Rondo Capriccioso , livre ebook

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Isabelle Huc-Vasseur Rondo Capriccioso   Roman   Prix du jury du Prix du roman 2012     Éditions Les Nouveaux Auteurs   16, rue d’Orchampt 75018 Paris www.lesnouveauxauteurs.com   ÉDITIONS PRISMA www.editions-prisma.com   13, rue Henri-Barbusse 92624 GennevilliersCedex www.prismamedia.com   Copyright © 2012 Editions Les Nouveaux Auteurs- Prisma Média Tous droits réservés ISBN : 978–2–8104–14499       Aux enfants de la guerre. À mes grands-parents. 1914 CHAPITRE PREMIER PROLOGUE BELLE ÉPOQUE (Wagner – Chœur des fiançailles) Tout tourbillonne et mon cœur, comprimé par un corset trop étroit,bat la chamade. Un sang bouillonnant martèle mes tempes comme de puissantscoups de masse. J’en suis presque étourdie. Un rire nerveuxs’échappe de mes lèvres serrées, qui fredonnent avec légèretéla chanson du bonheur. Les doigts tendus devant mon visage, j’admirecette jolie bague, symbole de ma chance et de cette nouvelle vie,ce nouveau sentier vers l’inconnu que sera le mariage. Je suisFiancée. Quel joli mot vraiment ! Je me le répète en tournoyant. Ilcommence par la même lettre que son nom, Francis Faugère. Julie Faugère,Faugère Julie, ça sonne bien, et je suis la plus heureuse, en ce beaujour de juin 1914. Toute la famille est réunie à la Grangette,les Faugère et les Maréchal.
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Date de parution

16 juillet 2015

Nombre de lectures

25

EAN13

9782810414499

Langue

Français

Isabelle Huc-Vasseur
Rondo Capriccioso
 
Roman
 
Prix du jury
du Prix du roman

2012
 
 
Éditions Les Nouveaux Auteurs
 
16, rue d’Orchampt 75018 Paris
www.lesnouveauxauteurs.com
 
ÉDITIONS PRISMA
www.editions-prisma.com
 
13, rue Henri-Barbusse 92624 GennevilliersCedex
www.prismamedia.com
 
Copyright © 2012 Editions Les Nouveaux Auteurs- Prisma Média
Tous droits réservés
ISBN : 978–2–8104–14499
 

 

 

Aux enfants de la guerre.
À mes grands-parents.
1914 CHAPITRE PREMIER
PROLOGUE BELLE ÉPOQUE
(Wagner – Chœur des fiançailles)

