155
pages
Français
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2012
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Ebook
2012
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Publié par
Date de parution
27 décembre 2012
Nombre de lectures
556
EAN13
9782365752077
Langue
Français
Rien ne perd, rien ne se crée, tout se transforme... D’accord avec vous Monsieur Lavoisier mais qu’est-ce qui se transforme en quoi ? S’inquiètent subitement, Basile et Augustin, deux vaillants petits soldats de la Guerre des Boutons. Tout en pissant le plus loin possible, à fin de savoir lequel sera le chef, ils s’interrogent sur le devenir de ce liquide qu’ils font joyeusement jaillir. Comme à chaque fois qu’ils sont confrontés à ces problèmes auxquelles la pédagogie de leur instit ne sait pas apporter de réponses, c’est dans l’immense savoir et l’infinie patience de leur ami Anselme Saint-Galmier, un vieil ours bouilleur de cru et accessoirement physicien nobélisable, qu’ils se réfugient .Le bonhomme a sa méthode, il s’en voudrait d’être chiantifique.
Armé de l’humour, la tendresse, la gourmandise de Pierre Dac, Henri Vincenot et Jacques Tati, il sait leur dire qu’il n’y a pas de vie possible sans eau, que les enfants qu’ils sont, en sont remplis comme les plantes du jardin, les animaux de la ferme. Il leur apprend que même, si la mémoire de l’eau est proche de la nullité, elle est arrivée sur terre en premier, car sans eau, pas de vie! Dans ce livre, Jean-Pierre Fleury raconte de façon ludique la belle histoire de l’eau, de son trajet aléatoire de la source à la mer ainsi que, remontant vers le ciel, de son difficile retour vers la terre.
Il y est question ici d’inondations, là bas de sécheresses. Ils montrent du doigt et s’emporte contre le gâchis, la pollution, contre ceux qui tirent la chasse d’eau ou laisse couler le robinet. Ce livre peut être mis entre toutes les mains et surtout celles de ces l’adultes qui s’efforcent de ne plus se poser de questions de peur de devoir changer leurs habitudes. Ils y verront comment tout cela est clair, limpide, enfantin.
Ils y trouveront des réponses tellement évidentes et motivantes qu’ils ne sentiront plus obliger de protéger leur égoïsme en proférant le déplorable après moi le déluge. De pluie, de mer, gazeuse ou plate, elle donne la vie et coupe la soif. L’eau : n’en perdez pas une goutte ! Il était une fois l’ai, source de vie...
Publié par
Date de parution
27 décembre 2012
Nombre de lectures
556
EAN13
9782365752077
Langue
Français
Chapitre premier. Ça coule de source
« Celui qu’est le chef, c’est celui qui pisse le plus haut… Un callot à celui qui gagne ! »
Cent fois déjà, Basile a provoqué Augustin son cadet. Et cent fois, le petit bonhomme chevaleresque - parce qu’on ne se dégonfle pas quand on est un gars de Sainte-Sévère - a relevé l’impossible défi. C’est bien sûr, pour le benjamin, un adoubement difficile mais c’est aussi une occasion d’être admis dans le monde des plus grands. Pour l’aîné, à défaut d’être glorieux, c’est le moyen de gagner de belles billes et d’affermir son autorité naissante de jeune coq sur les copains du village. Avec ses quatre ans de plus, Basile l’emporte toujours sans avoir à forcer son talent. Avec ses quatre ans de moins, Augustin paie sans jamais discuter. Pourtant, un matin, notre apprenti petit bonhomme, pressé comme une envie, dansant d’une jambe sur l’autre, provoque son grand frère à participer à une variante inattendue du tournoi.
