40
pages
Français
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2022
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Ebook
2022
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Publié par
Date de parution
01 décembre 2022
Nombre de lectures
3
EAN13
9782492126673
Langue
Français
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Date de parution
01 décembre 2022
Nombre de lectures
3
EAN13
9782492126673
Langue
Français
NÉMI, FILLE de la PRÉHISTOIRE
Sandrine Le Goff
À mes petits élèves de CE2
de l'école Henri Lavielle à Saint-Paul-lès-Dax,
qui m'ont incitée à écrire
cette seconde version de Némi,
afin de pouvoir me lire eux aussi.
I - Une enfant différente
Le soleil venait à peine de se lever sur le campement de la tribu de Galek et tout le monde dormait encore. Tout le monde sauf Meyda, une jeune femme aux longs cheveux blonds, l'artiste-peintre du clan.
Elle aimait commencer son travail très tôt le matin pour profiter du calme qui régnait.
Elle pouvait ainsi se concentrer sur les peintures qu'elle réalisait dans la grotte dont l'entrée se trouvait juste à côté des petites tentes occupées par les membres de la tribu.
Comme chaque jour lorsqu'elle entrait dans cette caverne sacrée pour tout le clan, Meyda prit un moment pour observer les magnifiques peintures rupestres qui en recouvraient les parois, s'éclairant à l'aide d'une lampe à graisse. Elle était admirative des œuvres réalisées par ses ancêtres : des chevaux qui semblaient galoper le long des murs, des aurochs à la taille impressionnante, des cerfs aux bois majestueux. Meyda s'inspirait beaucoup de ces représentations anciennes pour créer à son tour.
Ses animaux préférés étaient les chevaux et elle réussissait à les peindre avec beaucoup de réalisme.
Lorsqu'on les regardait sur les murs de la grotte, on avait l'impression qu'ils étaient vivants.
Elle continua d'avancer dans une longue galerie un peu étroite pour rejoindre l'endroit où elle allait encore passer plusieurs heures.
À l'aide d'un gros galet, elle commença par écraser de petits cailloux rouges qu'elle réduisit en poudre dans un bol en pierre taillée. Dans un deuxième, elle en broya d'autres, d'une teinte plus jaune. Pour les couleurs, c'était exactement ce qu'il lui fallait.
Elle sortit d'un petit sac en peau de renne un gros morceau de charbon, qu'elle avait récupéré dans les restes du feu de la veille. Parfait pour dessiner les contours.
D'un geste sûr et maîtrisé, elle traça la tête puis la courbe du dos d'un cheval. Elle essayait de restituer de mémoire tous les détails du bel animal qu'elle avait observé dans la nature quelques jours auparavant.
Soudain, son gros ventre se contracta violemment.
Meyda grimaça sous la douleur et suspendit son geste.
Mon enfant va naître ! pensa-t-elle aussitôt, habituée maintenant aux signes qui annonçaient l'arrivée d'un bébé.
Meyda avait déjà deux garçons de quatre et deux ans, Kaël et Towen. Elle avait donc l'habitude et se prépara calmement à son accouchement imminent.
Ce ne fut pas très long. Lorsque l'enfant sortit de son ventre, elle le prit avec précaution pour le poser contre sa poitrine. Il était doux et tout chaud.
Épuisée, elle s'allongea sur la couverture en peau de mammouth qu'elle avait préparée sur le sol.
Mais quelque chose l'alerta subitement. Quelque chose qui n'était pas comme les autres fois.
Le silence.
Affolée, oubliant sa fatigue, Meyda se redressa et regarda son enfant. Il gigotait légèrement et elle put constater qu'il respirait bien.
Cela la rassura et elle continua à le détailler.
Ses yeux étaient fermés, mais sa bouche grande ouverte. Il semblait hurler à pleins poumons. Et pourtant elle n'entendait rien. C'était comme si le bébé criait sans faire aucun bruit. Elle ne comprenait pas ce silence et hésita quelques secondes avant de le placer sur son sein. Aussitôt, il se mit à téter et se calma.
Pendant qu'il se nourrissait, Meyda l'inspecta de la tête aux pieds. Tout ce qu'elle voyait lui semblait normal : sa bouche qui remuait, ses petits poings serrés, ses jambes repliées. Elle remarqua alors seulement que c'était une fille. Sa première ! Une grande joie l'envahit et elle oublia momentanément son inquiétude.
Elle questionnerait Savi, la chamane du clan, plus tard.
La vieille femme était la guérisseuse et la savante de la tribu. Elle avait beaucoup de connaissances et une grande expérience. Et surtout, elle communiquait avec les esprits des ancêtres. Ceux-ci lui parlaient en lui envoyant des visions. C'était un don unique, personne d'autre n'était capable de cela. Elle aurait certainement une explication à lui fournir.
Après s'être reposée un long moment, la petite endormie tout contre elle, Meyda se releva et quitta la grotte.
Lorsque les autres membres de la tribu l'aperçurent, tous vinrent à sa rencontre pour découvrir le bébé.
Ce fut d'abord Naé, sa meilleure amie, la fille de Savi, qui la félicita et s’écria :
« Oh ! Meyda, elle est magnifique ! Comment vas-tu l'appeler ?
— Némi, elle s'appelle Némi », répondit-elle en souriant.
Elac, le compagnon de Meyda, s'approcha à son tour.
