79
pages
Français
Ebooks
2018
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Publié par
Date de parution
08 février 2018
Nombre de lectures
9
EAN13
9782368323601
Langue
Français
Entre une interrogation de naissance et un parcours atypique, Jean-Frédéric Boullier, tantôt résigné tantôt révolté, cherche à vivre à travers un destin non maîtrisé. S’efforçant de découvrir la vérité dans la plus stricte neutralité, il chemine pas à pas devant un père absent qui choisit de disparaître légalement et une mère possessive, pour enfin découvrir que celui qu’il a engendré n'est en fait que...
Témoin oculaire puis spectateur, l’auteur devient acteur et libre de comprendre, en reliant les événements les uns aux autres. Frôlant l’autodestruction et la marginalité, il trouvera son salut, en devenant maître de lui-même par la foi et le pardon.
Synthèse d’une sacrée tranche de vie, cette expérience forte ne laissera aucune chance au lecteur d’en sortir indifférent, passant de l’étonnement à la stupéfaction, de l’incompréhension à la rédemption... le naturel côtoyant le surnaturel avec une facilité parfois déconcertante, fait de cet ouvrage, un livre déroutant, dérangeant, mais en aucun cas réducteur ;
un authentique plaidoyer pour l’amour transcendé.
Publié par
Date de parution
08 février 2018
Nombre de lectures
9
EAN13
9782368323601
Langue
Français
L’envoldu pardon
La SAS 2C4L - NOMBRE 7, ainsi quetous les prestataires de production participant à la réalisation de cet ouvragene sauraient être tenus pour responsable de quelque manière que ce soit, ducontenu en général, de la portée du contenu du texte, ni de la teneur decertains propos en particulier, contenus dans cet ouvrage ni dans quelqueouvrage qu'ils produisent à la demande et pour le compte d'un auteur ou d'unéditeur tiers, qui en endosse la pleine et entière responsabilité.
Jean-FrédéricBOULLIER
L’envoldu pardon
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PREAMBULE
Été2006. Comme une brusque envie de retour aux sources. Dans l’urgence, comme unappel. Prévenue, mon ex-femme accepte de m’accompagner sur cette terre qui m’adonné e la vie et qui, sans être totalement racine, me donne la douceur d’unrefuge. Alors, inévitablement, chaque fois que je me rends à Lyon, je ne peuxm’empêcher de faire un crochet par ce faubourg dauphinois baptisé « la cité descouleurs » dans lequel une maison particulière reste une véritable énigme.
Danscette demeure sans âge, que vais-je de nouveau découvrir, de nouveau retrouver ?Délabrée, délaissée va-t-elle définitivement mourir, avouer un secret ouressusciter ?
Cedébut juillet n’échappe pas à la règle : embouteillages, chaleur, moiteur,chassée croisée de voitures où s’intercale la noria de camions qui trace sur legrand ruban... Comme gagné par l’impatience, je ne peux m’empêcher de doubler,au grand dam de Marie Françoise, qui me rappelle les plus élémentaires règlesde sécurité. Je suis pressé alors que personne ne m’attend ; et cettefrénésie ne s’apaisera qu’au portail du péage de Vienne qui, deux heures etdemi plus tard, me délivre...
Longeantalors le Rhône, je biaise quelques minutes plus tard à droite pour rejoindrel’Isle d’Abeau et Bourgoin ; si cette départementale n’est pas le meilleurchemin, elle m’invite à reprendre mes repaires de jadis. Forêts, étangs, champsde maïs et de colza me sollicitent à chaque regard.
