Une étude du Golem de Isaac Bashevis Singer

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Marie-Laure BIGNON



Une étude du Golem
de Isaac Bashevis Singer



Mémoire de DULIJE sous la direction de Mr Blanchard
Université du Maine
2004



Mots clés : Golem
Isaac Bashevis Singer
Littérature de jeunesse













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REMERCIEMENTS



Je tiens à remercier sincèrement toutes les personnes qui m’ont aidée et soutenue pour la
rédaction de ce mémoire : Monsieur Blanchard pour ses conseils avisés et ses
encouragements, Jean-François Genest pour son soutien logistique, sans oublier Isaac
Bashévis Singer pour son talent littéraire, la gaîté de ses contes sortis tout crus du folklore
populaire, enluminures naïves d'un monde juif disparu.













2 SOMMAIRE

INTRODUCTION....................................................................................................................4
LE CONTEXTE ....................................................................................................................... 7
A/ L’ECRIVAIN ........................................................................................................................ 8
-1 Biographie...................................................................................................................... 8
-2 Yiddish et yiddishisme.................................................................................................. 10
B/ HISTOIRE ET TRADITION JUIVE............................................................. ...
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Marie-Laure BIGNON    
   
Une étude du Golem   
de Isaac Bashevis Singer
Mémoire de DULIJE sous la direction de Mr Blanchard  Université du Maine  2004  
   Mots clés : Golem  Isaac Bashevis Singer  Littérature de jeunesse  
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
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REMERCIEMENTS
   Je tiens à remercier sincèrement toutes les personnes qui m’ont aidée et soutenue pour la rédaction de ce mémoire :  Monsieur Blanchard pour ses conseils avisés et ses encouragements, Jean-François Genest pour son soutien logistique, sans oublier Isaac Bashévis Singer pour son talent littéraire, la gaîté de ses contes sortis tout crus du folklore populaire, enluminures naïves d'un monde juif disparu.              
 
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SOMMAIRE
 INTRODUCTION .................................................................................................................... 4  LE CONTEXTE ....................................................................................................................... 7  A/ L’ ECRIVAIN ........................................................................................................................ 8 -1 Biographie...................................................................................................................... 8  -2 Yiddish et yiddishisme.................................................................................................. 10  B/ H ISTOIRE ET TRADITION JUIVE .......................................................................................... 11 -1 La communauté juive et le ghetto ................................................................................ 11  -2 Antisémitisme et persécution séculaire ........................................................................ 13  C/ L’ EPOQUE ET LE MYTHE .................................................................................................... 15 -1 Alchimie et autre magie à la Renaissance ................................................................... 15  -2 Les textes sacrés........................................................................................................... 16  L’ ŒUVRE....................................................................................................................... ....... 19  A/ L ES PERSONNAGES ET LEURS EFFETS ................................................................................ 20 -1 Le golem : figure en creux ou personnage référentiel ................................................. 20  -2 Le Golem et l’effet prétexte.......................................................................................... 22  -3 Miriam et l’intertextualité............................................................................................ 24  B/ U NE DOUBLE ACTION ........................................................................................................ 27 -1 Le conte ........................................................................................................................ 27  -2 Le procès ...................................................................................................................... 29  -3 Le Golem ...................................................................................................................... 31  L’ ECRITURE........................................................................................................................ 33  A/ L E FANTASTIQUE .............................................................................................................. 34 -1 Pouvoir des lettres ....................................................................................................... 34  2 Questionnements du Golem ......................................................................................... 36  -B/ U NE ECRITURE POUR ENFANTS ?....................................................................................... 38 -1 Histoire, focalisation et instances littéraires ............................................................... 38  -2 Les « 10 raisons » adaptées au Golem ........................................................................ 40  CONCLUSION....................................................................................................................... 44  ICONOGRAPHIE.................................................................................................................. 47  ANNEXES............................................................................................................................... 48  
 