Tout tourbillonne et mon cœur, comprimé par un corset trop étroit,bat la chamade. Un sang bouillonnant martèle mes tempes comme de puissantscoups de masse. J’en suis presque étourdie. Un rire nerveuxs’échappe de mes lèvres serrées, qui fredonnent avec légèretéla chanson du bonheur. Les doigts tendus devant mon visage, j’admirecette jolie bague, symbole de ma chance et de cette nouvelle vie,ce nouveau sentier vers l’inconnu que sera le mariage. Je suisFiancée. Quel joli mot vraiment ! Je me le répète en tournoyant. Ilcommence par la même lettre que son nom, Francis Faugère. Julie Faugère,Faugère Julie, ça sonne bien, et je suis la plus heureuse, en ce beaujour de juin 1914. Toute la famille est réunie à la Grangette,les Faugère et les Maréchal. Après la petite cérémonie à Misère, ledomaine où nous vivons, nous sommes venus ici, entrela plage et les vignes de la Cossette, dans ce cabanon entouré decanisses, où nous nous réunissons traditionnellement l’été pourles déjeuners dominicaux, ainsi que pour les repas de famille desgrandes occasions. J’aime cet endroit malgré sa rusticité. Ilporte en lui tant de souvenirs de moments heureux de l’enfance.Il est à lui seul l’âme familiale, l’album de notre petitehistoire. J’aime à penser qu’il nous survivra, et queles générations futures y passeront également de doux moments de communionet de repos. Mais pourquoi penser à plus tard quand le présent semontre si riche en joie ? Je sors de ma cachette, derrière les peupliers,et j’observe de loin Francis assis à côté de ma place vide.Sa main pend négligemment sur le dossier de ma chaise. Ses jambessolides, étendues devant lui sous la table, se croisent délicatementau niveau des chevilles. Il discute avec mon père. Je ne sais de quoiils parlent, mais leurs regards graves semblent perdus dans les mêmesperspectives, et contrastent avec la grâce paisible du moment. À côtéde mon père, mon oncle Gaston, l’accordeur de pianos, fume paisiblementen les écoutant. C’est le cousin germain de ma mère. Elle ad’ailleurs pris soin de l’asseoir loin de sa place afinde l’éviter le plus possible, prétextant de craindre l’odeurdu tabac. Ces deux-là se chamaillent depuis leur plus jeune âge etne sont d’accord sur rien. D’après Gaston, elle n’estqu’une « testasse obtuse », alors qu’il n’estpour elle qu’« une cloche » qui vit au jour le jourcomme une cigale. À mille lieues de ces querelles familiales, François,mon frère aîné, et Valentine, ma meilleure amie, se murmurent en riantdes secrets d’amoureux, sans prêter la moindre attention auxregards inquisiteurs de leurs mères endimanchées, qui ne sont pourl’instant disposées à céder leur progéniture respective, nià une petite intellectuelle d’institutrice de Montpellier, nià un fils de vigneron mal dégrossi et pauvre de surcroît.Guillaume, mon petit frère de huit ans, joue avec son ami Jules, dedeux ans son aîné. Ils vont à l’école ensemble dans la classede Mlle Calmette, la directrice, qui, me semble-t-il, instruitla population du village depuis sa fondation dans la Grèce antique.Sèche et noueuse comme un vieux cep de vigne rabougris, elle régnaiten maître absolu sur notre savoir, jusqu’à ce que son despotiquedestin ne croise le chemin caillouteux de Jules. Jules est sur laroute droite de mademoiselle Calmette, la racine traîtresse qui vousjette à terre sans ménagement. Mon frère, plus fin et subtil, physiquementet intellectuellement, se délecte de cette lente descente aux enfers,tant souhaitée par tous. Son amitié pour Jules s’en voit chaquejour renforcée. Jules, cette petite force de la nature, est notrevengeur, tout le village suit avec une hilarité à peine dissimuléeles déboires de cette terrifiante harpie.
Pourquoi penser à mademoiselle Calmette ? Parce que je prends lemême chemin qu’elle. Je suis institutrice dans une école publiqued’Agde depuis le mois d’octobre dernier. C’est àl’École normale de Montpellier, à cinquante kilomètres environde mon village, que j’ai rencontré Valentine Faugère. Elle estdevenue ma grande amie, après m’avoir été présentée par sonfrère Francis, lui-même maître d’école dans notre village. EntreFrancis et moi, ce ne fut pas le coup de foudre. Francis n’étaitpas à l’image du prince de mes rêves. De plus, il était plusâgé que moi de huit ans et cela m’intimidait autant que sa statureimposante…
 