Mêmesi ces tableaux me sont familiers, il me semble toujours que j’ai oublié denoter quelques détails qui m’avaient échappés la fois précédente… Ma moyennes’est considérablement effondrée et je croise le regard interrogateur de monaccompagnatrice… Crémieu finit par montrer le bout de son nez. Longue lignedroite et approche de la ville par son ancienne gare qui, en une fraction deseconde, me replonge quarante ans en arrière quand cette ligne privée était enactivité. Déclassée après la guerre, elle ne servait plus que pour de longuesrames de wagons de ciment que des diesels atypiques tiraient vers Lyon Pardieu,à raison d’une circulation quotidienne à heure fixe. Et à cinq ans, de la vitrede la Dauphine de ma mère, au retour dominical, je scrute ces machines qui tressautentsur les passages à niveau, dans un bruit d’apocalypse. J’en conserveaujourd’hui de vibrants souvenirs qui parfois me poussent à les revivre sousforme d’une reproduction maquette.
Jescrute, malgré moi, quelques traces de vie sur le bitume, au croisement de lagare, mais je ne peux que constater les affres du temps. La végétation a envahila plateforme de la voie et c’est à peine si l’on distingue encore le tracé.Seule la gare, immobile, se dresse, comme échouée sur un rocher dans uneattente fantomatique... Passé ce petit bourg, nous nous enfonçons dans lesgorges de la Fusa avant de rejoindre St Hilaire de Brens et St Chef… Mon cœurcommence à battre plus fort… Voilà Arcisse célèbre pour être le village natald’un certain Louis Seigner grand acteur au demeurant, et quelques virages plustard l’étang de Charray. Mon esprit s’évade une seconde fois en pensant auxgardons péchés au crépuscule que je mettais délicatement dans l’arrosoir en ferblanc. Et réveil dans cette longue ligne droite, comme une pisted’atterrissage, qui met un terme au voyage et vient mourir aux pieds de cevillage dauphinois.
Pèlerinageou nécessité ? Avant toute chose, arrêt au cimetière. Comme pour validermon sauf-conduit. Après une traversée silencieuse, comme un alpiniste au boutde l’effort, je contemple de la butte toute la plaine de Brailles, écrasée sousle soleil, avec son ancien moulin et, perdu au milieu des champs colorés,l’ancienne maison de Jérémy Brossay avec en toile defond sous une brume dechaleur le hameau de Vasselin. Derrière moi, la colline du Suppet, et sur madroite l’église de Vézeronce ancien lieu de rassemblement d’une vie agricoleaujourd’hui disparue… J’entends encore les flonflons des comices, l’envolée descloches qui annonçaient la messe dominicale, la trompe du car des VFD (VoiesFerrées du Dauphiné) qui déposaient ces voyageurs pressés de se désaltérer, etles clarines des vaches qui remontaient le soir à l’étable.
Pendantque Marie Françoise fume une cigarette, je pousse cette vieille grille rouilléequi fait ressembler cet endroit inondé de soleil à une halte mexicaine perdueau milieu d’un désert dépeint dans les westerns. Et contraste de cette imagefugace de l’enterrement de mon père un après- midi de début janvier 1999 àchaque crissement de pas sur ses cailloux blancs… Je reconnais enfin le caveaude la famille Brossay à peine entretenu ; certains noms sont illisibles presqueeffacés sur la pierre grise parsemée de lichen jauni. Je sens alors perler lesgouttes de sueur sur mon front que je tente de contenir pendant que je réciteun « je vous salue Marie » et un « Notre Père ». Je ne peux m’empêcher de meposer ces questions : « A quand remonte la dernière visite d’un membre dela famille, ici ? », « Pourquoi personne ne vient ? ». Même si lestombes sont vides des esprits de leurs occupants, elles restent la preuveindestructible de leur passage terrestre…
Retourà la voiture, coup d’œil à ma copilote qui confirme la beauté du point de vue.
