Plutarque traduction RicardI. Lucius Cornélius Sylla était d’une de ces familles patriciennes qui composent les premières maisons de Rome. On dit que Rufinus,un de ses ancêtres, parvint au consulat ; mais qu’il fut moins connu par cette élévation que par la flétrissure qu’il reçut : on trouva chezlui plus de dix livres pesant de vaisselle d’argent ; et cette contravention à la loi le fit chasser du sénat. Ses descendants vécurentdepuis dans l’obscurité, et Sylla lui-même fut élevé dans un état de fortune très médiocre. Pendant sa jeunesse, il occupait unemaison de louage d’un prix modique ; et c’est ce qu’on lui reprocha dans la suite, lorsqu’il fut parvenu à une opulence pour laquelle iln’était pas né. Un jour qu’après sa guerre d’Afrique il se vantait lui-même avec complaisance : « Comment seriez-vous homme debien, lui dit un des premiers et des plus honnêtes citoyens, vous qui, n’ayant rien eu de votre père, possédez aujourd’hui une fortuneimmense ? » Quoique alors les Romains eussent dégénéré de la droiture et de la pureté de mœurs de leurs ancêtres, et qu’ilseussent ouvert leur cœur à l’amour du luxe et de la somptuosité, c’était encore aussi un grand sujet de reproche de dissiper sa fortuneet de ne pas conserver la pauvreté de ses pères. Lorsque, devenu maître de Rome, il y faisait périr tant de citoyens, un fils d’affranchi,qui, soupçonné d’avoir donné asyle chez lui à l’un des proscrits, allait être, pour cela seul, précipité de la roche Tarpéienne, ...
Voir