60
pages
Français
Ebooks
2020
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Ebook
2020
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Publié par
Date de parution
23 mars 2020
Nombre de lectures
0
EAN13
9782414440832
Langue
Français
Paul revient dans la maison familiale à l'occasion du décès de son père. Il décide de passer le week-end là, parmi les objets, les odeurs et les souvenirs. C'est alors qu'il retrouve de vieilles connaissances, et avec elles le meilleur comme le pire de son histoire.
Publié par
Date de parution
23 mars 2020
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EAN13
9782414440832
Langue
Français
Cet ouvrage a été composé par Edilivre
194, avenue du Président Wilson – 93210 Saint-Denis
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50 Mail : client@edilivre.com www.edilivre.com
ISBN ePUB : 9782414440825
Tous droits de reproduction, d'adaptation et de traduction, intégrale ou partielle réservés pour tous pays.
Vendredi
1
L 'escalier qui conduisait à l'étage craquait un peu. Petit-Paul aimait ce bruit, le soir quand, seul dans sa chambre, il épiait toutes les allées et venues de ses parents. Il savait reconnaître sa mère venant poser son oreille contre la porte pour vérifier son inactivité. Des craquements plus sonores l'avertissaient que, cette fois, c'était son père qui montait à la salle de bain. Certains dimanches – au très petit matin – il attendait, soucieux, le tapotement leste des pointes de pieds nues de Lise – sa grande sœur – rentrant du bal sous la grosse et sourde voix réprobatrice de son père. Tous ces bruits de vieil escalier, de chaussons trainants, de chuchotements, de cuillères dans les bols de tisane, de chasse d'eau, de baisers sur le front – mêlés à la douce chaleur de sa couette en duvet – lui donnaient une heureuse sérénité dans laquelle il se plaisait à baigner.
— Mais j'ai seize ans. Je sais ce que je fais.
— Et moi je sais ce que tu risques. Nous en reparlerons très vite. Va te coucher et n'espère pas passer tout le dimanche dans ta chambre.
L es portes claquaient fort une dernière fois puis le silence autorisait Petit-Paul à sortir de sous son oreiller. Ne pas entendre, vite dormir pour effacer les cris de sa sœur, les menaces du père.
C e soir, dans sa chambre transformée en bureau, allongé sur le lit d'appoint, Paul – Monsieur Paul – tend l'oreille pour retrouver les bruits de son enfance. La maison vide lui répond par son silence.
— Voilà, c'est fini, dit-il, à haute voix devant la glace. Les parents sont partis pour toujours. T'es orphelin, mon gars. Quarante-quatre ans, peut-être mais orphelin tout de même. Aujourd'hui, Paul Descombes, le respecté patron de l'agence de presse « NIGHT AND DAY NEWS » est un petit garçon perdu dans sa grande maison où tout est, maintenant, sans vie, figé, inutile et paradoxalement plus précieux que jamais. Les vibrations de son téléphone dans la poche de sa veste le font se lever brutalement comme réveillé en sursaut. The show must go on, pense-t-il en soupirant.
— Allo, oui, non, je ne suis pas à Paris. Je suis en province. Je viens d'enterrer mon père. Non, il y a un mois, quand j'étais bloqué à New York, c'était ma mère. Ben oui, à un mois d'intervalle. Depuis qu'il la savait perdue, il disait qu'il ne lui survivrait pas. Il a tenu parole. Son état s'est dégradé très vite et il est parti lui aussi. Quoi ? Non, moi ça va, un peu secoué mais ça va aller. Le travail va me faire digérer. Je rentre lundi. Je te verrai à neuf heures, salut. Oui, merci.
A la fin de la cérémonie, Lise et lui avaient satisfait à l'interminable séance des condoléances.
— j'ai l'impression d'avoir embrassé tout le village, se plaignait-elle. Je n'en ai pas reconnu la moitié et qui est cette blondasse qui n'arrêtait pas de te caresser la joue ?
— Ben, c'est Juju.
— Juju ? la petite boulotte qui a couru après toi depuis la sixième ? La vache, tu l'as échappé belle ! dit-elle en pouffant dans son mouchoir pour dissimuler son rire. Paul, étonné, la regarda puis le fou rire l'emporta à son tour et ne le quitta qu'en arrivant devant la maison.
— Tu ne rentres pas ? dit-il à Lise qui se dirigeait vers sa voiture.
— Non, il faut que j'y aille. J'ai trois heures de route. Je ne suis pas libre comme toi, moi, j'ai une petite famille à nourrir, moi.
— Tu aurais dû les amener
— Tu parles, mon cher mari avait bien trop d'obligations et les jumeaux des cours trop importants. Ils ont fait l'effort de venir pour maman ; ça doit leur paraître suffisant. Que de bonnes raisons, comme tu vois.
— Je vois surtout que nos parents ne laissent pas que de bons souvenirs et de profonds regrets.
— Ça t'étonne ?
— Non, bien sûr, dit-il, la tête basse. Je ne pensais pas que c'était si profond.
— Oh, ben, pour toi, ce n'était pas trop dur vu que tu étais le garçon à son papa. Bon, j'y vais mais nous allons nous revoir bientôt pour nous débarrasser de tout ça, soupira Lise en regardant la maison. Tu vas rester là ce soir, toi ?
— Oui, je ne rentre à Paris que lundi.
— Qu'est-ce que tu vas foutre seul, tout le week-end, dans cette baraque ? Appelle Juju, elle te tiendra compagnie, ricana-t-elle.
— Allez, casse-toi au lieu de dire des conneries.
— Bises, frérot.
— Bises sœurette.
R ien ni personne ne pressait vraiment Lise à faire, ce soir-là, ces trois heures de route sinon le besoin de se remettre à la bonne distance de la maison familiale. Fuir, une fois encore pour se protéger des fantômes.
2
E n regardant l'heure sur son téléphone, vibrant de tous les rendez-vous ajournés, Paul se dit qu'il est vraiment trop tôt pour dormir et qu'il est surtout urgent de calmer une fringale des plus insistante. Rien n'a bougé dans la cave depuis des années. Il retrouve, là, cette même odeur inqualifiable d'humidité poussiéreuse, de vieux bouchons moisis et les immenses toiles d'araignée tendues des étagères au plafond. Le vieux vaisselier de mamie Jeanne est toujours là, rempli par trois ans de conserves...