« Celui qu’est le chef, c’est plus celui qui pisse le plus haut, décrète-t-il. C’est celui qui pisse le plus loin ! »
Cette fois l’enjeu est énorme, il s’agit des trois dernières billes restant à Augustin. Cela oblige à une certaine solennité. Les conditions de la joute sont entérinées par les deux parties « Crache par terre, si tu mens tu vas en enfer ! » Comme il est nécessaire que ces choses prétendument attentatoires aux bonnes mœurs, voire à la pudeur, se déroulent hors du monde des adultes, les champions s’éloignent de la ferme et des regards inquisiteurs de la grand-mère. Ils décident d’aller sur le petit chemin poussiéreux qui fuit l’enfer de la canicule en montant entre les cailloux jusqu’aux prés de Brame-Loup. À peine à mi-chemin, sur les insistances d’Augustin qui a l’impression d’avoir la vessie plus grosse qu’un ballon de foot, les deux frères se mettent côte à côte, s’alignent au centimètre près, se campent solidement sur les pattes arrière et, les braguettes défaites de ce qui leur reste de boutons, ils comptent ensemble : « 1… 2… 3 ».
Les Manneken-Pis s’en donnent à c œ ur joie. C’est parti ! Ça pisse aussi dru que le lait du pis de Pâquerette, la vache qui fait la fierté de l’étable familiale. Ça ne tiendrait pas dans un panier à salade, estiment les deux lurons, fins connaisseurs. Leurs torrents se précipitent. Aidés par la pente, ils triomphent aisément des premiers obstacles. Mais au bout de quelques pauvres petits mètres, ils se noient dans la poussière. Celui de Basile s’y essouffle, perd son avance et disparaît comme un oued dans le désert.
Augustin se marre. Depuis ce matin, il a préparé son coup. Au risque de faire à tout moment dans ses braies, il s’est forcé à ingurgiter et retenir beaucoup plus d’eau que ne peut en contenir sa vessie.
« Regarde ça! C’est pas un pipi de moniau ! » triomphe-t-il.
Sa bouille est encore plus ronde que d’habitude, ses yeux brillent d’éclats de rire, il jubile. Son jet, grossi par le trop-plein de ses en-dedans, a vraiment belle allure. Il submerge et inonde. Il devient un serpent qui sinue vers l’aval. Les vieux y verraient la vouivre accourant vers sa mare pour défendre son diamant. Sa tête blanche est faite d’écume, elle cherche frénétiquement le chemin le plus rapide. Le reptile est pressé et efficace, rien ne semble pouvoir l’arrêter. À droite, il se heurte à un gravier qui, à son échelle, est une montagne. Cela ne passe pas, aussitôt il vire à gauche, attend des renforts, creuse un canyon et s’y engouffre. L’animal s’allonge au fur et à mesure sans que sa source se tarisse. Il s’éloigne et finit enfin par trouver le calme comme si maintenant le chemin lui était familier depuis toujours. Basile feint de reconnaître sa défaite : « C’est au moins une couleuvre à collier que tu nous as pissée là ! »
Mais, dans l’intention de garder tout de même le dernier mot, il ajoute, goguenard : « Sais-tu au moins ce qu’elle va devenir ta guivre ? P’t’être qu’elle va crever au prochain tournant ? P’t’être même que c’est rien que de la flotte ?
— M’en fous, si elle crève elle ira au ciel ! Et pis si tu m’embêtes j’vais l’dire à maman ! » bougonne le vainqueur en reniflant.
Dans l’espoir d’éviter d’avoir à répondre aux questions qu’il a imprudemment posées : « Où est-ce qu’elle va cette flotte ? est-ce qu’elle va revenir ? », comme il n’a pas de réponses à proposer, le grand prend la direction de la Grande-Noue. Là-bas, il sait qu’il trouvera le vieil Anselme, comme toujours disponible pour lui expliquer clairement ce que l’instit n’a pas réussi à lui faire comprendre en dix leçons.
