Un Noël à Tokyo , livre ebook

Un Noël à Tokyo

 
 
 
 
 
 
 
Fanny Vaillat
 
 
Un Noël à Tokyo
 
 
Couverture : Chloé S.
 
 
Publié dans la Collection Aime
 
 

 
 
© Evidence Editions  2021

 
Mot de l’éditeur
 
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1

 
 
 
C’était la fin de l’automne et Charlotte aurait bientôt vingt ans. Elle était belle, intelligente, généreuse, mais pas franchement dégourdie. Très casanière, assez timide, elle vivait encore chez ses parents et n’était jamais allée plus loin que Nice. Certes, elle connaissait Aix-en-Provence, sa ville natale, comme sa poche et avait fait une partie de ses études à Marseille, mais elle n’avait jamais éprouvé le besoin d’explorer d’autres contrées. Elle adorait « cocooner », comme on dit maintenant : rester sur le canapé, au coin du feu, sous un plaid bien douillet à lire un bon bouquin tout en sirotant un chocolat chaud, c’était le paradis pour elle. Et chaque année, elle se réjouissait donc à l’approche des fêtes de fin d’année, car cette période se prêtait parfaitement bien à son hobby favori. Si ce n’est qu’elle allait vite déchanter dans les jours suivants…
 
 
 
 
2

 
 
