Souvenirs du vieux temps en Berry , livre ebook

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Cet ouvrage nous enseigne bien des choses sur les usages de nos arrières grands-parents berrichons, qui vivaient dans un monde résolument différent de celui de notre modernité.


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Date de parution

17 janvier 2013

Nombre de lectures

203

EAN13

9782365729239

Langue

Français

Naissances

On croit, chez nous, comme en beaucoup d’autres pays, que le corps d’un enfant qu’une femme porte dans son sein, est susceptible d’offrir l’empreinte, de prendre la figure et la couleur des objets qui ont le plus vivement frappé l’imagination de la mère pendant sa grossesse, ou qui lui ont suscité de bizarres fantaisies, d’ardentes envies, qu’elle n’a pu satisfaire.
En raison de cette croyance, s’il existe dans une église ou ailleurs, un bon saint ou une bonne sainte remarquable par sa bonne mine, il arrive fréquemment que les femmes grosses font devant son image de longues stations, dans l’espoir que leur fruit reproduira les traits de l’objet de leur contemplation.
Au moment où les femmes enceintes éprouvent un de ces appétits immodérés auxquels elles sont sujettes et qui les poussent souvent à désirer de manger des aliments qu’on ne peut leur procurer, elles doivent éviter de se gratter, car leur entant offrirait la représentation de la chose désirée, précisément à l’endroit de son corps où la mère se serait touchée.
Si l’enfant porte la marque d’un fruit, la couleur de cette marque se modifie, chaque année, d’après les nuances que prend sur l’arbre, et même après qu’il a été cueilli, le fruit désiré, en passant par les différents degrés de sa croissance et de sa maturité. Ce préjugé semblerait encore assez généralement accepté, car on lit, non sans surprise, dans le journal Le Siècle du 7 novembre 1862, le fait suivant : « Un cas assez étrange de désirance s’est produit, il y a quelques jours, à Château-Thierry. Une femme est accouchée de deux enfants jumeaux, portant, l’un sur le ventre, l’autre sur la figure, l’emblème d’une betterave. Ce genre de signe a, suivant la science, cela de particulier que, lorsque la plante naturelle arrive à son état de maturité, la partie du corps qui la reproduit subit les mêmes phases de maturation ; ainsi, la peau devient terne, livide, et finirait par se corrompre et par compromettre les autres parties saines du corps si, à l’aide du fer rouge, on ne brûlait la partie malade et, par ce moyen extrême, on ne déterminait la formation d’une nouvelle peau. »
Enfin, l’on prétend qu’il suffit que la femme enviouse - c’est le terme consacré par lequel on désigne une femme grosse qui a des envies - morde dans l’objet envié, pour que son enfant n’en porte pas la marque. Telle était encore, en France, au dernier siècle, la conviction des classes les plus éclairées. En 1711, lors d’un grand dîner que donna le cardinal de Noailles au dauphin et pendant lequel celui-ci avait voulu que toutes les portes fussent ouvertes, et que « la foule même le pressât », le prince fit prendre un soin tout particulier « d’une femme grosse qui s’y était fourrée et lui envoya d’un plat dont elle n’avait pu dissimuler l’extrême envie qui lui avait pris d’en manger. »
Autrefois, en Allemagne, il était permis aux femmes enceintes qui avaient des envies de prendre, partout où elles se trouvaient, des fruits, des légumes, des volailles, etc. - Les gens de Schonaw étaient tenus d’entretenir un verger dans l’Enclos aux moines, pour que les femmes enceintes qui viendraient à passer pussent satisfaire leurs désirs.
On désigne l’enfant qui vient au monde avec un signe par les noms de marcou, marquet.
Nos commères de village sont très ingénieuses à saisir les rapports qui peuvent exister entre les signes empreints sur la peau du nouveau-né et les envies que la mère peut avoir éprouvées. Rien n’échappe à leur explication, rien ne reste dans le doute, et leurs éclaircissements les plus baroques concordent toujours parfaitement avec les souvenirs de l’accouchée ; tant est irrésistible l’entraînement du merveilleux.
