266
pages
Français
Ebooks
2019
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Publié par
Date de parution
08 mars 2019
Nombre de lectures
154
EAN13
9782370116567
Licence :
Tous droits réservés
Langue
Français
Publié par
Date de parution
08 mars 2019
Nombre de lectures
154
EAN13
9782370116567
Licence :
Tous droits réservés
Langue
Français
EXOMONDE
Livre II – Möa, le temps suspendu
Emma Cornellis
© Éditions Hélène Jacob, 2018. Collection Science-fiction. Tous droits réservés.
ISBN : 978-2-37011-656-7
Prologue
Ça y est, elle est à nouveau seule. Pourtant, elle peut encore sentir le goût de leur dernier baiser sur ses lèvres. Il avait passé un bras autour de ses épaules qui tremblaient un peu et avait murmuré :
— Cela fait dix-sept ans que tu attends ce jour, c’est normal d’être angoissée.
— Et si nous nous sommes trompés ? Si je ne reviens jamais…
Il lui avait posé un doigt sur la bouche avant de répondre :
— Tu reviendras. Le temps ne nous a pas empêchés de nous rencontrer, il ne nous séparera pas. Si la réunion ne fonctionne pas, dans neuf jours Zra sera à son zénith et c’est moi qui te rejoindrai.
— Tu es prêt à tout abandonner pour me suivre ?
— Nous en avons parlé des centaines de fois, Lola. Tous ceux que nous aimons peuvent très bien se passer de nous…
— Mais si nous avons faux sur toute la ligne ! Si la brèche ne s’ouvre pas !
— Arrête de te faire mal en pensant au pire, tout ira bien. Il y a dix-sept ans, tu as traversé cette faille en sens inverse. Nous avons vécu tout ce temps en sachant qu’un jour nous atteindrions à nouveau ce moment. Elle s’ouvrira. Bientôt, les nôtres accueilleront la venue de Zra et le Chemin de Lumière se déclenchera accidentellement exactement de la même manière qu’il y a dix-sept ans, parce que cet instant existe, a existé et existera toujours. C’est bien toi qui nous as appris ça ?
Dans un élan, Lola s’était blottie contre l’homme qu’elle aimait depuis si longtemps. D’instinct, il savait la rassurer, pourtant, cette nuit, elle était sûre que ce n’était que des mots : au fond de lui, une peur identique à la sienne était tapie. Il l’avait enlacée fermement et avait enfoui son visage dans les boucles brunes de la jeune femme. Elle avait senti les larmes de son amant couler au creux de son cou, et sa voix avait résonné dans son esprit :
— Je ne pourrais plus jamais me passer de toi. L’idée de ne plus pouvoir sentir ton corps contre le mien est insupportable. Mais si tu ne traverses pas, tu le regretteras pour le restant de ton existence… Tu dois les rejoindre, Lola.
Non sans mal, et surtout grâce aux données extraites du vieux flexi de Lola, ils avaient retrouvé le lieu où ils s’étaient rencontrés pour la première fois. Mais, sur la pente aride qui descendait vers l’abysse, aucun signe ne pouvait corroborer la position indiquée. Ce n’est que lorsque l’éclair s’était enfin abattu devant eux qu’ils avaient su, avec certitude, qu’ils étaient au bon endroit. Tandis que le brouillard s’était mis à scintiller, comme si des milliards de cristaux tombaient du Néant, Lola avait senti les battements de son cœur s’affoler.
Des hurlements terrifiés avaient retenti au loin et, avec une légère moue d’exaspération, Zven avait dû, encore une fois, rassurer leurs compagnons :
— San, Aza, calmez-vous et faites-moi confiance ! Le feu du ciel a seulement frappé le sol et il ne reviendra pas !
— Ne sois pas dur avec eux ! était intervenue Lola, heureuse de cette distraction. Finalement, c’est la première fois qu’ils sont vraiment témoins du phénomène ! Sans compter que leur compréhension du monde est bien plus restreinte que la nôtre.
Lola s’était ensuite dégagée de l’étreinte de Zven, à contrecœur, sans pour autant lui lâcher les mains. Enveloppée par la nuit froide et le brouillard, sous la lumière blafarde de Zra, elle avait voulu imprimer dans sa mémoire l’image du compagnon qui partageait sa vie depuis dix-sept ans. Il était toujours aussi incroyablement attirant avec ses iris d’ambre aux reflets noirs. Certes, quelques rides s’épanouissaient maintenant aux coins de ses yeux quand il souriait, mais le temps avait modelé le garçon à la beauté étrange en un homme au corps athlétique et terriblement séduisant.
