Rwanda 94 : L’ange et Les furies , livre ebook

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Lorsque le Falcon 50 du président rwandais Juvénal Habyarimana, ayant à son bord son homologue du Burundi Cyprien Ntaryamira, fut abattu alors qu’il amorçait un atterrissage à l’aéroport de Kigali au soir du 6 avril 1994, la planète vivait le déclenchement d’un des pires génocides de l’histoire. Comment des humains partageant la même langue et les mêmes terres en sont-ils arrivés-là ? Ce roman nous plonge dans l’histoire du Rwanda et nous présente les étapes d’une des pires tragédies. C’est aussi l’occasion de célébrer les éclats d’humanité à travers toutes les figures courageuses qui ont oeuvré pour sauver des âmes quand tout semblait perdu : nous pensons particulièrement au capitaine Mbaye Diagne qui usa des modestes moyens dont il disposait pour arracher des vies à la mort quand l’ONU, même la grande ONU, retirait ses troupes du mouroir.
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Publié par

Date de parution

01 septembre 2023

Nombre de lectures

14

EAN13

9956429002167

Langue

Français

Poids de l'ouvrage

1 Mo

Blaise Ahnaï Bay
Rwanda 94 : L’ange et Les furies
Editions Proximité, 2023
Du même auteur :
Les carnets du soleil, Proximité (2019,sélection Grand Prix littéraire de l’Afrique noire) Le patron des machines, Editions de midi (2020). L’idylle de Marc et Aïcha, Afrédit (2021). Ces sentinelles près du bonheur, 2021 (Prix international Immaculée Editions) Le bateau de Cuffe et Cinqué, Proximité (2022, nominé au Prix Ahmadou Kourouma)
©Editions Proximité Septembre 2023 Yaoundé-Cameroun 237 699 85 95 94/ 672 72 19 03 editionsproximite@gmail.com ISBN: 9956 429 002167
Si vous observez le centre de l’univers, il y a une certaine froideur, une forme d’indifférence. L’univers ne se soucie pas de nous. Le temps n’a pas notre temps. Voilà pourquoi nous devons éprouver de l’affection les uns pour les autres.( If you stare at the center of the universe, there is coldness there. A blankness. Ultimately, the universe doesn’t care about us. Time doesn’t care about us. That’s why we have to care about each other.)
David Levithan
Moi ma maman m’a toujours dit : «urare aharyana», «passe une nuit agitée» et je lui répondais «aharyana harare umwanzi’’… Non, ne pars pas, écoute-moi: «passe une nuit agitée», c’est beaucoup plus beau que ça en a l’air. Ça veut dire que même en dormant tu dois continuer à vivre, à rêver, à voyager! Annick Kayitesi-Jozan
La mort peut venir à tout moment. Mais on ne peut mourir qu’une fois. Capitaine Mbaye Diagne
Lean on me When you’re not strong And I’ll be your friend I’ll help you carry on... For it won’t be long Till I’m gonna need somebody to lean on  Bill Withers
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Un oracle?
Terre ambante au cœur de l’Afrique des Grands Lacs. Mille Collines. Le Rwanda était un tableau mouvant dans la splendeur verdoyante des collines. La brume persistait au sommet des collines pour leur voiler les yeux. Voulait-elle les protéger de la vision sinistre d’une tragédie à venir ? Qui la voyait venir ? Et pourtant même ceux qui disaient être perchés sur l’Everest de la voyance en ont absolument mésestimé la magnitude. Ils voyaient tout sauf un déluge de sang sur les paysages féériques et verdoyants d’Imana. Le recul du temps permettrait de voir Turatsinze comme un oracle. On n’en était pas encore là et les collines s’agrippaient à une sorte de beauté pastorale. Les villes et villages étaient aussi construits sur les collines, mais sur celles qui les surplombaient, on parvenait à voir sur leur anc les vaches des bergers, de belles vaches grassouillettes aux cornes de lyre et de croissant lunaire, à dos rectiligne, des taurillons à la robe luisante et des génisses tachetées de roux. Des vaches faisant la erté de leurs bergers et leur faisant exhaler un soupir de satisfaction. Collines en terrasses, collines amboyantes, mosaïque de paysages resplendissants, collines aux pentes fortes et crêtes aplaties. Sur certaines collines, les pentes étaient si abruptes que les voitures qui y montaient semblaient suivre une ligne qui menait au ciel. Pourtant, à la n de la Guerre Froide, la chute du mur de Berlin faisait tourner les vents politiques. Mais quelque chose aux antipodes de la froideur se préparait au Rwanda. À partir du début des années 90, les remous étaient de nouveau fréquents. Il y avait des agitations, des protestations contre la monopolisation des richesses par l’entourage présidentiel et la concentration des avantages dans les deux régions du Nord.