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INTRODUCTION
  C’est dans le texte judéo-chrétien le plus célèbre, la Bible, que le mot Golem est pour la première fois utilisé pour désigner la matière d’un corps humain en cours de formation, non encore animé par les facultés de parole et d’intelligence caractéristiques de l’humain. Comme dans cette maxime d’un texte de judaïsme, les Pirqué Avot 5, 7 « sept propriétés caractérisent un Golem, et sept autres un sage », Golem s’opposerait ainsi à hakham  (sage) et désignerait donc tout homme qui manquerait d’intelligence et de sagesse. Mais on ne peut pas exclure pourtant qu’un Golem particulièrement bien réussi grâce à la vertu et à la pureté des intentions de son auteur, puisse être doué de la parole et d’intelligence, comme c’est le cas pour le Golem de notre récit. De plus, comme on sait que des brutes inintelligentes, des « Golems » en ce sens, comme c’est le cas pour deux autres personnages du récit, Stéphane et Barbara, peuvent être normalement issus d’un père et d’une mère, la question du statut humain ou non de l’anthropoïde n’en est pas résolue pour autant. Ainsi, la fabrication d’un homme artificiel pose la question de la nature ou de l’essence de l’homme. Notre Golem, Joseph, avec ses questionnements existentiels, ses « états d’âmes », ses bêtises même et sa liberté de courir partout, n’est-il pas plus humain que des pantins dénués de toute volonté, intelligence, statiques et que l’on peut acheter contre un tonneau de vodka ? Stéphane et Barbara, puisque c’est d’eux qu’il s’agit, sont pourtant censés être de « vrais » homme et femme… Ce n’est qu’au XIIème ou XIIIème siècle que ce mot, Golem, sera réutilisé dans les cercles kabbalistes du hassidisme (branche du judaïsme) allemand. Il désigne alors l’homme artificiel que le sage est capable de créer, grâce au savoir contenu dans le Sefer Yetsirah  (livre de la création). Le Golem, serait alors une créature artificiellement fabriquée par des maîtres du savoir hébraïque ancien grâce à un procédé magique faisant appel aux Saints Noms de Dieu.
 
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« La conception selon laquelle il serait possible de créer des êtres vivants de cette manière se retrouve à travers les doctrines magiques d’un grand nombre de peuples. L’exemple le plus connu est celui des idoles et des images auxquelles les Anciens prétendirent avoir conféré le pouvoir de la parole. Chez les Grecs et les Arabes, ces activités sont parfois mises en rapport avec des relations astrologiques qui consistent à capter la spiritualité des astres et à l’insuffler à des créatures sublunaires. » 1 . Toutefois, le développement de l’idée du Golem dans le judaïsme est indépendant de l’astrologie, cette idée est d’avantage liée à l’exégèse magique du Sefer Yetsirah et à des conceptions qui admettent le pouvoir créatif du langage et des lettres. Le Golem est donc une figure constante de la littérature juive traditionnelle. La légende la plus célèbre sur ce thème est celle du grand rabbin kabbaliste du XVIème siècle, Rabbi Loew, dit le « Maharal » de Prague, qui aurait fabriqué un homme artificiel à l’aide des lettres du nom sacré. Selon une autre légende, un rabbin nommé Ben Levi, créa ainsi quatre géants qui creusèrent au sein de sa maison un souterrain de mille pas de longueur, dont il avait besoin pour cacher ses trésors et ses livres, à la veille d'une perquisition, dont il avait été secrètement averti. Quand le travail fut terminé, le Rabbin se trouva fort embarrassé, car les Golems avaient trois fois leurs tailles, il ordonna respectivement aux trois golems de s'agenouiller pour renouer les cordons de ses sandales, de cette ruse il put effacer sur leurs fronts la première lettre du mot Vie ( E meth, comme nous le verrons plus tard). Au XVIème siècle, lors des persécutions contre les juifs, les histoires de Golem prirent une importance considérable, ce dernier se transformant non plus en esclave mais en sorte de héros nationaliste, en somme un symbole de défenseur. Ce défenseur fantasmé matérialisera un antisémitisme plus pervers : en effet, les juifs relèvent désormais d’un type humain fondamentalement ambigu. Apparemment à la fois une race inférieure, mais, paradoxal et plus grave, également doués de qualités qui leur confèrent des pouvoirs redoutables. Toutes ces légendes se rapprochent beaucoup du récit de I.B. Singer sur lequel nous allons nous pencher, Le Golem . Mais il manque le folklore, les références historiques, les personnages secondaires hauts en couleur, le fantastique, et enfin l’humour et la naïveté qu’y                                                  1 Moshe I., Le Golem , Edtion du Cerf, 1992
 
