L'homme du Carlton , livre ebook

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Edgar Wallace (1875-1932)



"Cet homme se nommait Harry Stone (on l’appelait aussi Harry le Larbin) ; il était détective.


Du moins il le fut jusqu’au jour où l’on s’aperçut qu’il ne l’était pas. La chose arriva trois mois environ après son entrée à l’état-major de la Police de Rhodésie.


Il eût été facile de le poursuivre, mais à cette époque la Police ne désirait pas particulièrement étaler aux yeux de tous les malversations de ses membres. Et c’est pourquoi nul ne se donna la peine de le rappeler lorsqu’il s’éclipsa, une nuit, à destination de Cape Town.


Harry se dirigeait vers le Sud, pourvu de trois cents livres gagnées de façon assez singulière. Il possédait aussi l’espoir de rencontrer Lew Daney, un artiste de grande classe auquel la chance ne souriait malheureusement pas toujours. Mais Lew avait déjà quitté depuis longtemps Cape Town lorsque Harry y parvint et il était en train d’organiser en d’autres lieux une série d’opérations beaucoup plus pittoresques et infiniment mieux conçues que sa précédente tentative contre la Banque Nationale de Johannesburg.


Aussi Harry Stone revint-il en Rhodésie en empruntant la route de Beira et en traversant le Massi Kassi jusqu’à Salisbury. Il jouait de déveine. Dès son arrivée dans cette ville, le capitaine Timothy Jordan, chef de l’état-major de la Police rhodésienne, l’honora d’une visite particulière à son hôtel.


« Vous vous êtes inscrit sous le nom de Harrison, lui dit-il, mais vous vous appelez Stone. À propos, comment va notre ami Lew Daney ?


– Je ne comprends pas ce que vous voulez dire, » répondit Harry le Larbin."



Roman policier.


Tim Jordan a démissionné de son poste de chef de la police rhodésienne. Il part à Londres et s'installe au "Carlton". Mais il n'est pas le seul à venir dans la capitale anglaise... Deux criminels, Harry Stone et Lew Daney, s'y retrouvent et font vite parler d'eux... Tim Jordan les a à l'oeil...

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Publié par

Date de parution

18 avril 2023

Nombre de lectures

0

EAN13

9782384422180

Langue

Français

L’homme du Carlton


Edgar Wallace

Traduction non signée


Avril 2023
Stéphane le Mat
La Gibecière à Mots
ISBN : 978-2-38442-218-0
Couverture : pastel de STEPH'
lagibeciereamots@sfr.fr
N° 1216
I