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La préfecture de Gisenyi et celle de Ruhengeri s’étaient arrogé près d’un tiers de 85 postes les plus importants de la République. Il y eut les revendications politiques et démocratiques, la chute du cours du café. Café cerise, café parche, café marchand, le même café sur lequel reposait une part substantielle de l’économie du pays. La production du café étant l’œuvre des centaines de milliers de petits producteurs, l’État leur en garantissait à perte le prix dans un geste préventif pour éviter une démobilisation pouvant être fatale à l’économie du pays tout entier. La faillite airait les basques des entreprises publiques. Sous les feux de critiques occidentales et de la pression populaire, le président Habyarimana fut contraint d’envisager la n d’un monopartisme de droit et d’ouvrir les chantiers d’une réforme constitutionnelle. Il disait qu’il était possible à des tendances variées de s’exprimer au sein d’un même parti alors qu’on réprimait toute velléité d’expression divergente et qu’on muselait des bouches qui ne chantaient pas les louanges du président ou du parti unique. Il fallait bien mettre un terme à cela. Il fallait élaborer un projet de charte censé apporter une réforme en profondeur du système. Ce processus de démocratisation était surtout la matérialisation d’un vœu que François Mitterrand avait formulé au sommet franco-africain de la Baule. Pour Mitterrand, il devenait impératif de lier l’aide au développement à la démocratie. Il leur dit qu’il marquerait sa sympathie pour des évolutions qui se feraient dans ce sens et que l’aide qu’il apporterait désormais auxÉtats d’Afrique tiendrait désormais compte de ces évolutions. Le Fonds monétaire international, la Banque mondiale, les bailleurs de fonds bilatéraux exerçaient des pressions économiques. Le pays fut soumis à des plans d’ajustement structurel draconiens. Le FMI exigea une réduction du décit budgétaire d’au moins sept milliards comme précondition à la poursuite des négociations liées à la mise en place d’un nouveau cadre
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macroéconomique. Lewis Preston, président de la Banque mondiale à cette époque, écrivit au Président pour s’enquérir sur les lourdes dépenses sur l’armement pendant que la famine sévissait dans le Sud et que le niveau de vie général était en baisse de qualité. La banque mondiale exigea en 1992 un accroissement des dépenses sociales de trente-trois pour cent par rapport à celles de l’année précédente. Les exigences des institutions de Bretton Woods étaient une épée de Damoclès sur la tête du président Habyarimana. Pour se conformer à ces exigences, il présenta quelques gestes de bonne volonté et prépara un décret pour réduire l’aide alimentaire aux militaires et à leurs familles.  Il déclara vouloir accorder des ressources égales aux préfectures et mettre à la disposition de ces préfectures des ressources prenant en compte leurs priorités et leurs particularités. Ce fut en réalité un jeu de ruse et de façade, car, au fond, il privilégiait le domaine militaire plus que tout autre domaine.  Le président Habyarimana estimait pourtant avoir fait sur la voie de la gouvernance mieux que son prédécesseur Grégoire Kayibanda qu’il avait écarté par un putsch. Dès son arrivée au pouvoir, il avait coné au ministère lié au développement communal la mission de réformer les procédures administratives de la commune qu’il considérait comme la base du développement. Il voulait que les innovations apportées par cette réforme permettent à chaque commune d’élaborer ses propres plans de développement.  Il estimait avoir largement contribué au développement des réseaux routiers, des télécommunications, favorisé l’accès à l’éducation et à l’eau potable. Mais que disait-il du système de quota qui limitait à l’extrême l’accès des Tutsi à certains postes ou fonctions? Ignorait-il l’existence des sociétés secrètes comme les comités de salut qui visaient à exclure les Tutsi des sphères de formation et des sociétés parapubliques ?
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 Il fallait toutefois légitimer les orientations politiques proposées par les vents du changement. Si la monarchie était anachronique, le parti unique était tout aussi désuet. Il fallait s’arrimer à l’aggiornamento. On lança aussitôt le vaste processus de réforme axé sur la mise en place d’une société démocratique et pluraliste. Le président Habyarimana, dans un processus consensuel, mit au point une commission de synthèse dans l’optique d’élaborer une charte nationale. La commission eut comme but de xer des paramètres pour effectuer par la suite une consultation nationale permettant de recueillir l’avis des Rwandais sur l’implémentation du processus démocratique. Le résultat du travail fut déposé devant l’Assemblée nationale pour un amendement de la constitution et le vote d’une loi régissant les partis. Une nouvelle constitution instaurant le multipartisme fut votée le 10 juin 1991 et la loi sur les partis politiques le 18 juin de la même année. Le processus fut secoué de loin en loin par les