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a apporté Singer. Il y manque le contexte, que nous étudierons en nous penchant sur l’écrivain, l’histoire et la tradition juive puis l’époque et ce fameux mythe. Nous verrons ensuite l’œuvre elle-même, à travers les personnages et leurs effets et la double action. Et enfin, nous aborderons l’écriture : le fantastique bien-sûr, mais aussi la question de savoir ce qui en fait une œuvre pour les enfants. Ainsi, en entrecroisant ces trois éléments fondamentaux, nous obtenons une œuvre originale, servie par l’inépuisable verve de conteur de Singer, et qui oscille constamment entre le réalisme et le fantastique, les mélangeant comme aucun autre avant lui n’avait osé le faire.                  
 
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A/ L’écrivain
-1 Biographie Isaac Bashevis Singer est né à Radzymin en Pologne, en 1904. Né de père, de grands-pères paternel et maternel rabbins, il fait ses études au séminaire rabbinique de Varsovie où est dispensé un enseignement à la fois traditionnel, religieux et général. Il y apprend l’hébreu moderne et s’intéresse aussi à l’étude de la kabbale. Sa fascination pour ce chapitre mystique du judaïsme remonte à l’époque où il étudiait encore au heder 2 . En effet, dans ce conte pour enfants que l’on peut considérer comme partiellement autobiographique, Un jour de plaisir , le narrateur soutient : « non seulement je pouvais lire une page du Talmud tout seul, mais j’essayais aussi de déchiffrer les volumes de la kabbale qui étaient dans la bibliothèque de mon père – sans y comprendregrand chose, d’ailleurs » 3 . Plus tard, il affirmera même pouvoir faire « apparaître des pigeons (…), s’envoler dans les airs (…), se rendre invisible » 4 , grâce à la kabbale. Mais sous la pression de son camarade qui le pousse à exécuter ses dires, il avoue : « on n’a pas le droit de se servir de ce qu’il y a dans la kabbale. C’est très dangereux. » 5 . Déjà, on ne sait ce qui va l’emporter, de ce respect profond mêlé de crainte pour la religion ou de ce plaisir immense de raconter des histoires. Finalement, rompant avec la tradition familiale, il préfère la carrière littéraire à celle de rabbin, suivant la voie tracée par son frère Israël Yehoshua Singer, écrivain yiddish célèbre. Il va débuter à Varsovie en tant que correcteur, journaliste et traducteur de Thomas Mann et Stefan Zweig. Dès 1925, il écrit ses premières nouvelles et en 1933 paraît son premier roman, la corne du bélier . Il émigra alors aux Etats-Unis en 1935 et devient, par mariage, citoyen américain. Il collabore à certaines revues juives et écrit des nouvelles, des pièces de théâtre radiophoniques et des romans sous formes de feuilletons. Son œuvre, écrite en yiddish, mais traduite par lui-même en anglais, fait revivre la Pologne de son enfance sur le rythme des conteurs traditionnels dans un style dépouillé et visionnaire. Elle est
                                                 2 Ecole primaire juive 3 Singer I.B., Un jour de plaisir, Edition Hachette jeunesse, Le Livre de Poche, collection « mon bel oranger », p.101 4 Ibid, p.106 5 Ibid, p.107  
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peuplée de personnages et de sujets tour à tour pittoresques, sensuels et pathétiques en abordant les thèmes chers au peuple juif et à son Histoire. Son œuvre aborde de nombreux genres : romans ( La famille Moskat , 1950 ; Le magicien de Lublin , 1960 ; Le domaine , 1967 ; Shosha , 1978) ; recueils de nouvelles ( Gimpel le naïf , 1957 ; Le spinoza de la rue du marché , 1961 ; Amour tardif , 1980) ; contes pour enfants ( Une histoire de Paradis , 1966, Un jour de plaisir , 1969 ; Pourquoi Noé a-t-il choisi la colombe , 1974 ; Le golem , 1982) ; récits autobiographiques ( Le confessionnal , 1964, Un jeune homme à la recherche de l’amour , 1976 ; Perdu en Amérique , 1981), ainsi que quelques pièces de théâtre. Son génie de conteur inéluctablement tissé d’autodérision lui valut, dans cette langue yiddish si truculente qu’elle en est une blague à elle toute seule, le prix Nobel de littérature en 1978, mais malgré cela, il demeure trop peu connu. Et par dessus tout, c’est son œuvre pour la jeunesse qui est malheureusement totalement inconnue, « transparente ». Si les encyclopédies sont en quelque sorte « contraintes » de rédiger un article sur ce conteur (même si le conte est un genre qu’elles n’aiment pas), l’article, fort succinct en général, se bornera à citer ses principaux ouvrages pour les adultes. C’est comme s’il n’avait même jamais voulu écrire pour les enfants. Et même le National Book Award pour la littérature enfantine qu’il reçoit en 1970 n’y fait rien, le talent de conteur pour enfants de Singer est ignoré. Pourtant, nul n’aura aussi facilement que lui mêlé l’imaginaire au réel, le merveilleux au quotidien. Il a apporté avec lui le Dieu de son enfance, ses terreurs, sa malice et ses fantasmes tout aussi enfantins. Il est donc bien naturel que l’enfant qui subsiste en Singer ait voulu aussi, et peut-être surtout, s’adresser aux enfants. Il a l’imagination follement conteuse, il est le petit garçon aux papillotes rousses qui aimait pardessus tout les histoires, dans Une journée de plaisir . Isaac Bashevis Singer est décédé en 1991 à Miami en nous laissant, une dizaine d’années après son décès un héritage prépondérant en ce qui concerne la sociologie d’une époque, d’un peuple, d’une langue.  
 
