116
pages
Français
Ebooks
2011
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Publié par
Date de parution
30 août 2011
Nombre de lectures
19
EAN13
9782820611260
Langue
Français
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Date de parution
30 août 2011
Nombre de lectures
19
EAN13
9782820611260
Langue
Français
M moires de Vidocq - Tome IV
Eug ne-Fran ois Vidocq
1828
Collection « Les classiques YouScribe »
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ISBN 978-2-8206-1126-0
La profession de voleur n’existerait pas, entant que profession, si les malheureux contre lesquels la justice asévi une fois n’étaient pas honnis, vilipendés, maltraités ;la société les contraint à se rassembler : elle crée leurréunion, leurs mœurs, leur volonté et leur force.
Mémoires, tome IV.
CHAPITRE XLVI.
Les trois catégories. – La science marche. – Les délits et lespeines. – Expiation sans fin. – Roberto crédite experto. – Lapénalité absurde. – Les ganaches et les voltigeurs. – Le mannequin.– Les classiques et les romantiques. – Le Rococo. – Toxicologiemorale. – Les bons et les mauvais champignons. – La monocographie.– La méthode de Linné. – Les monstruosités. – Recherches d’uneclassification. – Une nomenclature. – Les suladomates et lesbalantiotomistes. – Analyse chimique. – La visite de l’érudit et letraité de famosis. – Les poches à la Boulard. – Une recetteastrologique. – Argus et Briarée. – Il n’y a que la foi qui noussauve. – M. Prunaud, ou la découverte improvisée. – Je puisgagner 50 pour 100. – La réclamation de l’émigré. – Un voldomestique. – La montre à quantième. – La femme enlevée. –M. Becoot et le duc de Modène. – L’Anglaise qui s’envole. –Retour aux catégories. – Commençons par les cambrioleurs.
Les voleurs forment trois grandes catégories,dans lesquelles on peut trouver plusieurs divisions etsubdivisions.
À la première de ces catégories appartiennentles voleurs de profession, qui sont réputés, incorrigibles, bienque l’efficacité presque constante du régime auquel les Américainsdu nord soumettent leurs prisonniers, ait démontré qu’il n’est passi grand coupable qui ne puisse être amené à résipiscence.
Une vie habituellement criminelle est presquetoujours la conséquence d’une première faute ; l’impunitéencourage et la punition ne corrige pas. Pour ce qui est del’impunité, tôt ou tard elle a son terme ; ce serait heureux,très heureux, si la punition, quel que soit le délit, neconstituait pas une flétrissure perpétuelle… Mais nos sociétéseuropéennes sont ainsi organisées, l’inexpérience y a tous lesmoyens de se pervertir ; succombe-t-elle ? la justice estdebout ; la justice, disons la législation : ellefrappe ; qui frappe-t-elle ? le pauvre, l’ignorant, lemalheureux à qui le pain de l’éducation a manqué, celui à qui l’onn’a inculqué aucun principe de morale, celui pour qui la loi estrestée sans promulgation, celui qui n’a pu avoir d’autres règles deconduite que les leçons de ce catéchisme sitôt oublié, parce quel’enfant ne l’a pas compris, et que l’homme fait n’y trouve, sousun amas de prescriptions religieuses, que des formules trop peudéveloppées pour la pratique. Que l’on ne s’y trompe pas, malgré ladiffusion des lumières, l’éducation du peuple est encore à faire.C’est la science qui marche, mais elle marche seule, elle marchepour les classes privilégiées, elle marche pour les riches… ;elle n’illumine que les hautes régions, plus bas il n’y a queténèbres, chacun s’avance au hasard et comme à l’aveuglette ;tant pis pour qui se fourvoie. À chaque pas il y a des abîmes, desgouffres, des embûches, des obstacles ; tant pis ! on nefera pas les frais d’un fanal… Cherchez votre chemin, pauvresgens ! si vous ne le rencontrez pas, on vous tuera.
Vous êtes-vous égarés, souhaitez-vous revenirsur vos pas, le souhaitez-vous avec force et sincérité ? Vainerésolution, l’on vous tuera… ; ainsi le veut le préjugé. Vousêtes maudits ; vous êtes des réprouvés, des Parias ;n’espérez plus… La société qui condamne, qui excommunie, crié survous anathème… Le juge vous a touchés : vous n’aurez plus depain !