raids et les attaques des rebelles harcelant l’armée rwandaise. Le président expliquait sa réticence face au retour des exilés par la pression démographique, le chômage et le manque de terres agricoles. Son souhait était de les voir prendre la nationalité ougandaise. Le verre était plein selon ses mots et il n’était pas prêt à accueillir une goutte de plus. Il estimait par exemple que Paul Kagamé et Fred Rwigema, qui occupaient de hautes fonctions aux services d’intelligence et au ministère de la Défense en Ouganda, étaient déjà des citoyens ougandais, Kagamé ayant même été formé sous le parrainage de Yoweri Museveni à Fort Leavenworth. Mais les exilés voulaient rentrer à leur terre d’origine, n’était-ce pas un droit légitime? Encore que les exilés étaient confrontés au mécontentement des Ougandais de souche qui commençaient à les trouver sérieusement envahissants leur collant l’étiquette de maa tutsi.
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 La question eut un écho retentissant au parlement ougandais. Certains poussèrent la véhémence de leurs propos jusqu’à comparer ces Tutsi venus du Rwanda à des chiens accompagnant leur maître à la chasse et qui devaient purement et simplement se contenter des os même s’ils avaient tué le gibier. Ils faisaient là allusion au fait que ces exilés Tutsi avaient aidé Yoweri Museveni à prendre le pouvoir des mains de Milton Obote, mais que cela ne leur donnait pas pour autant le droit d’envahir toute l’administration. Yoweri Museveni se plia aux critiques de ces Ougandais de souche en limogeant Fred Rwigema de ses fonctions de vice-ministre de la Défense et envoya Paul Kagame aux États-Unis suivre une formation militaire. Il était prêt à écarter les réfugiés des sphères de décision quitte à appuyer leur invasion du Rwanda en mettant à leur disposition ses ressources. Face aux journalistes étrangers, Bayingana glosa sur le régime d’Habyarimana et dit que le FPR serait prêt à résoudre le problème de leur retour paisiblement. Mais que si Habyarimana voulait la guerre, ils allaient se battre jusqu’au bout. N’ayant pas reçu la réponse qu’ils attendaient, ils lancèrent l’offensive. Dès le premier octobre 1990, en n de matinée, une centaine d’hommes en treillis à bord de camions civils attaqua le poste frontalier de Kagitumba à 130 kilomètres au nord de Kigali. La compagnie d’infanterie reçut l’ordre du commandement rwandais d’aller sur Kagitumba. Un escadron AML/Jeeps mitrailleuses partit vers le nord tandis qu’en début d’après-midi une reconnaissance aérienne fut effectuée par deux hélicoptèresGazellearmés. L’armée rwandaise disposait de cinq hélicoptèresGazelledont la maintenance était assurée par des coopérants militaires. Les assaillants atteignirent la ligne Byumba-Gabiro. Le commandement hésita longtemps avant d’ouvrir le feu, le Président n’étant pas au pays à ce moment-là.
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Habyarimana était à ce moment-là en visite à Washington pour une conférence organisée par l’UNICEF sur les problèmes des enfants du tiers-monde. On le sentit pris au dépourvu. Il écourta son séjour pour rentrer prendre la situation en main. D’autres attaques suivirent. Il t appel à 1500 soldats de l’armée zaïroise pour l’aider à repousser les rebelles. Les 1500 soldats se déployèrent et l’aidèrent. Ce contingent zaïrois était l’aide de son ami Mobutu qui le lui avait envoyé saupoudré de la maximeA friend in need is a friend indeed. De leur côté, les rebelles reçurent de l’Ouganda des renforts pour mettre enœuvre une offensive de dernière chance sufsamment puissante pour percer les lignes. En vain. Ils ne baissèrent pas les bras. Mais les Zaïrois qui se montrèrent efcaces sur le terrain durent pourtant repartir à cause d’une mésentente avec l’armée rwandaise qui t des dizaines de morts. Ce repli fut aussi causé par le manque de munition et de coordination. Habyarimana lança un recrutement massif qui t exploser le camp Kanombe. Des soldats reçurent du président une aide nancière pour se trouver un domicile et libérer le camp. Un groupe d’observateurs de l’OUA se plaça de part et d’autre de la frontière entre l’Ouganda et le Rwanda, mais il se montra peu disposé à remplir sa fonction. Une attaque fut simulée par le camp Habyarimana aux environs de Kigali pour donner l’impression que les rebelles atteignaient Kigali. La fausse attaque servit de prétexte pour l’arrestation et l’incarcération d’au moins dix mille personnes désignées comme complices du FPR ou soupçonnées de collaborer avec le FPR. Cela n’éteignit pas pour autant la rébellion aux frontières. Une peuplade nomade apparentée aux Tutsi fut massacrée. Les Bagogwe. Plus de 500 maisons incendiées. Le président Habyarimana sollicita une autre aide. Il prit cette option convaincu que les rebelles recevaient
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