Les Morts dans l'âme , livre ebook

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2012

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1945. Anne, ex-matricule 57343, revient à Paris. Derrière elle, de longs mois passés dans l’enfer concentrationnaire de Ravensbrück. Timidement, comme si elle n’appartenait plus au monde qui fut le sien, la jeune femme retrouve ses proches: ses grands-parents, une sœur éclatante de jeunesse, un père remarié… Comme étrangère, elle découvre aussi une France libérée tiraillée par de violentes tensions, la vérité se faisant peu à peu jour concernant le degré de servilité et d’opportunisme de chacun… Une jeune femme qui demeure presque insensible au spectacle qui se déroule devant elle, toujours hébétée par son expérience, incapable de la transmettre à autrui… Le silence est le maître mot de ce récit. Et plus précisément celui d’Anne qui écoute les autres dire leur guerre tout en restant incapable d’évoquer sa propre tragédie, mutique, presque muselée… En effet, ce que touche le texte de P. Auverny Bennetot, c’est à la fois la culpabilité des survivants et la volonté inconsciente de ceux qui n’ont pas connu les camps de savoir cette réalité, quitte à détourner le cœur du dialogue. Une tension qui fait que la parole n’est jamais véritablement du côté où il le faudrait, c’est-à-dire du côté des témoins de l’horreur, et qui fait de ce récit celui d’un accouchement toujours différé.
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Publié par

Date de parution

07 juin 2012

Nombre de lectures

44

EAN13

9782748386134

Langue

Français

Poids de l'ouvrage

1 Mo

Les Morts dans l’âme
Philippe Auverny Bennetot Les Morts dans l’âme
Publibook
Retrouvez notre catalogue sur le site des Éditions Publibook : http://www.publibook.com Ce texte publié par les Éditions Publibook est protégé par les lois et traités internationaux relatifs aux droits d’auteur. Son impression sur papier est strictement réservée à l’acquéreur et limitée à son usage personnel. Toute autre reproduction ou copie, par quelque procédé que ce soit, constituerait une contrefaçon et serait passible des sanctions prévues par les textes susvisés et notamment le Code français de la propriété intellectuelle et les conventions internationales en vigueur sur la protection des droits d’auteur. Éditions Publibook 14, rue des Volontaires 75015 PARIS – France Tél. : +33 (0)1 53 69 65 55 IDDN.FR.010.0117021.000.R.P.2011.030.31500 Cet ouvrage a fait l’objet d’une première publication aux Éditions Publibook en 2012
Vendredi 4 mai 1945
Le lourd véhicule, parti de l’aérodrome du Bourget, s’arrêta devant la gare d’Austerlitz pour laisser descendre des prisonniers de guerre chargés de bagages, puis devant la gare d’Orsay pour déposer des déportés squelettiques, les mains vides aux gestes infiniment lents, enfin, il s’immobilisa boulevard Raspail devant l’ancien hôtelLu-tetia. Des épaisses vitres du véhicule s’échappait une Marseillaise assourdie, qu’entonnaient avec conviction une dizaine de survivants. J’avais pu bénéficier d’un avion de l’armée britannique, qui, après avoir acheminé des parachutistes et du matériel sur les fronts allemands, repartait vide. Compte tenu du poids très faible d’un déporté, il pouvait en transporter plusieurs dizaines entassées sur des matelas. Mon état de santé me permettait de voyager par chemin de fer mais une voisine de lit à l’hôpital mourut au moment du départ en ambulance pour un aérodrome de Hambourg et un méde-cin me fit signe de prendre sa place. Après deux heures de vol, un soldat hurla pour couvrir le bruit des moteurs : « France vous maintenant ». Pour beaucoup, cela marqua le début du retour à la vraie vie et le commencement d’une existence de rescapé d’un camp de concentration. Une foule compacte gênait la descente de l’autocar. Dressés sur la pointe des pieds, des dizaines d’adultes et quelques enfants cherchaient à reconnaître un ou des visa-ges familiers, beaucoup d’entre eux passaient leurs journées à faire le va-et-vient entre leLutetia et les gares
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du Nord et d’Orsay. Les témoins, stupéfaits à la vue de ces têtes tondues, d’un gris verdâtre, aux regards vides, affi-chaient une commisération gênée mais sans s’intéresser à la foule des déportés, chacun ne cherchant que des visages connus. Les structures d’accueil dans cet ancien palace, calquées sur celles destinées aux prisonniers de guerre, n’étaient pas adaptées à ce peuple de bagnards épuisés dont les silhouettes avaient quelque chose de vieux, d’irrémédiablement usé. J’entendis un homme âgé squelet-tique, la tête couverte de croûtes, marmonner que la France était toujours le pays de la pagaille. Quelqu’un chercha à lui expliquer que jusqu’à maintenant la priorité était de gagner la guerre, non de rapatrier les deux millions de Français retenus en Allemagne, et l’avancée des trou-pes alliées ne devait pas être gênée par l’encombrement des routes allemandes. De plus, ne prévoyant pas un ef-fondrement si rapide des nazis, on s’attendait à des libérations progressives alors que certains jours deux mille déportés passaient la porte de l’ancien palace. Mais pour lui la France, craignant les déportés en raison du typhus, privilégiait les prisonniers de guerre. Je montais lentement les marches du perron pendant qu’un scout de France – tout juste vacciné contre le ty-phus, car l’un d’eux en était mort la veille – pulvérisait un produit chimique dans l’encolure, les emmanchures et au bas de ma robe. J’aurais tellement aimé que Françoise, Mathilde, Clara et tant d’autres soient à mes côtés mais beaucoup avaient disparu, avant d’avoir l’âge de finir leur vie, au-dessus des cheminées des fours crématoires et quelques autres attendaient leur évacuation dans l’enceinte du camp ou dans des hôpitaux de fortune. Une auxiliaire de l’armée m’invita à prévenir ma fa-mille et m’aida à rédiger un télégramme envoyé au domicile et au bureau de mon père : « Suis auLutetia –
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