Mort et deuils en milieux scolaires , livre ebook

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On a souvent du mal à associer la mort à l’école qu’on considère plutôt comme un lieu de vie, avec des jeunes en devenir. Pourtant, les établissements doivent parfois composer avec les drames et le deuil.
Les textes rassemblés dans ce volume présentent les différentes situations auxquelles le monde scolaire doit parfois faire face (décès, maladies graves, expérience migratoire) et proposent des pistes d’accompagnement pour les acteurs éducatifs. Ces situations sont abordées en quatre volets.
Agir quand un drame frappe l’école se demande comment agissent – ou devraient agir – les institutions en de telles circonstances. Décès d’un·e élève ou d’un·e enseignant·e, scolarité dans la maladie, gestion de l’absence et du deuil sont les situations privilégiées.
Vivre et accompagner l’orphelinage en milieu scolaire évoque plusieurs facettes de la gestion du deuil de l’enfant scolarisé : outre plusieurs pistes de réflexion sur la condition d’orphelin, le rôle des enseignants et le vécu des élèves lors de ces événements est évoqué au travers d’enquêtes et témoignages.
Deux contributions sont ensuite consacrées à un enjeu complexe qui interpelle différents types d’intervenants scolaires : Comprendre les deuils multiples des jeunes migrants scolarisés.
Enfin, Éduquer et sensibiliser à la mort en milieu scolaire étudie la question de la mort comme tabou à dépasser : non seulement, comme le montrent les textes précédents, parce qu’elle appartient au cycle de la vie, mais encore parce que son évitement est aussi nuisible. Outre des études globales, plusieurs exemples concrets en vue de se réapproprier la pensée de ces moments-charnières sont présentés.

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Nombre de lectures

0

EAN13

9782889304974

Langue

Français

© Éditions Alphil-Presses universitaires suisses, 2022
Rue du Tertre 10
2000 Neuchâtel
Suisse
 
 
www.alphil.ch
 
 
Alphil Diffusion
Commande@alphil.ch
 
 
DOI : 10.33055/ALPHIL.03207
 
ISBN papier : 978-2-88930-496-7
ISBN PDF : 978-2-88930-498-1
ISBN Epub : 978-2-88930-497-4
 
 
Les Éditions Alphil bénéficient d’un soutien structurel de l’Office fédéral de la culture pour les années 2021-2024.
 
Cet ouvrage est publié grâce au soutien de la Haute École Pédagogique du Canton de Vaud.


 
Illustration de couverture : Résilience , photographie Christine Fawer Caputo ; vue sur Et si ma bille était la lune de Sarah H. (Montreux, août 2018).
 
