Fille d'Hécate, 4 , livre ebook

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« Mes soeurcières... Sans elles, je n’aurais jamais pu franchir tous ces obstacles. Trois filles aux pouvoirs puissants, mais surtout aux caractères bien trempés. »


Maëlys, la sorcière empathe, a su s’entourer d’amies fidèles pour l’aider dans sa quête : Dorine, l’herboriste qui l’a initiée à la magie, Patricia, la clairvoyante dont les rêves prémonitoires sont bien utiles à la police et enfin Jihanne, la gothique qui parle aux défunts.


Retrouvez les personnages de « Fille d’Hécate » dans ce recueil de nouvelles signées par Cécile Guillot et des auteurs invités.


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Publié par

Nombre de lectures

16

EAN13

9782375680148

Langue

Français

Cécile Guillot présente
Le Cercle d’Hécate
Editions du Chat Noir
Dorine
Ce qui nous lie Cécile Guillot
{1} Ce qui nous lie Le doux soleil de fin d’après-midi caressait ma pea u de ses rayons dorés. J’aimais l’été, sa chaleur. Je me sentais comme res sourcée, ma magie abreuvée de sa force. J’aurais pu rester ainsi des heures durant, alanguie sous son étreinte sensuelle tel un de ces chats par esseux, mais mon mari mit un terme à ma rêverie. « C’est vraiment magnifique ! » Effectivement, le décor était des plus paradisiaque s. Des champs de coquelicots à perte de vue sur ma droite, et sur ma gauche des étendues de blés et de tournesols. De petits papillons voletaie nt de-ci de-là et se posaient parfois sur des fleurs avant de reprendre leur ball et aérien. Émerveillée, je suivis mon conjoint sur le chemin qui menait à la forêt. Les arbres clairsemés laissaient largement passer la lumière mais arrivai ent tout de même à créer une sensation d’intimité et de mystère, comme si nous avions pénétré dans un autre monde. Et peut-être était-ce bien le cas fina lement. Qui sait si quelques petites fées ne nous surveillaient pas, nichées au creux d’un trou ou d’un entrelacs de racines ? Du bruit indiquait que nous étions sur le bon chemin. Quelques pas plus tard, la clairière où devait avoir lieu le handfasting apparut. Morwenna, la prêtresse, s’activait, dressant des sc ulptures faites d’épis de blé. « Incroyable, murmurai-je. — Oh, vous êtes arrivés ! Approchez-vous Dorine. Vo ici la décoration ! Et bien sûr, nous recevrons demain matin les roses, le s œillets et les belladones. » Elle me montra le lieu précis de la cérémonie au pied d’un noisetier, puis l’emplacement des festivités où l’on installerait d es tables afin que les invités puissent se sustenter entre deux danses. Nous avion s prévu de servir des tartes aux mûres, des petits pains et du cidre. Des mets de saison idéals pour ce jour de Lughnasad. Christophe suivait les explic ations de Morwenna, un peu en retrait. Il était encore assez timide avec les sorcières, et pour cause, il n’avait pas été éduqué dans cette culture. Il avait découvert la magie en me rencontrant, moi puis toute ma famille. Sa volonté de s’unir à ma personne selon les rites païens n’en était que plus touchante. Il voulait me faire plaisir, mieux comprendre cet aspect de la réalité, appréhen der la vie d’une manière neuve. En fait, il voulait voir le monde à travers mes yeux. Ainsi, nous n’en étions que plus proches. Peu importaient les différ ences, c’était comme si nos âmes s’étaient reconnues à l’instant même où nos re gards s’étaient croisés. Une sorte d’évidence. Et chaque jour à ses côtés me confirmait ce que nous avions pressenti en cet instant unique. Le handfasting était donc à la fois un moment fort dans notre vie amoureuse mais également dans mon cheminement spiri tuel. Une espèce d’étape à franchir. Je ne savais pas avec exactitud e comment, ni pourquoi, mais je devinais qu’un changement allait s’opérer e n moi. Et puis, avouons-le, je trouvais le symbolisme des rubans liant nos mains d’un romantisme fou !
