124
pages
Français
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2019
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Ebook
2019
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Publié par
Date de parution
02 février 2019
Nombre de lectures
56
EAN13
9782895976981
Langue
Français
Poids de l'ouvrage
2 Mo
Publié par
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02 février 2019
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56
EAN13
9782895976981
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Français
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LA SULTANE DÉVOILÉE
DU MÊME AUTEUR
Romans
Les Chemins de la liberté , tome 2 : L’Ultime Voyage , Chicoutimi, Éditions JCL, 2014. Prix France-Acadie 2014.
Les Chemins de la liberté , tome 1 : Marie et Fabien , roman, Chicoutimi, Éditions JCL, 2013. Prix France-Acadie 2014.
Le Berger du soleil , récit, Ottawa, Centre franco-ontarien de ressources pédagogiques, 2009.
Frères ennemis , Montréal, VLB Éditeur, 2009.
Alexandre et les trafiquants du désert , Ottawa, Éditions L’Interligne, 2007.
L’Agonie des dieux , Ottawa, Éditions L’Interligne, 2005. Prix Trillium 2005. Prix LeDroit 2005.
Ibn Khaldoun – L’honneur et la disgrâce , roman, Ottawa, Éditions L’Interligne, 2002. Prix de la Ville d’Ottawa 2003.
Amina et le mamelouk blanc , Ottawa, Éditions L’Interligne, 1998 ; réimpression en 1999.
Le désert et le loup , récit, Sherbrooke, Éditions Naaman, 1985.
Essais
Les chrétiens d’Orient, Le courage et la foi , Montréal et Paris, Médiaspaul, 2015.
Canada et bilinguisme (en collaboration), Rennes (France), Presses universitaires de Rennes, 1997.
Voltaire et Paris , « The Voltaire Foundation », Oxford University Press, Oxford (England), 1981.
Jean-Jacques Rousseau et la Société du XVIII e siècle , (en collaboration), Ottawa, Éditions de l’Université d’Ottawa, 1981.
Études Rousseau Trent (en collaboration), Ottawa, Éditions de l’Université d’Ottawa, 1980.
Jean Mohsen F AHMY
La sultane dévoilée
ROMAN
Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives Canada
Fahmy, Jean Mohsen, 1942-, auteur La sultane dévoilée : roman / Jean Mohsen Fahmy.
(Voix narratives) Publié en formats imprimé(s) et électronique(s). ISBN 978-2-89597-664-6 (couverture souple). — ISBN 978-2-89597-697-4 (PDF). — ISBN 978-2-89597-698-1 (EPUB)
I. Titre. II. Collection : Voix narratives
PS8561.A377S85 2019 C843’.54 C2018-906284-3 C2018-906285-1
Nous remercions le Gouvernement du Canada, le Conseil des arts du Canada, le Conseil des arts de l’Ontario et la Ville d’Ottawa pour leur appui à nos activités d’édition.
Les Éditions David 335-B, rue Cumberland, Ottawa (Ontario) K1N 7J3 Téléphone : 613-695-3339 | Télécopieur : 613-695-3334 info@editionsdavid.com | www.editionsdavid.com
Tous droits réservés. Imprimé au Canada. Dépôt légal (Québec et Ottawa), 1 er trimestre 2019
Aux sultanes de ma vie, Adèle, Caroline, Miriam, Jennifer et Sarah, avec grande affection.
1
H ASSAN SOMNOLAIT sans arrêt. Il luttait de toutes ses forces pour garder les yeux ouverts, pour ne pas s’étendre sur le banc de bois afin de se reposer un peu. Mais il savait fort bien que s’il se laissait aller, ne fût-ce que quelques minutes, il risquait fort de s’endormir pour de bon.
L’atabay Ali pouvait venir n’importe quand, à l’improviste, et s’il le surprenait en train de dormir… Hassan frémissait à l’idée du sort qui l’attendrait alors.
La cruauté de l’atabay Ali était légendaire dans toute l’armée. Il était toujours souriant et se montrait quelquefois affable avec les simples soldats. Mais l’on devinait que son sourire pouvait devenir soudain carnassier.
Pour Hassan, l’atabay Ali évoquait un chat. Son supérieur paraissait nonchalant, mais sous ses dehors inoffensifs, on le sentait toujours aux aguets, et tant pis pour la victime qui tomberait sous sa patte…
Hassan ne pouvait oublier le jeune Kamel. C’était le fils d’un paysan de la Vallée. Il avait voulu échapper au sort de son père, courbé sur ses champs à longueur de journée et traqué par les agents du fisc qui lui prenaient l’essentiel de ses récoltes.
Kamel pensait avoir trouvé dans l’armée une échappatoire. Il s’était engagé et, dès le début, avait attiré l’attention de l’atabay Ali. Celui-ci lui avait souri d’emblée et avait obtenu du Kapitan que le jeune paysan soit muté dans son peloton.
Depuis lors, l’atabay s’était montré d’une grande générosité envers l’adolescent. Il lui donnait les tours de garde les plus faciles, le félicitait devant ses camarades et lui réservait les meilleurs morceaux de la viande que leur livraient, sous la menace des cimeterres, les habitants du bourg.
Certains avaient même remarqué une lueur spéciale dans les yeux de l’atabay quand il s’approchait de Kamel, un mélange de sollicitude et de… comment dire ? d’avidité. Et quand l’atabay avait commencé à inviter le jeune homme sous sa tente, en fin de soirée, pour discuter des mesures de sécurité pendant son tour de garde, les anciens militaires avaient ricané.