Cet homme se nommait Harry Stone (on l’appelait aussi Harry le Larbin) ; il était détective.
Du moins il le fut jusqu’au jour où l’on s’aperçut qu’il ne l’était pas. La chose arriva trois mois environ après son entrée à l’état-major de la Police de Rhodésie.
Il eût été facile de le poursuivre, mais à cette époque la Police ne désirait pas particulièrement étaler aux yeux de tous les malversations de ses membres. Et c’est pourquoi nul ne se donna la peine de le rappeler lorsqu’il s’éclipsa, une nuit, à destination de Cape Town.
Harry se dirigeait vers le Sud, pourvu de trois cents livres gagnées de façon assez singulière. Il possédait aussi l’espoir de rencontrer Lew Daney, un artiste de grande classe auquel la chance ne souriait malheureusement pas toujours. Mais Lew avait déjà quitté depuis longtemps Cape Town lorsque Harry y parvint et il était en train d’organiser en d’autres lieux une série d’opérations beaucoup plus pittoresques et infiniment mieux conçues que sa précédente tentative contre la Banque Nationale de Johannesburg.
Aussi Harry Stone revint-il en Rhodésie en empruntant la route de Beira et en traversant le Massi Kassi jusqu’à Salisbury. Il jouait de déveine. Dès son arrivée dans cette ville, le capitaine Timothy Jordan, chef de l’état-major de la Police rhodésienne, l’honora d’une visite particulière à son hôtel.
« Vous vous êtes inscrit sous le nom de Harrison, lui dit-il, mais vous vous appelez Stone. À propos, comment va notre ami Lew Daney ?
– Je ne comprends pas ce que vous voulez dire, » répondit Harry le Larbin.
« Tiger » Tim Jordan sourit.
« À votre aise… Le train pour la frontière portugaise part dans deux heures. Si vous le preniez ? »
Harry, très vexé, n’insista pas. Il n’avait encore jamais rencontré Tiger Tim Jordan, bien qu’il eût entendu longuement parler de ce jeune homme diabolique et sût par cœur la plupart des légendes qui couraient à son sujet.
Tiger, relativement riche, pouvait se permettre d’être consciencieux. Il étudiait très soigneusement les photographies des indésirables qui lui étaient communiquées et se faisait un point d’honneur d’aller à la gare surveiller l’arrivée et le départ de tous les trains. Presque tous les convois contenaient quelqu’un dont le souffle risquait de souiller l’air pur de la Rhodésie du Sud. Ainsi en avait-il été d’Harry Stone, dont la photo était parvenue à Tiger comme celles de ses « clients » habituels.
À Beira, où l’avait conduit le train que Tiger lui avait si obligeamment indiqué. M. Stone s’embarqua à bord d’un courrier qui faisait le service sur la côte orientale, entre Burban et Greenock. Plusieurs autres navires l’avaient tenté, mais il s’était produit à Londres divers événements à la suite desquels l’ex-détective ne souhaitait pas débarquer en Angleterre dans un port directement surveillé par ces messieurs de Scotland Yard. Ceux-ci étaient fort occupés à cette époque ; pourtant, ils auraient pu distraire quelques officiers afin d’assister à l’arrivée des paquebots et de réserver à certains voyageurs un accueil un peu trop chaleureux. Nul d’entre eux ne le désirait certes moins qu’Harry Stone.
Quelques jours après l’installation de celui-ci à Glasgow, dans un logis respectable, une conférence réunit autour du chef constable de Scotland Yard, Cowley, ses principaux inspecteurs.
« Il s’est produit en trois jours, messieurs, deux attaques importantes, dit cet honorable Cowley. Le travail a été effectué par la même bande et, s’ils n’avaient eu une déveine incroyable, ils filaient avec la forte somme. »
Le chef constable Cowley faisait allusion au cambriolage scientifiquement organisé de la Banque des Comtés du Nord . Un veilleur de nuit et un agent cycliste avaient été « descendus » de sang-froid, et un coffre-fort éventré. Les cambrioleurs n’avaient pour ainsi dire rien récolté, à la suite du retrait d’une forte somme d’argent liquide effectué la veille « sur renseignements confidentiels ».
« Un des types de la bande avait mouchardé, continua Cowley, mais ce n’était certainement pas pour la prime, puisqu’il n’est pas venu la réclamer. Il est criminel d’avoir laissé cette bande nous filer entre les doigts, avec la quantité de tuyaux que nous avions reçus. »
L’affaire de la Banque des Comtés du Nord avait immédiatement été suivie par celle de la Mersey Trust, qui concernait deux cent mille livres d’or en barre.
« Le boulot le mieux préparé que j’aie jamais vu, dit Cowley, avec l’enthousiasme d’un véritable connaisseur. Tout devait marcher comme sur des roulettes. Si le commissaire de l’ Illenic n’avait pas fait l’entêté et retardé d’une heure le déchargement de l’or parce qu’il avait égaré ses paperasses, ça y était !
L’inspecteur en chef Pherson, qui avait l’esprit sarcastique, murmura :
« Je vois que vous lisez les journaux, chef ! »
Cowley se gratta l’occiput avec irritation.
« Naturellement, » bougonna-t-il.