Cette influence de l’imagination de la mère sur le fœtus, est admise par les écrivains de tous les âges. Aristote, Hippocrate, et bien d’autres, en parlent. Voltaire lui-même partageait cette croyance. - Les femmes grecques, durant leur grossesse, faisaient placer dans leurs appartements les images des dieux et des demi-dieux les plus célèbres par leur jeunesse et leur beauté, afin que leurs enfants ressemblassent à Apollon, à Narcisse, à Hyacinthe, etc. Hippocrate raconte qu’une Ethiopienne étant accouchée d’un enfant remarquable par la délicatesse de ses traits et la blancheur de son teint, fut accusée d’adultère, mais que cette femme ayant attiré l’attention des juges sur un tableau suspendu près de sa couche, et qui représentait des figures de la plus grande beauté, elle sortit de cette accusation blanche comme neige. En passant du blanc au noir, on trouve à cette histoire le curieux pendant que voici : vers les premières années du dix-neuvième siècle, une dame russe du plus haut parage mit au monde un mulâtre, ce qui l’eût infailliblement noircie dans l’opinion publique, si les académiciens de Moscou n’eussent donné à cet événement une couleur toute naturelle, en déclarant que la vue seule d’un nègre, qui se trouvait au service de cette dame, avait occasionné ce phénomène.
Au dire des anciens, l’imagination chez les animaux peut produire des effets identiques, mais bien plus extraordinaires encore. Par exemple, Aristote, et, longtemps après lui, Vanini, qui vivait au commencement du dix-septième siècle, pensent que, pour se procurer des poulains de couleur verte, il n’est besoin que de revêtir l’étalon et la cavale qui doivent les engendrer de housses de cette couleur. - Tout le monde connaît le procédé employé par Jacob pour obtenir des brebis et des chèvres pies, et qui consistait tout simplement à placer près du râtelier et de l’abreuvoir de ces animaux des gaules vertes à moitié dépouillées de leur écorce.
Toute femme grosse qui, sans y penser, part du pied droit chaque fois qu’elle se met en marche, accouchera infailliblement d’un garçon.
Lorsqu’une femme est près d’accoucher, on s’adresse spécialement à sainte Marguerite pour obtenir l’heureuse délivrance de la mère et assurer l’avenir de l’enfant attendu. Autrefois, dans celles de nos paroisses dont l’église avait sainte Marguerite pour patronne, on passait la ceinture de sa statue autour du corps de la femme en travail, pour faciliter l’accouchement. Du reste, sainte Marguerite joue le rôle de Lucine ailleurs qu’en Berry. Patin, dans une lettre adressée à son ami Spon, dont la femme était enceinte, lui écrit :
« S’il n’y avait que vingt-cinq lieues d’ici à Lyon, j’irais dire l’oraison de sainte Marguerite et prendre ma part du gâteau du baptême de cet enfant qui viendra. »
Le septième garçon d’une même mère, sans interposition de fille, est toujours désigné sous le nom de marcou. Le marcou naît fatalement sorcier. Il passe pour être panseux de secret de naissance, et sa spécialité est de panser des fièvres et des écrouelles. En Normandie, cette inévitable destinée est aussi le lot de la septième fille de la même mère. Nos marcous sont ce que l’on appelait autrefois des septénaires. Le nom de marcous leur a été donné, parce que saint Marcoul, qui vivait, dit-on, vers la fin du sixième siècle, guérissait, en son temps, les scrofuleux, faculté qui lui fut sans doute attribuée, en raison de l’assonance qui existe entre son nom Marcoul et ces mots : mal cou, mal de cou.
Nous rappellerons, à propos de ces aptitudes données par la naissance, que les aînés de la famille des comtes de Châteauroux partageaient avec les rois de France et même, dit-on, avec ceux d’Angleterre, le privilège de guérir les écrouelles, en les touchant avec du pain bénit. Ils devaient, assure-t-on, cette prérogative à l’avantage de posséder sur leur territoire une fontaine au bord de laquelle avaient anciennement stationné les reliques des Trois rois.
La mère qui met au monde un garçon est régalée d’une bonne rôtie au vin bien sucrée ; celle qui accouche d’une fille n’a droit qu’à une simple soupe au lait. Cette coutume, qui est principalement en vogue dans le canton d’Eguzon (Indre), rappelle un devoir seigneurial des plus bizarres qui existait naguère chez nos voisins les Poitevins, et dont le titre fut renouvelé en 1787. Ce devoir consistait, de la part de celui qui l’avouait, à se présenter, lors des couches de la femme de son seigneur, devant la porte de l’accouchée et à crier : « Vive Madame et le nouveau-né ! ».
Si la dame avait donné le jour à

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