* Quelques heures plus tard, nous gagnâmes la petite auberge où Christophe avait réservé une chambre. Il avait choi si un endroit charmant et rustique comme je les aimais. La pièce était meublé e d’un lit en bois de chêne blanc cérusé avec une coiffeuse assortie et des ten tures roses. Sitôt la porte refermée, il m’attira à lui et m’embrassa avec tend resse. Le contact de ses lèvres fit naître un doux brasier au creux de mon v entre et je me serrai plus étroitement contre lui, m’agrippant à sa nuque. Ses mains parcoururent les courbes de mes reins et m’arrachèrent un léger fris son. Cette nuit, comme toutes les autres depuis plusieurs semaines, ce n’é tait pas juste le désir charnel qui nous réunissait mais le vœu de concevoi r une petite Loïs ou un petit Théo. Son baiser se fit plus ardent et le sou ffle court, je m’écartai délicatement pour tirer les rideaux. En m’approchant de la fenêtre, mon regard fut attir é par la lune, pleine et argentée. Je m’arrêtai un instant pour profiter de son influence. Me baigner quelques secondes dans ses rayons opalescents. Ma q uiétude fut rompue par le bruit furtif mais bien distinct d’un sanglot. Là, entre les oliviers, se tenait une femme en pleurs qui semblait me supplier, la main t endue en un geste poignant de prière. La lumière de l’astre nocturne lui conférait un aspect évanescent et presque irréel. Et ses lèvres formère nt alors ces simples mots : « Aidez-moi. » Je me tournai vers Christophe qui me fixait, dans l’expectative. « Je reviens tout de suite », dis-je. La femme était toujours dehors, au même endroit. De près, elle paraissait tout aussi fragile et immatérielle. Ses longs cheveux noirs tombaient en vagues sur des épaules menues que couvrait à peine une fin e robe d’été sombre, ornée de dentelles. Son allure à la fois éthérée et désuète ne laissait aucun doute sur son essence : un fantôme. On dit que les esprits restent parfois sur Terre pour achever une tâche qui leur tenait à cœur de leur vivant, je demandai donc : « Qui êtes-vous ? Puis-je faire quelque chose pour vous ? — Je m’appelle Blanche. J’ai senti que vous étiez g uérisseuse… et aussi une future maman. La vie palpite au creux de votre être, encore si petite… C’est cela qui m’a attirée ici. Vous êtes celle que j’attendais depuis des décennies. » Interloquée par sa déclaration, je ne trouvais rien à répondre, me contentant de passer une main incrédule sur mon ventre encore plat. « Je suis morte, et mon trépas a causé celui de mon fils, ajouta-t-elle la voix tremblante. Sauvez mon bébé s’il vous plaît », m’implora-t-elle. Je vis à travers les froufrous de sa tenue, la form e caractéristique qui tendait les tissus.
« Je le sens en moi et pourtant il n’est plus… Mon corps, mon âme ne sont plus que son tombeau… Je me sens tellement coupable de n’avoir su le protéger, de n’avoir pu lui donner la vie. Aidez-moi ! — Mais que dois-je faire ? — Je ne sais pas, dit-elle le regard troublé. Je pe nsais que vous sauriez… » Elle se cacha le visage de ses mains, en proie à un désespoir encore plus grand. « Je trouverai ! » lui assurai-je. Je tentai de l’étreindre, mais mes bras ne rencontr èrent que le vide. Je ne pouvais même pas lui offrir ce réconfort. La sonnerie de mon portable me fit sursauter et je sentis l’appareil vibrer au fond de la poche. « Mais t’es où ? » Je relevais la tête prête à m’excuser cependant l’a pparition avait déjà disparu. Je regagnai en vitesse la chambre, essayant vaineme nt de trouver une formulation acceptable. « Chéri. Tu vas être furieux, mais je dois, avant toute chose, aider l’âme en peine qui rôde. » Contre toute attente, il n’eut pas l’air d’apprécie r ma tirade, cependant il semblait plus perplexe qu’en colère. « On se marie demain, on est censé faire un bébé et toi tu veux passer la nuit dehors à courir les fantômes… — Je ne serai pas longue, c’est promis… Si seulemen t tu l’avais vue… Je me sentirais trop coupable de la laisser ainsi… Je ne vais penser qu’à ça… — Cela ne m’étonne pas de toi… Bon, fais ce que tu as à faire pour être sereine le jour du mariage. » Il me sourit, l’air penaud et vainement assuré avant d’ajouter : « Je ne sais pas si je comprendrai vraiment un jour toutes ces choses de l’au-delà mais je te fais confiance. » Je voyais bien l’effort qu’il faisait pour dépasser sa frustration et m’accepter telle que j’étais et je ne m’en sentais que plus coupable, tiraillée entre mes responsabilités de sorcière et celles d’épouse. «ent censé être le plusDéesse, s’il te plaît, aide-moi. Ne fais pas du mom beau de mon existence un fiasco total», priai-je. Je craignais qu’un jour, il ne se trouve trop délaissé et en ait assez de mes histoires. Dehors, nulle trace de ma revenante. Le calme et la douce tiédeur de l’air m’auraient presque laissé penser que j’avais rêvé. Il n’en était rien et le problème demeurait quand même. Il me fallait trouve r une solution. Mais