Lorsque l’expiation est indéfinie, queparle-t-on de peines temporaires ? Le tribunal inflige unchâtiment, la durée de ce châtiment est fixée ; mais quand lasentence ne frappe plus, l’opinion frappe encore, elle frappetoujours à tort et à travers. La sentence veut retrancher six moisde la vie d’un homme, six mois de sa liberté, l’opinion anéantit lereste. Ô vous qui prononcez des arrêts, tremblez, le glaive deThémis ne fait que d’incurables blessures ; ses stigmates lesplus légers sont comme le chancre qui ronge tout, comme le feugrégeois qui dévore et ne peut s’éteindre.
Nos codes établissent des peinescorrectionnelles ; et les pires de tous les coupables ne sontpas ceux qui les ont encourues, mais ceux qui les ont subies. D’oùvient que nous allons ainsi en sens inverse du but ? C’est quemaltraiter n’est pas corriger ; c’est au contraire pervertiret corrompre de plus en plus la nature humaine, c’est lacontraindre à se dégrader, c’est l’abrutir. J’ai vu des libérés detoutes les réclusions possibles, j’en ai vu des milliers, je n’enai pas connu un seul qui eût puisé dans la captivité ses motifs dedevenir meilleur. Se proposaient-ils de s’amender ? c’étaittoujours par d’autres raisons plus puissantes ; le souvenir dela captivité ne réveillait qu’une irritation, un dépit, une rage,un ressentiment vague, mais profond, et point de repentir. On serappelait des concierges rapaces, des geôliers féroces, desporte-clés plus féroces encore ; on se rappelait desiniquités, des tyrannies, des tyrans ou plutôt des tigres, et l’onnous dira que ceux-là sont aussi des êtres faits à l’image de Dieu,ô blasphème !
Au libéré qui projette de se maintenirhonnête, il faut plus que de la vertu, il faut de l’héroïsme, etencore n’est-il pas sûr, s’il ne possède rien, que la sociétéentière ne se retirera pas de lui : c’est un pestiféré, unlépreux dont chacun s’isole. Est-ce la contagion que l’oncraint ? non, la contagion est partout, au bagne comme sousles lambris dorés de la Chaussée-d’Antin, c’est la miséricordequ’on redoute, et l’on saisit avec empressement un prétexteplausible pour s’en affranchir.
Puisque le libéré est proscritirrévocablement, s’il n’a pas le courage de périr, il faut bienqu’il se réfugie quelque part ; il lui est interdit de rentrerdans votre société, vous le repoussez, où ira-t-il ? dans lasienne, et la sienne est ennemie de la vôtre. C’est donc vous quigrossissez le nombre des malfaiteurs ; car le principe detoute société est de s’entre aider les uns les autres. Ses pairslui tendront d’abord une main secourable ; mais s’ils lenourrissent aujourd’hui c’est à condition que demain il vousdépouillera. C’est vous qui l’avez réduit à cette extrémité, nevous plaignez pas ; mais s’il vous reste du bon sens,plaignez-le.
La profession de voleur n’existerait pas entarit que profession, si les malheureux contre lesquels la justicea sévi une fois n’étaient pas honnis, vilipendés, maltraités ;la société les contraint à se rassembler, elle crée leur réunion,leurs mœurs, leur volonté et leur force.
Que l’on ne pense pas que l’abandon du libéré,que son exclusion soit le résultat d’une délicatesse de convention,cette exclusion n’est que la suite d’une hypocrisie. Le libéréest-il riche ? tout le monde lui tend les bras, point de portequi ne lui soit ouverte, il est reçu partout, Roberto créditeexperto , j’en puis parler sciemment. Qu’il ait une bonne tableet surtout une cave bien fournie, il aura pour convives desmagistrats, des banquiers, des agents de change, des avocats, desnotaires ; ils ne rougiront pas de paraître avec lui enpublic, ils le nommeront leur ami, enfin il sera avec eux compèreet compagnon ; et le commissaire, chapeau bas, ne tiendra pasà déshonneur de lui prendre la main : loin de là.
La seconde catégorie des voleurs se compose decette multitude d’êtres faibles qui, placés sur une pente rapide,entre leurs passions et le besoin, n’ont pas la puissance derésister à de perfides séductions ou à l’entraînement du mauvaisexemple. C’est la plupart du temps parmi les joueurs que se recrutecette affli