 
Le 15 décembre, alors qu’elle s’apprêtait à souffler ses vingt bougies, le ciel lui tomba sur la tête. Ce matin-là, elle se réveilla, de bonne humeur comme presque chaque jour, s’étira et descendit embrasser ses parents avant de prendre le petit déjeuner avec eux. Elle était fille unique, son père était notaire, sa mère avocate. Ils n’étaient franchement pas souvent présents depuis sa plus tendre enfance, mais elle avait toujours été entourée d’amour. Et puis, étant très pantouflarde, très indépendante et surtout sans cesse plongée dans un livre, elle n’avait sincèrement jamais souffert de leur absence. Elle s’installa à table devant son bol de thé et ses tartines beurre-confiture, gentiment préparés par sa maman comme chaque matin, quand son regard fut attiré par une enveloppe qui dépassait de dessous sa serviette. Elle la souleva et découvrit… un aller-retour pour Tokyo ! Ses parents lui avaient offert un séjour au Japon pour son anniversaire ! La plupart des jeunes de son âge auraient sauté au plafond et auraient été plus que ravis de ce présent, mais Charlotte, elle, fut prise de panique… Elle ne sut comment accueillir ce cadeau, si elle devait être contente ou non. Et surtout, elle commença à s’inquiéter : elle qui avait peur de tout, de l’avion, de l’inconnu, comment allait-elle survivre au pays du Soleil levant ? Voyant ses parents la regarder, interloqués, en attendant sa réaction, elle ne put que leur dire :
— Mais… pourquoi ?
— Pourquoi quoi ? lui répondirent-ils en chœur.
— Je ne comprends pas…, continua-t-elle, toujours sous le choc.
— Nous qui pensions te faire plaisir, toi qui adore s ce pays, ça m’a l’air raté, dit sa mère, attristée.
— Non, non, ce n’est pas ça, je suis très heureuse, mais comment je vais me débrouiller toute seule ?
— Ne t’inquiète pas, lui répondit son père, j’ai planifié tout ton séjour et tu retrouveras Hitomi là-bas.
Hitomi était une amie de longue date de son père, qu’il avait connue lors d’un voyage au Japon pour affaires et qui avait été sa guide lors de ce séjour. Depuis, ils étaient restés en contact, prenaient régulièrement des nouvelles par mail et ne manquaient pas de s’envoyer les vœux chaque année. Hitomi était même venue une fois passer quelques jours chez eux lors de vacances dans le sud de la France. Charlotte l’aimait beaucoup, elle était fan de chats comme elle et elles avaient passé de bons moments toutes les deux. Cela la rassura un peu, mais autre chose la tracassait :
— Mais cela veut dire que je ne passerai pas Noël avec vous ?
— Oh , ma grande, lui rétorqua son père, il est temps que tu prennes ton envol et que tu sortes un peu du nid ! Les voyages forment la jeunesse !
C’est sur ces dernières paroles qu’il quitta la pièce, son café vite avalé, pressé comme toujours de se rendre à son étude. Charlotte resta bouche bée et regarda sa mère d’un air implorant, mais celle-ci hocha juste lentement la tête, lui signifiant que son père avait raison et que ce voyage lui ferait le plus grand bien.
Une fois sa mère partie au tribunal, Charlotte se mit à faire les cent pas dans le grand appartement luxueux qu’ils possédaient dans le Vieil Aix. Elle n’arrivait pas à se faire à l’idée, elle était partagée entre l’envie de se rendre dans ce pays qu’elle rêvait de découvrir depuis son adolescence et l’angoisse de se retrouver perdue et complètement démunie face à de multiples situations qu’elle n’avait pas l’habitude de gérer au quotidien. Depuis sa naissance, elle ne s’était en effet jamais souciée de rien, ses parents employant du personnel à domicile. Faire la cuisine, laver son linge, même gérer son budget, on le faisait pour elle. Sans parler de prendre des rendez-vous ou de réserver un billet de train, quelqu’un s’en chargeait aussi. En quelque sorte, tout était fait à sa place, alors comment allait-elle se débrouiller là-bas ?
Elle se posait mille questions et, avant d’attraper une migraine monstrueuse, elle décida de se calmer en commençant à décorer la maison. Sa mère lui avait promis de rentrer tôt ce soir-là pour installer les dernières décorations avec elle, c’était leur petit rituel tous les ans et Charlotte adorait ça. Elle aimait quand la maison se remplissait de rouge, de doré, de vert, mais aussi de bougies, de couronnes de sapin et de branches de gui. Si elle avait pu, elle en aurait mis partout, mais elle savait orner comme personne toutes les pièces de l’appartement avec parcimonie et le résultat était toujours irréprochable.
Avant de s’atteler à la tâche, Charlotte releva sa magnifique chevelure épaisse et bouclée qu’elle avait héritée de sa mère, d’un blond cendré qui mettait parfaitement bien en valeur leurs grands yeux verts à toutes les deux. Elles étaient vraiment très belles et son père les présentait d’ailleurs très souvent aux gens qu’ils rencontraient pour la première fois comme « ses deux beautés ». Mais, de son côté, il n’avait absolument rien à leur envier, car il était aussi très bel homme. Grand, élancé, les cheveux noir de jais, comme ses yeux, il avait surtout énormément de charisme. Et puis, il était toujours très élégant, très bien habillé, un parfait gentleman. Ils formaient avec sa mère un très beau couple, elle les trouvait somptueusement bien assortis et rêvait de pouvoir trouver un jour aussi sa moitié qui lui correspondrait totalement. Car ses parents n’étaient pas en harmonie que sur le plan physique, mais aussi par leur caractère, ils s’entendaient à merveille et se comprenaient l’un l’autre mieux que quiconque.
Dans l’après-midi, elle se fit un bon chocolat chaud et s’installa devant la télévision pour regarder un téléfilm de Noël qu’elle affectionnait tant, une pause bien méritée en attendant que sa mère rentre du travail pour la touche finale des décorations.
Quand le générique de fin apparut sur l’écran, Charlotte prit son téléphone et appela sa meilleure amie. Elle aurait aimé le faire dès l’instant qu’elle avait reçu les billets d’avion en cadeau, mais elle savait que Caroline ne serait disponible qu’en fin de journée.
— Coucou, Caro ! Tu ne devineras jamais ce qui m’arrive !
— Coucou, Charlotte ! Tu m’as l’air tout excitée ! Je ne sais pas… Tu as gagné au loto  !
— Non, pour ça, il faudrait déjà que je joue.
— Ben… Tu as teint tes cheveux en rouge !
— Arrête, Caro ! Tu sais très bien que mes parents feraient une attaque ! répondit-elle en plaisantant.
— Bon, dis-moi, je donne ma langue au chat.
— Alors, tiens-toi bien… Mes parents m’ont offert un séjour à Tokyo pour mon anniversaire !
— Non ! Ce n’est pas vrai !
— Si ! Je te jure, ils m’en ont fait la surprise ce matin !
— Waouh, tu dois être folle de joie ! Toi qui rêvais d’y aller un jour et qui me bassines avec ce pays depuis des années…
— Ha, ha, ha, tu me bassines bien avec Leonardo DiCaprio, toi !
— Ouais, mais ce n’est pas pareil… Bon, trêve de plaisanterie ! C’est pour quand, ce voyage ?
— Je pars après-demain…
— Ah… À ta voix, ça a l’air de moins te réjouir, ça, en revanche.
— Ouais, j’aurais aimé fêt er Noël avec ma famille, tu sais combien j’y suis attachée…
— Je sais, je sais, mais, Charlotte, tu te rends compte, tu vas aller à Tokyo ! On s’en fiche des fêtes, il y en aura d’autres et, là, c’est le rêve de ta vie qui s’offre à toi ! Je crois que tu ne te rends pas compte de la chance que tu as ! Oh, l à, l à , si seulement mes parents pouvaient me