Scotland Yard était outré, les polices locales n’ayant pas cru devoir consulter ces messieurs de l’état-major.
« Et pourquoi Scotland Yard ? avait demandé le chef constable du Blankshire. Est-ce que je ne dispose pas de mes forces personnelles ? Quelle idiotie ! »
C’était un vrai militaire, ce chef constable du Blankshire. Cowley disait qu’il pratiquait mieux l’esprit de corps que le prenez garde (1) , ce qui était probablement une opinion partiale.
Les chefs constables des comtés ne sont pas tenus d’en référer à Scotland Yard. Scotland Yard n’a pas à intervenir dans les affaires des polices locales. On ne lui demanda donc son avis ni pour celle de la Banque des Comtés du Nord, ni pour celle de la Mersey. Comme le disait le chef constable du Nortshire :
« Si nous ne sommes pas capables de faire ce boulot nous-mêmes, autant vaut nous balancer tout de suite… Nous avons des troupes, à nous de nous en servir. Je suis d’avis qu’il faut faire confiance au type qui est sur le tas. Je me souviens qu’il y a quelques années, lorsque je commandais une brigade à Poona… »
Les cinq hommes qui étaient assis en rond autour de la grande table, à Scotland Yard, examinant les cartes locales et dépouillant les renseignements confidentiels qu’ils avaient pu se procurer, n’étaient jamais allés à Poona et nul d’entre eux n’eût été capable de commander une brigade, sauf peut-être une brigade de pompiers.
« Après ces deux affaires, dit Cowley, nous pouvons compter qu’une troisième ne va pas tarder. Attendons-la. Tout indique l’organisation en série une préparation de longue haleine et la mise en scène la plus soignée. Mais à quel artiste les attribuer ? »
L ’artiste était Lew Daney. Personne ne songeait cependant à lui parce que personne ne le connaissait alors, quoique certain ex-détective n’ignorât rien de lui. Le jour où Harry Stone convint que l’Écosse ne lui offrirait rien, sauf des hommes d’affaires désabusés (il travaillait à une escroquerie aux mines d’or), le troisième numéro attendu par Scotland Yard sortit gagnant.
La Banque de la Basse Clyde avait ses somptueux bureaux au centre de Glasgow. Dans l’intervalle et les 4 heures du matin d’un vendredi plus brumeux encore, le coffre numéro 2 fut fracturé et nettoyé. Il contenait environ douze cent mille livres en monnaie courante anglaise, et, chose plus importante, dix millions de reichsmarks déposés par la Chemikal Bank de Düsseldorf, à titre de garantie d’un accord avec la Trust Chimique de l’Angleterre Septentrionale. Cette somme, constituée par dix mille billets de mille marks, était enfermée dans deux coffrets d’acier contenant chacun cinq mille coupures en paquets de mille.
Les deux veilleurs de nuit, Mc Call et Erskine, avaient disparu lorsque la Police, alertée par leur silence, était venue jeter un petit coup d’œil à la banque. Ils devaient en effet, comme toutes les nuits, signaler heure par heure que tout allait bien. Il fallut trois heures pour qu’on les découvrît dans un ascenseur, arrêté entre deux étages et mis hors de service par la rupture de la barre du sélecteur. Ils étaient morts tous les deux, tués à bout portant.
Un seul homme eût été capable de fournir à la Police un renseignement de quelque importance, Harry Stone avait eu la veine de rencontrer, ce soir-là, un Écossais romanesque et de bonne volonté, qui était demeuré dans ces dispositions de sept heures du soir à deux heures du matin. En retenant son souffle, ce digne gentleman avait écouté l’histoire inventée par Harry : la mine d’or cachée dans les flancs des Monts Magalies (qui n’avaient jamais produit rien de plus doré que du tabac). Il avait ensuite emmené Harry chez lui, dans un charmant appartement, et Harry avait dessiné des cartes, beaucoup de cartes, car Harry était un homme distingué, parlait trois langues et était capable de dessiner des cartes à perte de vue, lorsque cet exercice était susceptible de lui rapporter quelque chose. Les cartes qu’il avait dessinées ce soir-là étaient si belles et complétaient si bien son histoire que le chèque avait failli passer de la poche du digne gentleman écossais dans la sienne. Mais Harry était un artiste, il ne précipitait jamais rien. Après avoir souhaité de doux rêves à son hôte, aux environs de trois heures du matin, il s’était retiré et avait regagné pédestrement son domicile.
En route, il avait aperçu une grosse automobile qui suivait lentement le trottoir, puis s’était arrêtée après l’avoir dépassé. Un homme l’avait croisé rapidement et il avait pu distinguer son visage d’un coup d’œil. Visage familier… Mais quel nom lui donner ? À quelques pas de là, il s’était retourné : l’homme avait été rejoint par un autre individu, chargé d’un sac. Un troisième traversait la rue au pas de course, bondissait dans l’auto qui tournait et filait à toute vitesse. On eût dit que les trois silhouettes s’étaient évanouies en même temps dans

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