Soudain, le scintillement s’était métamorphosé en un rideau lumineux, ondoyant à quelques pas devant eux : c’était le moment. Ils s’étaient embrassés une dernière fois et elle s’était éloignée avec, dans la tête, les paroles de Zven qui l’accompagnaient :
— Aie confiance ! Dans quelques jours, nous serons à nouveau réunis.
Elle avait traversé le phénomène lumineux avec une impression de déjà-vu familière. Mais, cette fois, elle ne s’était pas précipitée de l’autre côté, elle avait regardé la toute jeune fille qui croisait son chemin dans le sens inverse et lui avait souri, en espérant lui insuffler un peu de courage. Elle s’était souvenue de l’angoisse, mais aussi de l’étrange sensation qui l’avait étreinte dix-sept ans auparavant, quand elle avait cru voir son propre visage, comme dans un miroir au milieu du chatoiement verdâtre. Comment aurait-elle pu comprendre, à l’époque, que le reflet n’en était pas un et qu’il s’agissait bien d’elle. Une version d’elle-même, plus vieille de dix-sept ans et sur le point de changer à nouveau le cours du temps ?
Première partie – Seule sur Möa
– 1 –
Le vieil homme s’arrête pour souffler et finit par se laisser glisser le long du mur. Il n’en peut plus, il doit se reposer. Depuis combien de temps déambule-t-il dans le Labyrinthe ? Une journée, deux ? Son regard balaie le souterrain étroit où il se trouve. Des couloirs luminescents, creusés dans la roche, des embranchements à deux, trois ou jusqu’à dix possibilités et pas une porte ! Pas la moindre pièce ! Mais qui étaient donc leurs ancêtres créateurs pour construire une fourmilière aussi absurde ! Un rire étrange s’échappe de sa gorge sèche, cela fait une éternité qu’il n’a plus d’eau et il sent qu’il ne tiendra plus très longtemps. Il a bien essayé d’appeler Zven, de tendre son esprit à la recherche d’un autre Möam, mais rien. Pas le moindre murmure n’est venu perturber le silence. Alors il se résigne, la mort ne lui fait pas peur à son âge et ce tombeau est magnifique pour un saltimbanque ! Bien sûr personne ne brûlera son corps afin que son âme rejoigne Yls, mais qu’importe, il n’a jamais vraiment cru à ces histoires de vie éternelle. Trop las, il ferme les yeux. Son seul regret est de devoir mourir sans savoir ce qu’il est advenu de Zven…
* * *
Le jour se lève et Yls découvre les enfants de ses enfants en état de choc. Une aurore rosée succède à la nuit, Zra s’en est allé sans son combat, et le Néant Obscur n’est pas monté des profondeurs de l’Abysse pour envahir la terre des vivants. Désemparés, les Möams errent par petits groupes autour de la place Noire transformée en champ mortuaire. Une trentaine de corps meurtris s’alignent déjà. Certains ont péri brûlés par le Chemin de Lumière devenu fou, d’autres, tués par les débris de l’explosion de l’Explorer I. D’autres, encore, ont succombé de la main d’un congénère. Ceux-là, personne n’ose les approcher. La honte est dans tous les regards, comment des Möams ont-ils pu s’entre-tuer ? Comment ont-ils pu transgresser cet interdit ?
— C’est à cause du fils de Zra ! Vous ne voyez donc pas que le règne de l’Obscur est là ! s’écrie soudain Yota.
Le sage au visage haineux s’est posté à quelques pas du cercle du Chemin de Lumière. Ses habits de cérémonie sont maculés, mais, sur sa tête, la coiffe à cinq branches, symbole de sa fonction, a retrouvé sa place. Non loin de lui, la dépouille de Jedehia a été posée sur un brancard confectionné à la hâte. Tandis que les gens s’approchent de plus en plus nombreux autour de lui et des gardiens fidèles à Jedehia, Yota poursuit sa diatribe :
— Il y a soixante-dix cycles, nos ancêtres créateurs furent anéantis par le fils de Zra qui se cachait sous les traits de l’Élu et notre terre fut envahie par l’Obscur ! Quand les légendes parlent d’un cycle où le monde fut plongé dans les ténèbres, il ne s’agit pas de nuit éternelle ! C’est dans nos cœurs que les brumes de l’Obscur sont tapies ! Cette nuit, il nous a envoyé son fils, une nouvelle fois ! Cette nuit, comme il y a soixante-dix cycles, notre doyen a péri en s’opposant à lui ! Zven le maudit est d