«Vraiment superbe … »
Maiselle me rappelle l’essentiel en consultant sa montre. Midi n’a pas encore sonné,mais il ne faut pas traîner. À peine deux minutes, et me voici devant cesmajestueuses grilles noires que j’escaladais à cinq ans et qui me servaient detour de contrôle pour scruter Michel, copain d’enfance, et voisin d’en face quine se faisait pas prier pour une partie de vélo ou une pêche aux vairons. Amisfidèles, nous nous retrouvons régulièrement le temps d’un week-end chaque annéepour parler des mois écoulés et de notre jeunesse enfouie ici, du temps où ons’amusait avec presque rien… Je sais que son père Alphonse est toujours là,comme un gardien de phare, plongé dans une solitude qu’il disperse à chaquevisite de ses enfants, d’un ami ou d’un voisin. Dernier témoin d’un passérévolu, ce gaillard de quatre-vingt printemps à l’accent isérois sans pareilm’a toujours étonné par un bon sens dont il savait faire preuve à chaquequestion. Conteur extraordinaire, il a toujours été le lien entre ma famille etmoi, me racontant les allées et venues des uns et des autres dans des envoléesverbales dont il avait seul le secret.
Diable !Que sa vie n’a pas été facile ! Pourtant, quelle satisfaction de savoirque ses efforts, qu’il partageait avec sa femme, n’ont pas été vains entrel’absence d’eau courante et de commodités. Raymond, électricien puis technicienEDF, Maryse, directrice d’école, Michèle, gérante de magasin, Michel,expert-comptable sans oublier Yvonne, épouse d’artisan et Agnès, employée à lasuperette de Morestel. Mais visiblement Alphonse, que je sais fatigué, ne setient pas derrière sa fenêtre. Un voisin que je ne connaissais pas, surgissantun peu de nulle part, semble me reconnaître :
«Bonjour Monsieur Brossay. Que venez-vous faire ici ? » Je lui répondsalors maladroitement :
«Même si je sais que cette maison appartient à la mairie, il me serait agréablede rentrer une dernière fois dans cette propriété, qui non seulement a bercémon enfance, et que je considère comme une racine inamovible, mais aussi quicontinue à me bouleverser et me passionner par son passé un peu irréel. »
Avecplaisir, je cours chercher les clés. Avec difficulté, le portail s’entrouvreenfin en couinant, pour nous laisser passer à la queue leu leu. Délivrance !Je peux enfin fouler à grandes enjambées l’herbe de la cour que je connais dansses moindres recoins… Le hangar où mon père entreposait vélo et tondeuse, lafontaine à bras, la porte verte qui ouvre sur le parc. Il est là, encore bienvivant malgré l’abattage de certains arbres et la pile de bois mort qui jouxtela façade. Toutes les ouvertures sont fermées, et le lierre commence à lécherles volets de bois vert délavé.
«Oui, les travaux ont commencé, mais le conseil a tout mis en stand-by depuis legel des crédits. Je ne sais pas si finalement, elle verra le jour… »
Jem’interroge alors du bien-fondé du droit de préemption qu’avait alors exercé lemaire de l’époque, trop heureux de pouvoir redorer le blason vezeroncois.
Quelleétait si belle, avec ses dix-huit pièces, son parquet qui craquait au moindrepas, sa montée d’escaliers avec sa boule de verre violette, cette grandecuisine aux dalles de pierre si caractéristiques, cette salle à manger auxpoutres apparentes et ces deux salons en enfilade dont l’un servait debibliothèque et de bureau. Il y avait enfin la double cave à l’odeur siparticulière, si froide en hi ver et dont l’unique ampoule lui donnait des airsfantomatiques et inquiétants… Nous pénétrons à l’intérieur par le perron et leconstat d’un abandon prononcé me saute à la figure : pans entiers detapisseries arrachés, portes béantes de placards désormais inutiles, chapeletsentiers de moisissures courant le long des murs et des plinthes. En pénétrantdans le vestibule d’entrée, un froid presque glacial me tombe sur les épaules.Je presse le pas pour faire le tour de chaque pièce, comme pour ne rienoublier. D’abord le rez-de-chaussée, les cuisines, la salle de bain WC, lescouloirs mitoyens. Je précède tout le monde et monte quatre à quatre aupremier… Rapi