Kamel était devenu la risée de tout le peloton. Quand l’atabay s’éloignait, on abreuvait le jeune soldat de quolibets, les plus forts le bousculaient, les autres mimaient devant lui des pauses lascives et obscènes. Mais dès que le chef du peloton paraissait au loin, tous se dispersaient sur le terrain d’entraînement ou allaient affûter leurs cimeterres. Et l’atabay s’approchait alors de son pas de félin de Kamel, la même lueur de convoitise dans les yeux, cet éclair qui figeait la jeune recrue sur place.
Et un jour, on commença à constater un changement subtil et inattendu dans le comportement d’Ali. L’atabay ne tournait plus comme un vautour autour de sa proie. Il négligeait Kamel, lui donnait des tours de garde de nuit, les plus épuisants, les plus difficiles.
Les anciens du peloton notèrent que ce changement coïncidait avec l’arrivée au camp d’une autre jeune recrue, un autre paysan adolescent, du nom de Mansour. Mansour avait des yeux de velours et de longs cils. L’atabay l’avait immédiatement pris sous sa coupe et, pendant que Kamel montait la garde la nuit dans un fortin, Ali convoquait Mansour sous sa tente pour lui expliquer, disait-il, les rudiments du métier militaire.
Kamel se rebiffa-t-il ? On ne le sut jamais avec précision. Toujours est-il que la bénigne indifférence dans laquelle le tenait l’atabay se mua bientôt en animosité. Il le houspillait sans cesse, l’insultait devant les autres militaires, osa même un jour le traiter d’efféminé, l’injure suprême qui le ravalait au rang des esclaves les plus méprisés.
Kamel, à son tour, commença à se moquer du jeune et beau Mansour. Cette audace devait lui coûter cher.
Un jour, l’atabay le consigna à un poste de garde éloigné du campement, dans un endroit isolé. Puis Ali disparut pendant quelques heures. Quand il revint au camp, il traînait Kamel derrière lui, attaché par une corde au cou, les poignets enserrés dans une solide lanière de cuir.
L’atabay convoqua le peloton. Il affirma que Kamel s’était endormi pendant sa garde et qu’il l’avait surpris. Chaque fois que le jeune homme essayait de protester, le commandant lui assénait sur la tête ou sur le dos un coup du plat de son cimeterre et le jeune homme se tordait de douleur.
L’atabay annonça la sentence qu’il infligeait au militaire et tous ces hommes, aguerris depuis longtemps, frémirent.
On amena le jeune homme sous une poutre, on lui lia les deux mains avec une corde qu’on attacha à la poutre et on tira sur la corde. Le jeune homme se trouva brusquement soulevé de terre ; il se dressa sur ses pieds, puis sur la pointe de ses orteils, les bras étirés au maximum par le poids de son corps qui le tirait vers le bas.
L’atabay lui ordonna alors de réciter des versets du Livre saint. Le jeune homme commença à réciter le texte sacré en le hachurant au rythme de son souffle court. Puis, quand ses poumons, écrasés par le poids de son corps, l’obligeaient à s’interrompre et qu’il ouvrait grand la bouche pour aspirer un peu d’air, ou que ses jambes se tendaient dans un effort frénétique pour lui permettre de toucher terre, l’officier lui assénait de terribles coups sur le dos, et même sur la tête.
Au bout d’une heure, Kamel s’évanouit. Il ne réagissait même plus aux coups qu’il recevait et, quand une bave légère commença à lui couler des lèvres, l’atabay ordonna qu’on le détachât. Le jeune homme s’écroula, inconscient, sur le sol. Depuis ce jour, il se fit petit devant son commandant et tâcha de se rendre invisible.
Comme tous les autres membres du peloton, Hassan avait assisté au supplice infligé à Kamel. Il était terrorisé à l’idée d’attirer l’attention de l’atabay, ou de lui déplaire.
C’est pourquoi, ce jour-là, il luttait de toutes ses forces contre la somnolence qui s’emparait de lui.
C’est que la garde était particulièrement fastidieuse. Cela faisait plusieurs mois que son bataillon était posté à cette extrémité du pays, à quelques lieues de Damiette, devant la vaste mer. Les soldats ne savaient pas pourquoi on les avait envoyés dans ce coin perdu, loin de la grande ville, la capitale aux mille plaisirs.
Le calme régnait dans le pays depuis de nombreuses années. Le sultan — que Dieu veille sur lui ! — manifestait sa bonté à tous ses sujets et la prière était dite en son nom dans toutes les mosquées du pays. Et le désert qui s’étendait à l’est, du côté du Sinaï, écrasé sous le soleil, était calme. Aucun espion n’était venu annoncer un raid des bédouins du désert ou une avancée des guerriers infidèles qui occupaient encore certains districts autour de Jérusalem, la troisième Ville sainte ! Alors, pourquoi le bataillon se morfondait-il ici ?
Des rumeurs couraient cependant dans les rangs de l’armée. Les Infidèles pouvaient venir de partout. Ils pouvaient, certes, traverser le Sinaï, mais on les verrait venir, on prendrait les mesures de défense qui s’imposeraient. Ils pouvaient aussi venir de l’ouest, mais il leur faudrait alors traverser un désert plus vaste encore que le Sinaï. Tout cela était inconcevable.
Alors ? Alors, le seul autre endroit d’où les Francs, ces Infidèles qui vivaient de l’autre côté de la Mer des Syriens, pouvaient venir pour s’emparer du pays du Nil, c’était bien de la mer. Il était vrai que la flotte du sultan patrouillait sans cesse au large d’Alexandrie et du vaste Delta, mais les Infidèles pouvaient toujours la déjouer et venir attaquer les adorateurs du seul vrai Dieu.
C’était ce que certains chuchotaient dans le camp. Hassan n’en croyait pas un mot. Il n’avait jamais vu de sa vie un seul Fr