 
 
 
 
 
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-2 Yiddish et yiddishisme
Déjà son nom, yiddish , dit bien ce qu’elle est : une langue juive. Elle se compose d’une forte proportion de mots allemands, d’une certaine quantité de mots slaves, et d’environ dix pour cent de mots hébreux et araméens. On trouve aussi chez elle des termes en vieux français, en italien, et même en arabe. En Amérique, cette langue a acquis des mots anglais. On pourrait penser que le yiddish serait une sorte de « pot-pourris », un mélange de divers langages. Or premièrement, le yiddish possède des mots en propre que les philologues sont incapables d’expliquer : par exemple davenen 6 . C’est du yiddish pur. Les juifs prient dans toutes les langues mais ils daven  seulement en yiddish. Et deuxièmement, il y a une véritable raison à la naissance de cette langue : les juifs avaient cessé de parler l’hébreu à l’époque où ils avaient été chassés de leur pays, vers les IXème et Xème siècle. Les langues des divers conquérants ne correspondaient pas à l’esprit juif, à la façon de penser des juifs, à leur humour, et elles ne pouvaient évidemment pas être parlées à la synagogue. Les longues phrases allemandes à la fin desquelles on rejète le verbe convenaient à un juif comme une cheville ronde à un trou carré. Les juifs prirent alors des mots de vieil allemand et leur insufflèrent une âme juive. L’Hébreu n’avait pas à proprement parler disparu, mais le fait est qu’il était infiniment trop sacré pour être utilisé comme une langue de tous les jours, certains juifs pieux ne le parlaient d’ailleurs que le samedi (le jour saint dans le judaïsme, appelé Shabbat ). Par suite, nous comprendrons aisément que pour faire des blagues (et les blagues font parties de la culture juive comme le vin et la bonne chair font partie de la culture française), ni l’hébreu ni l’allemand ne conviennent. Leur mélange, le yiddish, est une langue qui portera l’humour en elle. C’est dans cet humour que réside la grande difficulté de traduire la littérature yiddish en d’autres langues. Voici quelques exemples représentatifs de blagues juives : -un homme dit à son caissier : « j’ai entendu des choses terribles à ton sujet. Tu me voles mon argent. Comment peux-tu me faire ça à moi ? ». Et le caissier répond : « mais qu’est-ce que tu veux que je fasse ? Que je travaille pour toi et que je vole ailleurs ? ». ou celle-ci : -un groupe de juifs est sur un bateau. Ils apprennent que le bateau a une voie d’eau et poussent des cris terribles. L’un d’eux attrape son voisin par le revers de sa veste et hurle                                                  6 Se balancer d’avant en arrière pendant la prière ou l’étude.
 
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