une grande
nation à une étap e . Ces ép o ques sont singulièr es et tr omp ent les p olitiques
qui v eulent les e xploiter . A u début, la nation ne demande que le r ep os ;
on n’a qu’une soif, la p aix ; on n’a qu’une ambition, êtr e p etit. Ce qui
est la traduction de r ester tranquille . Les grands é vénements, les grands
hasards, les grandes av entur es, les grands hommes, Dieu mer ci, on en a
assez v u, on en a p ar-dessus la tête . On donnerait César p our Pr usias et
Nap olé on p our le r oi d’Y v etot. « el b on p etit r oi c’était là ! » On a
marché depuis le p oint du jour , on est au soir d’une longue et r ude jour né e ;
on a fait le pr emier r elais av e c Mirab e au, le se cond av e c Rob espier r e , le
tr oisième av e c Bonap arte , on est ér einté . Chacun demande un lit.
Les dé v ouements las, les hér oïsmes vieillis, les ambitions r epues, les
fortunes faites cher chent, ré clament, implor ent, sollicitent, quoi ? Un gîte .
Ils l’ ont. Ils pr ennent p ossession de la p aix, de la tranquillité , du loisir ; les
v oilà contents. Cep endant en même temps de certains faits sur gissent, se
font r e connaîtr e et frapp ent à la p orte de leur côté . Ces faits sont sortis
des ré v olutions et des guer r es, ils sont, ils viv ent, ils ont dr oit de s’installer
dans la so ciété et ils s’y installent ; et la plup art du temps les faits sont des
maré chaux des logis et des four rier s qui ne font que prép ar er le log ement
aux princip es.
Alor s v oici ce qui app araît aux philosophes p olitiques.
En même temps que les hommes fatigués demandent le r ep os, les faits
accomplis demandent des g aranties. Les g aranties p our les faits, c’ est la
même chose que le r ep os p our les hommes.
C’ est ce que l’ Angleter r e demandait aux Stuarts après le pr ote cteur ;
c’ est ce que la France demandait aux Bourb ons après l’ empir e .
Ces g aranties sont une né cessité des temps. Il faut bien les accorder .
Les princes les « o ctr oient », mais en ré alité c’ est la for ce des choses qui les
donne . V érité pr ofonde et utile à sav oir , dont les Stuarts ne se doutèr ent
p as en 1660, que les Bourb ons n’ entr e vir ent même p as en 1814.
La famille pré destiné e qui r e vint en France quand Nap olé on s’é cr oula
eut la simplicité fatale de cr oir e que c’était elle qui donnait, et que ce
qu’ elle avait donné elle p ouvait le r epr endr e ; que la maison de Bourb on
4Les Misérables Chapitr e I
p ossé dait le dr oit divin, que la France ne p ossé dait rien ; et que le dr oit
p olitique concé dé dans la charte de Louis X V I I I n’était autr e chose qu’une
branche du dr oit divin, détaché e p ar la maison de Bourb on et
gracieusement donné e au p euple jusqu’au jour où il plairait au r oi de s’ en r essaisir .
Cep endant, au déplaisir que le don lui faisait, la maison de Bourb on aurait
dû sentir qu’il ne v enait p as d’ elle .
Elle fut har gneuse au dix-neuvième siè cle . Elle fit mauvaise mine à
chaque ép anouissement de la nation. Pour nous ser vir du mot trivial,
c’ est-à-dir e p opulair e et v rai, elle r e chigna. Le p euple le vit.
Elle cr ut qu’ elle avait de la for ce p ar ce que l’ empir e avait été emp orté
de vant elle comme un châssis de théâtr e . Elle ne s’ap er çut p as qu’ elle
avait été app orté e elle-même de la même façon. Elle ne vit p as qu’ elle
aussi était dans cee main qui avait ôté de là Nap olé on.
Elle cr ut qu’ elle avait des racines p ar ce qu’ elle était le p assé . Elle se
tr omp ait ; elle faisait p artie du p assé , mais tout le p assé c’était la France .
Les racines de la so ciété française n’étaient p oint dans les Bourb ons, mais
dans la nation. Ces obscur es et vivaces racines ne constituaient p oint le
dr oit d’une famille , mais l’histoir e d’un p euple . Elles étaient p artout, e
xcepté sous le trône .
La maison de Bourb on était p our la France le nœud illustr e et sanglant
de son histoir e , mais n’était plus l’élément princip al de sa destiné e et la
base né cessair e de sa p olitique . On p ouvait se p asser des Bourb ons ; on
s’ en était p assé vingt-deux ans ; il y avait eu solution de continuité ; ils
ne s’ en doutaient p as. Et comment s’ en seraient-ils doutés, eux qui se
figuraient que Louis X V I I régnait le 9 ther midor et que Louis X V I I I régnait
le jour de Mar eng o ? Jamais, depuis l’ origine de l’histoir e , les princes
n’avaient été si av eugles en présence des faits et de la p ortion d’autorité
divine que les faits contiennent et pr omulguent. Jamais cee prétention
d’ en bas qu’ on app elle le dr oit des r ois n’avait nié à ce p oint le dr oit d’ en
haut.
Er r eur capitale , qui amena cee famille à r emer e la main sur les g
aranties « o ctr o yé es » en 1814, sur les concessions, comme elle les
qualifiait. Chose triste ! ce qu’ elle nommait ses concessions, c’étaient nos
conquêtes ; ce qu’ elle app elait nos empiétements, c’étaient nos dr oits.
Lor sque l’heur e lui sembla v enue , la r estauration, se supp osant
victo5Les Misérables Chapitr e I
rieuse de Bonap arte et enraciné e dans le p ay s, c’ est-à-dir e se cr o yant forte
et se cr o yant pr ofonde , prit br usquement son p arti et risqua son coup . Un
matin elle se dr essa en face de la France , et, éle vant la v oix, elle contesta le
titr e colle ctif et le titr e individuel, à la nation la souv eraineté , au cito y e