Il était entouré de ses deux fils, très intrigués par ce qui se trouvait dans les bras de leur mère.
Tous regardèrent la petite fille se réveiller, ouvrir la bouche et se mettre à crier sans qu'aucun bruit ne se fasse entendre.
Profitant de la présence de la chamane, Meyda l'interrogea :
« Savi, je ne comprends pas. Pourquoi est-ce qu'on ne l'entend pas ?
— Ce sont des choses qui arrivent parfois, Meyda, répondit la vieille femme. Ton enfant ne possède pas la parole, mais cela ne l'empêchera pas de vivre tout à fait normalement. Il faudra juste que vous trouviez une autre façon de communiquer avec elle. »
Meyda hocha la tête, rassurée par les paroles de Savi.
Dans leur tribu, on pouvait en effet se parler par gestes, par mimiques et se comprendre parfaitement.
Elle remercia la chamane et se dirigea vers sa tente, entourée de toute sa petite famille.
Savi, elle, alla rendre visite à son fils aîné, Karwen, le chef de la tribu et à Malia, sa compagne, qui venait elle aussi d'avoir un bébé.
Le petit garçon, prénommé Toar, faisait la joie de ses parents.
Son père, un solide chasseur, rêvait déjà secrètement d'en faire son successeur.
Savi se rappelait sa propre joie lorsque ses trois enfants étaient nés : Karwen, Naé, qui confectionnait aujourd'hui de magnifiques vêtements en peau pour tout le clan et enfin Ourel, qui était chasseur lui aussi.
Elle sourit, heureuse de ces nouvelles naissances.
Les esprits le lui avaient fait comprendre : ces deux enfants étaient l'avenir de la tribu.
II - Le langage des signes
Savi avait eu raison, comme d'habitude. La petite Némi, en grandissant, vivait tout à fait normalement au milieu des autres enfants.
C'est seulement vers l'âge de huit ans qu'elle fut un jour confrontée à sa différence et qu’elle en prit douloureusement conscience.
Elle était aussi brune que sa mère était blonde et plutôt grande pour son âge.
Elle passait tout son temps avec ses frères et essayait de les imiter dans la participation aux tâches collectives.
Les enfants de la tribu, dès qu'ils étaient en âge de le faire, devaient aider les adultes dans le campement. On les envoyait ramasser du bois mort pour entretenir le feu, voler les œufs des oiseaux dans leurs nids et remplir d'eau à la rivière les gourdes fabriquées à partir des estomacs ou des vessies des animaux chassés.
Les plus grands, adolescents, commençaient à recevoir un enseignement pour pratiquer des activités plus difficiles. Ils découvraient alors la taille de la pierre ou la sculpture des os pour réaliser des outils, la préparation et la couture des peaux d'animaux pour faire des vêtements ou les techniques de chasse pour rapporter de la nourriture.
À douze ans, Kaël, le frère aîné de Némi, avait été choisi par les tailleurs de pierre.
Patient, appliqué, il passait maintenant de longues heures à fabriquer des perçoirs, des racloirs, des couteaux ou des pointes de lance en pierre.
Towen, le frère cadet, emmenait Némi partout avec lui. Ils s'entendaient très bien tous les deux.
Un jour, après avoir fabriqué de petites nasses pour attraper des poissons, ils se rendirent à la rivière. Towen montra à sa sœur comment positionner le piège au fond de l'eau. Il ne restait plus qu'à être patient. En attendant que leur stratagème fonctionne, ils se mirent à jouer à empiler de petits cailloux le plus haut possible sans les faire tomber.
Au bout d'un moment, ils virent arriver Toar, qui vint se placer dans l'eau à quelques pas de leurs nasses. Il tenait à la main un harpon fait en os, qu'il avait patiemment fabriqué lui-même. Il en était très fier et voulait maintenant l'essayer.
Towen et Némi se regardèrent, un peu sceptiques. Seuls les adultes les plus adroits réussissaient à piéger les poissons de cette façon et Toar n'était qu'un enfant.
Le petit pêcheur ne remarqua pas le regard échangé par les deux autres et se concentra sur sa tâche.
Mais lorsque les premiers poissons passèrent devant lui, le pauvre ne fut en effet pas assez rapide et ne réussit qu'à les faire fuir dans toutes les directions.
L'un d'eux fonça directement dans la nasse de Némi et se retrouva prisonnier. D'abord surprise, la petite fille éclata de rire, sans faire aucun bruit comme à son habitude.
Toar, un peu vexé, se remit à guetter le passage d'autres poissons.
Mais à nouveau, il échoua à les harponner et cette fois ce furent trois petits poissons argentés qui filèrent tout droit dans le piège.
Némi et Towen firent des bonds de joie. Ils étaient tout excités par leur prise ! Apercevant leur mère un peu plus loin, ils se précipitèrent vers elle pour lui raconter leur amusante aventure.
Mais lorsque Némi arriva devant Meyda, elle se retrouva incapable de se faire comprendre. Comment expliquer ce qu'il venait de se passer avec des gestes ? Elle n'y arrivait pas.
Towen prit alors le relais et raconta, entre deux éclats de rire, comment Némi avait attrapé quatre poissons grâce à la maladresse de Toar.
Némi se sentit tout à coup très triste.
Elle avait voulu partager quelque chose avec sa mère et elle n'y était pas parvenue. Towen, grâce à ses paroles, faisait maintenant rire