Responsable d’édition : Jonathan Wenger


Philip D. Jaffé
Préface
La mort n’est pas le mot de la fin, mais un sujet d’étude éternel
M ort et deuils en milieux scolaires … voilà une thématique dont le degré de gravité paraît bien difficile à surpasser pour un colloque scientifique dont les contributions écrites composent le livre que vous tenez entre vos mains. Il faut même du courage pour aborder pareil sujet d’étude, car il est bien connu que beaucoup de personnes, dont de nombreux professionnels, préfèrent le silence à la parole quand il s’agit de la mort, a fortiori quand celle-ci s’invite en milieu scolaire. Après tout, l’école est une institution qui héberge la prunelle de nos yeux, ces petits êtres innocents que les parents et la société cherchent avant tout à choyer et à protéger. Mais la réalité de la mort et du deuil est obstinée et ne peut être forclose. Saisissons donc l’occasion à travers ces quelques lignes pour l’affronter à travers deux prismes bien différents qui tiennent du glocal . Il y a d’abord le retentissement personnel et lo cal , en phase avec ma pratique clinique et mon ressenti. Et puis, il convient d’examiner une perspective plus glo bale et distante, quoique pas toujours, en phase avec ma fonction onusienne au Comité des droits de l’enfant.
En un peu plus de trente années de pratique clinique, bien des choses ont évolué, au point qu’il est facile d’adhérer à la pensée présocratique de Héraclite qui soutient que tout est changement, que l’« on ne se baigne jamais deux fois dans le même fleuve » puisque l’eau qui vous mouille n’est pas la même. Illustration avec trois vignettes cliniques qui rendent compte anecdotiquement d’une prise de conscience progressive, et somme toute socialement remarquable, de ce que la mort représente en milieu scolaire.
Première situation : le travail en silo sous le voile de la discrétion. Voici plus de trente ans, à la fin d’une journée de consultations, la sonnerie de mon cabinet retentit alors que je n’attendais plus de patient. Je découvre une fillette et une adulte qui me sollicitent en urgence. Ce qu’elles me racontent relève de l’horreur. L’avant-veille à l’aube, la mère de la jeune fille avait été assassinée, étranglée par un compagnon d’une nuit. La fillette était la seule témoin du meurtrier qu’elle avait entraperçu en se préparant à se rendre à l’école, sans se douter que le corps sans vie de sa mère gisait dans la pièce voisine. Il faut retenir que, durant la prise en charge thérapeutique intense qui a suivi, aucune mobilisation psychosociale en réseau ne s’est constituée. Un tuteur a été désigné pour la jeune orpheline, désormais pupille, et les services sociaux ont pris acte qu’elle était hébergée par la famille de sa meilleure amie. L’école a attendu dans la très grande discrétion qu’elle revienne. La seule collaboration effective était avec la justice, un juge clairvoyant acceptant de rencontrer la jeune fille informellement en ma compagnie pour la familiariser avec le personnel, le bâtiment et la procédure de l’institution judiciaire qui allait la solliciter 1 .
Deuxième situation : la mobilisation réactive. Il y a une quinzaine d’années, un 23 décembre, le médecin responsable d’une grande orga­nisation internationale me sollicite en urgence pour se rendre au domicile d’un collègue dont le fils unique âgé de douze ans venait à peine de tenter de se suicider par pendaison. Dans un profond coma, artificiellement en vie, il décède quelques jours plus tard. Dans le courant de la prise en charge thérapeutique des parents, il a fallu préparer le déplacement qu’ils souhaitaient réaliser pour récupérer les affaires de leur fils auprès de son internat en Grande-Bretagne. Dans ce contexte émotionnellement dense, un peu au pied du mur, cette école s’est décidée pour la première fois à offrir à l’ensemble des élèves et du personnel diverses possibilités pour aider à métaboliser les émotions générées par la disparition dramatique de l’un des élèves. Avec les autorités scolaires, nous avons même préparé ensemble à distance une rencontre thérapeutique et terriblement délicate entre les parents et les camarades de classe de leur fils.
La troisième situation rend compte d’une prise de conscience institution­nelle et de la mise en place de mesures ad hoc. Cette situation, beaucoup plus lapidaire que les deux à peine relatées, a pour contexte l’expertise judiciaire récente d’un jeune enfant bénéficiant d’un placement de longue date dans une famille d’accueil, désigné en termes techniques comme une protection de remplacement. En recherchant les facteurs de stress du vécu de ce jeune enfant particulièrement fragile sur le plan psychologique, il a émergé que l’une des enseignantes cotitulaires de sa première année de primaire était récemment décédée en cours d’année. Quand bien même dans le cadre de la mission d’expertise il n’y avait pas lieu d’approfondir comment l’institution scolaire s’est mobilisée, l’échange avec la maîtresse a mis en exergue que l’événement n’avait nullement été banalisé, des ressources plutôt importantes déployées, dont des temps d’échange, pour absorber la charge émotionnelle d’une disparition aussi significative.
Mais au-delà de vignettes cliniques personnelles et locales, présentées ici comme illustration d’une évolution conséquente, nous devons surtout nous réjouir, en ouvrant la focale, que le souci protectionnel de nos sociétés européennes en faveur des enfants se soit beaucoup renforcé au cours d’un siècle rempli de tragédies dont deux guerres mondiales. Le dispositif juridique, psychosocial et psychothérapeutique s’est clairement fortifié. En Suisse, outre des services dédiés à la protection de la jeunesse et la naissance, dans tous les cantons, d’Autorités de protection de l’enfant et de l’adulte, l’offre actuelle de la prise en charge thérapeutique des enfants face aux traumatismes en tous genres s’est exponentiellement étoffée. L’un des courants puissants de ces changements provient des avancées internationales en matière de droit humanitaire et des droits humains. Et en particulier il faut souligner à quel point le champ des droits humains de l’enfant permet à l’heure actuelle de poser un cadre socio-judiciaire clair que les États ont l’obligation de mettre en œuvre de manière holistique par des mesures concrètes.
Ce regard nouveau de sollicitude qui est posé sur l’enfant prend naissance à la fin de la Première Guerre mondiale. La britannique Eglantyne Jebb, fondatrice notamment de la grande organisation non gouvernementale Save the children, s’inquiète tout particulièrement du sort des enfants affamés et orphelins dans les nations vaincues. Elle parviendra, avec l’aide de notables genevois, à ce que la défunte Société des Nations promulgue en 1924 la Déclaration des droits de l’enfant, dite de Genève 2 . L’article 2 – il n’y en a que cinq courts en tout – stipule que : «  L’enfant qui a faim doit être nourri, l’enfant malade doit être soigné, l’enfant arriéré doit être encouragé, l’enfant dévoyé doit être ramené, l’orphelin et l’abandonné doivent être accueillis et secourus  ». Et à partir de là, de Déclaration en Déclaration toujours plus élaborées, la communauté internationale rédige et adopte en 1989 la Convention des Nations Unies relative aux droits de l’enfant 3 . Ce traité reste le principal guide supranational contraignant pour les 196 pays sur 197 qui l’ont ratifié (l’unique exception étant les États-Unis d’Amérique).
La Convention relative aux droits de l’enfant (CDE) promeut des principes fondamentaux et l’un des plus importants est celui de l’intérêt supérieur de l’enfant. L’article 2 exige que «  dans toutes les décisions qui concernent les enfants […] l’intérêt supérieur de l’enfant doit être une considération primordiale  » et également que les États «  s’engagent à assurer à l’enfant la protection et les soins nécessaires à son bien-être […] ». Ailleurs, la CDE stipule que les enfants, dans toutes les situations de vulnérabilité, doivent recevoir une attention et des soins particuliers. La combinaison de l’esprit de ces principes et leur codification visent à susciter une culture des droits de l’enfant endossée, opérationnalisée et appliquée par tous les professionnels travaillant pour et avec des enfants. Le milieu scolaire, où les enfants passent le plus clair de leur temps diurne, n’est évidemment pas une exception. Et lorsque la mort s’invite dans une classe ou dans un établissement à travers la perte d’un parent, d’une institutrice ou d’un instituteur, le décès d’un enfant, le suicide, ou même via les traumatismes dramatiques, parfois transgénérationnels, vécus par un enfant migrant ou sa famille… toutes ces situations doivent faire l’objet d’une attention proactive bienveillante par l’ensemble du personnel, le cas échéant spécialisé et chevronné, pour accompagner les enfants.
Au Comité des droits de l’enfant 4 , l’organe onusien dans lequel je siège aux côtés de dix-sept autres membres et qui a pour mission d’examiner comment les États parties à la CDE s’appliquent pour mettre en œuvre ses dispositions, nous sommes souvent confrontés à tout ce qui touche à la protection des enfants et n

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