comment sauver un fœtus mort depuis tant d’années ? Peut-être était-ce son âme que je devais guérir ? Mais un enfant si petit possédait-il ce que nous considérions comme une âme ? Était-il devenu un fan tôme lui aussi ? Les informations données par l’apparition avaient été s i floues. « Déesse, guide-moi. » Je réfléchissais mais rien ne paraissait convenir. Après tout, j’étais juste une sorcière connaissant les plantes qui soignent. Je me sentais si impuissante, si frustrée. Comment apaiser les tourm ents de cette mère ? Comment prendre un peu de sa douleur pour alléger s on fardeau ? Pendant combien d’heures m’étais-je torturé l’esprit ? Alors que la situation me semblait inextricable, un murmure vint titiller mon oreille : « Pourquoi toi ? Pourquoi aujourd’hui ? Voilà les bonnes questions. » J’avais été entendue. Et si le mystère n’en semblai t que plus épais, je savais désormais que je pouvais faire quelque chose . Lughnasad… Les moissons… Le cycle de la vie… Je sen tais que la solution se rapprochait mais c’était comme avoir un mot sur le bout de la langue… Si proche et pourtant insaisissable. Je rep ensais à Tailtiu qui mourut d’épuisement un jour de Lughnasad pour faire de l’Irlande une terre cultivable. Un lieu de fertilité pour les siens et ceux qui suivraient. Ce n’était pas le bébé que je devais sauver mais la Maman. « Reviens, Blanche ! J’ai le rituel qui apaisera tous tes chagrins. » Elle était là. À côté de moi, les yeux pleins d’esp oir. Je m’approchai d’un panier abandonné sur un banc et me saisis d’un grain de blé. « Le rituel du grain de blé est ancien et presque o ublié. Regarde, je l’enfouis dans la Terre. Il va mourir cet hiver pou r renaître au printemps et porter les épis de l’été. Il symbolise le cycle éternel de la vie et de la mort, ainsi que celui des transformations. » Le fantôme me fixait toujours mais son regard s’éta it teinté d’incompréhension. En cette nuit de Lughnasad, Toi qui étais la Grande Mère de l’ancien, Nous honorons ton abnégation. Nous te remercions pour notre récolte personnelle, Et nous t’offrons notre propre sacrifice, Car nous devons abandonner tout ce qui a échoué dan s nos propres vies, Même si nous savons qu’il est difficile de laisser derrière nos rêves chéris. Je me tournai vers elle. « Tu dois oublier tout ça. Ton bébé est parti mais son âme a regagné le cycle des réincarnations. Il te faut toi aussi trou ver la paix pour rejoindre la
Déesse et revenir vers une nouvelle vie. Sans doute vous retrouverez-vous d’une façon ou d’une autre… Qui sait ? Mais l’équilibre doit être rétabli. » Elle pleurait tout doucement, secouant faiblement la tête. « Ce n’est pas un échec, c’est une victoire. Sur so i-même, sur l’égoïsme qui nous fait retenir les gens que nous aimons… Ne t’accroche pas à cette existence passée alors que tant de possibilités s’o ffrent à toi… Au fond de nous subsistent les liens que nous avons créés avec chaque être qui a compté. Accepter la mort de ton bébé ne diminue en rien l’amour que tu lui portes… » Elle s’effaça lentement, ne laissant derrière elle qu’une impression de rêve flou. Parfois la Déesse devient la Faucheuse, l’Imp lacable qui se nourrit de la vie pour qu’une autre vie puisse grandir. Il était si facile de l’oublier. Je passai une main sur mon ventre, pensive. Moi aussi, je fai sais partie de ce cycle et cette soirée m’avait apporté son lot de transformat ions… De femme-fille, je devenais femme-mère. Je sentis un sourire se dessin er sur mes lèvres à cette idée tandis que l’aurore se levait. Il était temps de retrouver mon mari et de lui apprendre la bonne nouvelle en laissant derrière mo i la culpabilité et les doutes. *
« Devant la Déesse, je vous déclare unis aussi long temps que durera votre amour, dans cette vie et au-delà ». Et tandis que Morwenna nouait le dernier ruban auto ur de nos poignets, je songeais à toute la signification de ces vœux. À ce qui nous liait ce jour, et perdurerait à travers les cycles de l’existence. À cette vie qui était la nôtre et s’éteindrait un jour pour renaître encore et encore… «Merci Déesse. Merci Blanche.» Conjointement, nos mains se posèrent sur mon ventre , écrin de promesses pour cette vie fleurissante… The endless darkness opens my heart to the ultimate answers […] And so the pain does go away liberating all the last remains.
The Way of Purity –The Last Darkest Night
Brigid, Protège mon enfant.
Anne Laure
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