Francis… J’ai tout à coup envie de pleurer. Mes yeux troublésse posent à nouveau sur la main où luit la bague d’or blancsurmontée d’un petit diamant translucide qui scelle nos destins.Un rire un peu forcé me tire de mes pensées, celuide ma future belle-mère, assise droite comme un piquet au bord desa chaise. Elle vient de poser son verre en discutant avec mon frèreLouis, qui tente, non sans malice, de la resservir. À sa droite, leverre tendu vers le goulot de la bouteille, se tient Léon Faugère,mon futur beau-père, un peu éméché, le faux col de travers et un sourirebéat collé sous sa petite moustache impeccablement taillée. Ses yeuxsombres pétillent de bonheur et recherchent désespérément la complicitéde ceux de sa femme. Mais elle est trop occupée à guetter les mouvementsde Louis, qui la taquine depuis un bon moment pour détourner son attention,et s’amuse de ses manières un peu collet monté. Attirée parles rires, ma mère esseulée interrompt son inutile surveillance, rapprochesa chaise pour se mêler avec curiosité à la conversation. Je regagnema place. Je pose la main sur la cuisse ferme et musclée de Francis,qui entoure mes épaules de ses bras réconfortants. Louis me proposeun fond de vin de noix. J’accepte et goûte le breuvage du boutdes lèvres. Mon père verse quelques gouttes de rhum dans sa tasseà café, puis y trempe un sucre qu’il laisse fondre sur sa langueavec délectation. Francis finit son café et se tourne vers moi ensouriant. Je lui montre ma bague qu’il examine avec minutie,en malaxant mon annulaire sous le regard réprobateur de sa mère, dontl’air guindé nous agace un peu. Rien, de toute façon, ne viendragâcher la fête, pas même les rumeurs de guerre qui se propagent commeune traînée de poudre funeste. Éclats de rire et éclats de voix résonnentdans l’air chaud et la brise du front de mer avant de s’envolervers les cirrus, qui nous observent d’un œil bienveillant auxportes du ciel, au-dessus de nos têtes légèrement enivrées.
Seul Riquet, l’épagneul de François, ne semble pas partagernotre allégresse. Allongé aux pieds de son maître, la gueule posée sur sa patte droite, il nous observe d’unair accablé en laissant échapper de temps à autre un soupir désespéréauquel mon frère répond en riant par une caresse appuyée sur la tête.
— Qu’est-ce qu’il te prend, mon vieux Riquet,tu deviens neurasthénique ?
— Il craint que la guerre n’éclate pendant la chasse !lance Guillaume, en le faisant s’allonger sur le dos pour luicaresser le ventre.
— Regarde ! Prince à l’air tout ramolli aussi… dis-jeen me penchant sous la table, pour jeter un coup d’œil au chiende mon père. Il est possible que ce soit tout simplement la chaleur.Il fait particulièrement lourd aujourd’hui.
 
Le sang me monte à la tête, et je me redresse sans attendre, larespiration coupée par ma robe trop serrée, après ce repas si copieux.
— C’est dommage que votre sœur n’ait pas pu sejoindre à nous, rajoute madame Faugère en portant son verre à seslèvres fines. J’aurais été charmée de la rencontrer. Elle habiteParis, si j’ai bien compris, et son mari est pharmacien ?
— Oui, en effet… Mais c’est un long voyage pour unrepas de fiançailles, elle fera le déplacement pour le mariage.
— Je comprends, nous les commerçants, nous sommes un peuesclaves de notre boutique… Nous pouvons rarement nous absenter. C’estun travail exigeant, voyez-vous. Mais bon, il faut bien gagner savie…
— Je compatis, rétorque ma mère agacée, c’est vraique nous autres, paysans, n’avons qu’à regarder la naturefaire son travail, et de temps en temps, intervenir pour couper quelquesgrappes, pour justifier ainsi la maigre rétributionque nous offre généreusement le patron, pour nos longues périodesd’oisiveté…
 
Je ne peux m’empêcher de pouffer. Un tantinet vexée, ma belle-mèrenous tourne le dos pour s’adresser à Louis qui rêvassait ense balançant sur sa chaise. Il sursaute et manque de tomber à la renverse.
— Je vous soupçonne de vouloir une autre petite goutte devin, je le lis dans vos yeux, la taquine-t-il en lui lançant un regardmutin.
— Vous voulez me saouler, jeune malappris ! Je vois clairdans votre jeu ! s’esclaffe-t-elle joyeusement, flattée parl’attention que lui porte mon frère, si jeune et charmant, etqui m’intrigue un peu, je dois l’avouer.
— Je veux juste que vous vous amusiez, je vous sens un peutendue. Vous savez, François est un bon gars, il ne faut pas vousinquiéter comme ça… Il n’est pas très riche, certes, et Valentinevous a déjà déçue en embrassant la carrière d’institutrice…Mais vous avez du pouvoir, de l’argent… Vous pourrez les aiderà bien vivre…
— Vous êtes bien insolent d’oser me parler de façonsi directe… J’aurais aimé qu’au moins un de mes enfantsreprenne le commerce, mais ils ont tous les deux choisi une voie bienpeu glorieuse et fort mal payée… Ils vivront donc au-dessous de leurcondition… Aucune mère ne peut se réjouir de voir ses enfants fairede mauvais choix…
— Ce siècle qui commence sera sans aucun doute celui de laliberté, vos enfants sont des pionniers, des précurseurs qui ont choiside vivre en suivant leur cœur, leurs aspirations…
— Vous confon

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