Depuis bientôt quatre mois qu’il fait sec, tout le monde à Sainte-Sévère a son idée sur le manque d’eau, la sécheresse, son pourquoi et son comment. S’il en est ainsi, c’est que les adultes ont souvent des opinions péremptoires à défaut d’être justifiées. Celles-ci se traduisent souvent par l’exhortation à l’emploi de prétendues panacées éculées et toujours inefficaces. Les « y a qu’a » et les « faut qu’on… » sont ressortis à chaque occasion. Les enfants, eux dont l’entendement n’est pas encore alourdi par les théorèmes et les postulats, qui ne sont pas encore sclérosés par les idées reçues, s’interrogent souvent plus avant et cela a le don d’énerver les parents. « Pourquoi l’herbe est verte ? » demande le bambin à son papa qui prétend faire croire à sa progéniture qu’il sait tout et même le reste. « C’est parce que, mon petit, il y a de la chlorophylle dans les plantes » répond alors doctement le géniteur en se rengorgeant. « Pourquoi la corofile c’est vert ? » insiste, ingénu, le sale moutard. Et là le gardien de la connaissance est pris en flagrant délit d’ignorance. Vexé, ou bien il envoie le petit curieux à sa grand-mère qui lui révélera que si l’herbe est verte c’est parce que le bon Dieu en a voulu ainsi. Ou bien il rejoint le grand scientifique que fut Fernand Raynaud en prétendant comme lui que si l’herbe est verte, c’est parce que c’est étudié pour !
Un savant dans la force de l’âge et de la connaissance, s’il avait le talent d’oublier le carcan de ses habitudes serait un grand découvreur. S’il avait eu la sagesse de garder la fraîche et innocente curiosité que seuls possèdent les enfants, il oserait s’aventurer aux limites du merveilleux et il s’appellerait peut-être Einstein, Newton, Pasteur ou Anselme-Moïse Saint Galmier.
Arrivés à la Grande-Noue, les enfants sont accueillis par un maitre des lieux qui se dit ravi et étonné de les recevoir de si bon matin. Augustin tend la goule à Anselme pour l’embrasser. Le vieux l’arrête dans son élan, lui tend la main et lance : « Au large gamin ! Je ne suis pas une rombière, t’as pas besoin de me lécher la pomme pour me dire bonjour. » En fourrageant dans sa barbe, il ajoute « De toute façon, tu sais bien que je pique et que je pue. »
Les civilités terminées, les questions fusent. Le cadet ouvre le bal : « Est-ce que je vais la revoir ma couleuvre ? »
Le plus grand : « L’eau ça va où ? Ça vient d’où ? Est-ce que c’est la même qui revient à chaque fois ? Combien ça peut faire de voyages ? »
Le plus petit revient à la charge : « Est-ce quelle va crever ma couleuvre ? »
Le bonhomme, effectivement, ne sent pas la rose. Dans sa vielle salopette délavée et tavelée de pièces rapportées, il se déplace nimbé de la senteur tenace d’un jus d’alambic encore chaud. Il amène tranquillement son auditoire préféré sous les charpentières d’un tilleul qui semble n’avoir poussé là que pour entendre des confidences. La frondaison opulente du vieil arbre ombre le jardin et épargne aux fleurs et aux légumes les tourments de la sécheresse ambiante. L’intrusion du trio dérange les poules qui tenaient salon sur le banc de pierre. Les couasses interrompent leur conversation pour céder la place à contrecœur, en signifiant aux intrus qu’ils feraient mieux d’aller se faire cuire un œuf ailleurs. C’est en tout cas la traduction de ces caquetages scandalisés que fait Anselme à l’attention de ses petits amis.
Une fois confortablement assis, il enchaîne : « D’abord, nous allons rassurer monsieur Augustin. Sa couleuvre, elle ne va pas crever… à condition du moins qu’il ne veuille pas qu’elle crève. Tu vois, moi, il y a bientôt 70 ans, j’en pissais aussi des couleuvres. Aujourd’hui, ces guivres-là ne sont toujours pas mortes. Et vous savez pourquoi ? non ? Eh bien, c’est simplement parce-que j’y crois encore ! »
Basile l’interrompt, croyant apporter un élément primordial au dossier : « Mais sa couleuvre, c’était même pas une vraie couleuvre ! Juste de la pisse… Et même de la pisse de tricheur.
— Une couleuvre, du pipi de chat ou de tricheur, le rab